Depuis 2016, l’établissement est engagé dans une démarche ambitieuse de développement durable et multiplie les actions en interne et auprès de ses différents publics.

Le thème du « patrimoine durable », retenu cette année pour les Journées européennes du patrimoine, lui va comme un gant. Car à l’Opéra de Lille, le développement durable est entré dans les mœurs depuis 2016. Décors et costumes, par exemple, vivent généralement une deuxième vie tout aussi florissante que la première. « En 2019-2020, nous avons donné vingt tonnes de décors et quarante mètres linéaires de costumes. Certaines compagnies régionales ont fait des mises en scène avec 100 % de décors donnés », explique Euxane de Donceel, directrice administrative et financière de l’Opéra de Lille.

Un exemple parmi d’autres de la démarche volontariste de développement durable lancée à l’initiative des salariés (cent en équivalent temps plein). Il y a six ans, ils ont voulu s’emparer pleinement de cette thématique et de ses trois piliers que sont la réduction de l’empreinte environnementale, être un opéra pour tous et un employeur responsable. « Ils voulaient mettre en place des actions pour réduire leur empreinte écologique. Ils se sont réunis en groupes DD (pour développement durable ndlr) puis en comités avec des commissions », se souvient Euxane de Donceel. Ce fonctionnement est toujours en place aujourd’hui, avec des référents DD, porteurs ou relais d’actions concrètes au quotidien.

Moins consommer

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L’Opéra de Lille a donc agi sur trois leviers. Tout d’abord en recyclant largement sa consommation d’eau et d’énergie. En plus du don des décors et des costumes, l’établissement redistribue également ses appareils de bureautique à des associations d’étudiants et ses restes alimentaires aux maraudes sociales. Il a entrepris des travaux simples comme le remplacement des ampoules traditionnelles par des LED et travaille aujourd’hui à l’optimisation de sa consommation d’électricité. « Le bâtiment est énergivore par sa conception donc nous avons peu de prise sur ce sujet, poursuit Euxane de Donceel. En revanche on peut réguler le chauffage et diminuer ou augmenter de quelques degrés en fonction de l’utilisation des espaces. »

Pour limiter le volume de déchets, l’Opéra a banni les bouteilles et gobelets plastiques au profit de gourdes pour ses salariés et certains publics accueillis et a multiplié les points d’eau pour les recharger. Le vrac, le bio et le local ont également été privilégiés pour la restauration et dès 2016, la ville de Lille a installé des ruches sur le toit du bâtiment où elle mène des actions de médiation.

Cette politique en interne s’accompagne de sensibilisation pour les deux autres types de visiteurs des lieux : les artistes et le public. « Notre politique est valorisée à travers l’affichage dans tous les espaces, reprend Euxane de Donceel. On voit de vraies modifications de pratiques avec des spectateurs qui ne prennent par exemple qu’un seul programme pour deux voire trois et des personnes qui nous ramènent le papier par la suite. » Pour les artistes, les contrats de travail mentionnent désormais cette nouvelle politique et les bons comportements à adopter.

L’Opéra pour tous

L’Opéra se veut également un lieu ouvert à tous. « Cet axe croise celui de notre cahier des charges qui nous oblige à aller chercher le public et à placer l’ouverture à tous les endroits possibles », souligne Euxane de Donceel. L’inclusion est économique puisqu’aujourd’hui, entre les abonnements et les divers tarifs réduits, le billet moyen se situe autour de 25 €. Mais l’Opéra a également travaillé sur l’accessibilité pour les personnes atteintes de handicap auditif ou visuel avec l’audiodescription de spectacles, des dispositifs sonores augmentés des visites tactiles de scénographies et une personne formée à la langue des signes pour des visites du bâtiment.

Enfin l’ouverture se fait également aux territoires et aux publics éloignés de l’Opéra dans une région des Hauts-de-France très vaste. « Dans certaines zones rurales et dans quelques départements de l’ancienne Picardie, les gens ne peuvent pas faire des heures de route pour venir nous voir », constate Euxane de Donceel. Qu’importe, voici le Bus-Opéra qui vient à la rencontre de ces isolés géographiques et les transporte jusqu’à la salle.

Depuis 2015, le dispositif Finoreille rassemble neuf chefs de chœur qui dirigent des ateliers de pratique vocale destinés aux 8-12 ans dans les quartiers ou les communes culturellement ou socialement plus éloignés de l’Opéra. Plus de trois cents enfants suivent ces ateliers à un rythme hebdomadaire. « Une fois par an, ils viennent à l’Opéra où ils se produisent devant leur famille. C’est toujours un grand moment de satisfaction de les voir entrer dans ce qui leur semblait inaccessible », se réjouit Euxane de Donceel. Finoreille est désormais accompagné de Primoreille pour les 6-8 ans et Finoreille studio pour les plus de 12 ans qui, pendant une semaine de vacances, viennent à Lille pour travailler le chant.

Un employeur responsable

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Enfin, dans ce projet mené par les salariés, la place de la responsabilité de l’employeur est importante. Il s’agit du troisième volet de cette politique de développement durable. L’accent est mis sur l’égalité homme/femme avec, tous les ans, un index d’égalité professionnelle qui prend en compte cette parité, les écarts de rémunérations et les promotions. L’exemple vient d’en haut puisque Caroline Sonrier, directrice de l’Opéra depuis plus de vingt ans, fut la première nommée à ce poste en France. « Sur le plan global, nous sommes quasiment à la parité, note Euxane de Donceel. Mais il reste du travail à faire dans certains métiers : l’équipe costume est à 100 % féminine tandis que celle du plateau est quasiment masculine. » Avec la pandémie, l’équipe a également accéléré son travail sur la qualité de vie au bureau avec l’élaboration d’une charte de télétravail et de droit à la déconnexion.

Cette politique « durable » a pris une nouvelle ampleur en avril 2021 avec l’obtention de la certification ISO 20121, faisant de l’Opéra de Lille le premier Opéra de France à recevoir cette distinction officielle. « Cette certification récompense l’ensemble des actions entreprises par les salariés depuis 2016, et après un an et demi de travail très normé, nous a permis de structurer notre démarche et de nous donner une méthode de suivi de l’amélioration continue. » Signe de cette structuration, l’arrivée prochaine d’une salariée spécialement dédiée aux questions de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). « Nous sommes assez fiers d’avoir quelqu’un à 100 % là-dessus qui va pouvoir donner un coup d’accélérateur à nos actions », conclut Euxane de Donceel.

Bon élève, l’Opéra souhaite néanmoins aller plus loin et d’ici la fin de l’année, il aura le bon outil pour. L’établissement est en effet en train de calculer son bilan carbone qui lui permettra de constater, secteur par secteur, ses performances. Ces données permettront d’entamer, dès 2023, de nouveaux chantiers afin de rendre l’Opéra de Lille encore plus durable dans le temps.

Un cercle régional pour échanger sur les bonnes pratiques

Depuis 2017, l’Opéra de Lille fait partie du Cercle Culture et Développement Durable, en compagnie d’autres structures culturelles et pluridisciplinaires régionales. Ce Cercle est un réseau d’échange, qui permet aux acteurs du monde culturel des Hauts-de-France d’échanger autour de leurs pratiques liées au développement durable et de la Responsabilité sociale des organisations (RSO) et de confronter les expériences. De cinq membres à sa création, ce cercle s’est peu à peu agrandi puisque l’an dernier treize membres ont signé la charte d’engagement.