Le monde de la culture a payé un lourd tribut lors de la vague d’attentats qui a endeuillé la France en 2015. Après le dévoilement d’une plaque en hommage à deux éditrices au Centre national du livre (CNL), c’est au tour du musée Albert-Marzelles, à Marmande, de se souvenir de la disparition tragique au Bataclan, d’un ancien – et talentueux – étudiant aux Beaux-Arts de Paris : Alban Denuit.

« Le tragique de l’histoire, qui s’est douloureusement rappelé à nous, exige que nous soyons au meilleur de la défense des valeurs républicaines, à travers la culture ». En soulignant cette exigence, lors de ses vœux aux professionnels de la culture du 17 janvier dernier, la ministre de la Culture et de la Communication rappelait le lien essentiel entre projet politique et projet artistique. « Alors que partout le dialogue devient plus difficile, les mots plus violents, c’est autour des propositions portées par des artistes que la discussion et le dialogue semblent encore et toujours possibles », a plaidé Audrey Azoulay, convaincue que « c’est là que se joue l’avenir de notre projet de société ».

C’est autour des propositions portées par des artistes que la discussion et le dialogue sont encore et toujours possibles (Audrey Azoulay)

Une plaque dévoilée au Centre national du livre

Pour renouer le fil du dialogue, il faut d’abord se souvenir, ne jamais oublier. C’est pourquoi le Centre National du Livre (CNL) a dévoilé, le  16 novembre dernier, une plaque en hommage aux éditrices assassinées au Bataclan, Lola Salines et Ariane Theiller. Lola Salines (29 ans), était éditrice jeunesse chez Gründ, et Ariane Theiller (23 ans), travaillait pour le groupe Médias Participation. Elles étaient toutes deux au Bataclan vendredi 13 novembre 2015 pour assister au concert des Eagles of Death Metal. La plaque leur rendant hommage a été dévoilée en présence des familles et des professionnels de l’édition.

Une exposition au musée Albert-Marzelles, à Marmande

Salué par les artistes Giuseppe Penone et Marc Desgrandchamps, Alban Denuit, disparu lui aussi au Bataclan en 2015, était un artiste prometteur, dont le travail personnel fait l’objet, jusqu’au 4 mars, d’une belle exposition au musée Albert-Marzelles, à Marmande. Un travail particulièrement « présent », assure Giuseppe Penone, qui dirigea l’atelier que suivit Alban Denuit à l’école nationale supérieure des Beaux-Arts, à Paris. L’artiste y sonde les conteneurs, automobiles, emplacements de parking, palettes de manutention, parpaings, pots de peinture, cartons, cagettes de fruits et légumes, écrous, feuilles de papier, mines de crayon, tous ces objets « normés » qui impactent notre quotidien. « Alban Denuit donne ainsi à voir les coulisses de notre société post-industrielle, codifiée et rationalisée parfois à l’extrême », décrypte Théo-Mario Coppola, commissaire de l'exposition. « Alban Denuit avait dévolu sa vie à l’analyse poétique et critique des normes de notre civilisation, il a trouvé la mort sous les coups de ceux qui veulent la détruire », conclut Giuseppe Penone, chef de file du mouvement l’Arte Povera, en ajoutant : « J’aimerais qu’on se souvienne de lui au travers de son travail ».