Pour la deuxième fois consécutive, l’égalité entre les femmes et les hommes a été consacrée « grande cause nationale » par le président de la République pour toute la durée de ce quinquennat. Dans le cadre de sa politique active de lutte contre les inégalités liées au sexe et au genre et contre les discriminations et de son engagement pour prévenir et lutter contre les violences et les harcèlements sexuels et sexistes, le ministère de la Culture s’est doté d’un dispositif, l'Observatoire de l'égalité entre femmes et hommes dans la culture et la communication qui permet une analyse objective des inégalités entre les sexes dans le secteur culturel.
Publié tous les ans lors de la Journée internationale des droits des femmes, il présente des chiffres sur la part des femmes dans l’administration, les institutions culturelles, et dans l’ensemble des secteurs qui composent le champ culturel : patrimoine, création artistique, spectacle, cinéma, audiovisuel, livre, presse, médias… Tour d’horizon de cette onzième édition.
Plus de femmes aux postes à responsabilités
Les données de cette nouvelle édition permettent de mettre en avant la progression de la part des femmes dans les postes à responsabilités avec, en 2022, 23 femmes sur 42 nouvelles nominations à la tête d’institutions culturelles relevant du champ du ministère. « Ces nominations sont déterminantes pour briser le plafond de verre et susciter davantage de candidatures féminines à l’avenir, se réjouit la ministre de la Culture, Rima Abdul Malak. Source d’inspiration et écho des débats de notre société, la culture doit montrer l’exemple ! Je me réjouis des progrès significatifs réalisés pour une plus juste place des femmes dans les secteurs de la culture, mais le chemin vers l’égalité complète nécessite de redoubler d’efforts. »
Plusieurs chiffres sont en progression. Celui des femmes à la tête des établissements publics de la culture (41 % au 1er janvier 2023 contre 30 % en 2017), des centres dramatiques nationaux (42% contre 27% en 2019) et des directrices des affaires culturelles (44 % contre 35% en 2019). Les femmes sont même majoritaires à la direction des musées nationaux (68%), des entreprises de l’audiovisuel public (60 %) et dans les commissariats des expositions d’intérêt national (69%).
Le fameux « plafond de verre » est plus dur à briser dans les grandes entreprises puisque sur les cent premières des secteurs culturels (en matière de chiffre d’affaires en 2019), on trouve 14 % de femmes aux postes de présidence, direction générale ou de gérance au 1er janvier 2023, un chiffre qui tombe même à 9 % dans le secteur du livre et de la presse. L’Observatoire témoigne de la nécessité d’accentuer ces efforts dans les centres nationaux de création musicale, les centres chorégraphiques nationaux, les opéras et les scènes de musiques actuelles.
Majoritaires en écoles, minoritaires sur le marché du travail
Depuis la création de l’Observatoire, la même tendance se vérifie, chaque année : les femmes sont majoritaires dans l’enseignement supérieur de la Culture puisqu’elles comptent pour près des deux tiers des effectifs en 2021-2022. Les filières du patrimoine (82 %) et des arts plastiques (69 %) sont les plus féminisées.
Cette présence majoritaire devrait garantir un vivier nombreux et compétent pour assurer une relève paritaire dans l’ensemble des secteurs. Pourtant, celle-ci ne se vérifie pas sur le marché du travail puisque les femmes restent légèrement minoritaires dans les professions culturelles, où elles forment 45 % des effectifs en 2019. C’est notamment le cas chez les architectes et les photographes (38 % en 2019 malgré une part qui a plus que doublé en vingt ans), dans les professions du spectacle (34 %) et les artistes plasticiens (41 %). En revanche, les femmes sont toujours majoritaires parmi les professeures d’art (61 %), les traducteurs et traductrices (75 %) et les professions de la documentation et de la conservation (74 %).
Des œuvres féminines moins visibles
Malgré des progrès constatés dans l’accès des femmes aux moyens de création, de production et de diffusion, les œuvres des femmes restent moins acquises et moins programmées que celles des hommes. Exemple dans le secteur du spectacle vivant et de la danse, où les femmes réalisent en moyenne 41 % des représentations programmées en 2022-2023 et seul un quart des 2 060 représentations d’opéra au cours de la saison 2022-2023 sont mises en scène par une femme. Même tendance dans le secteur du cinéma puisque les trois quarts des films ont été réalisés par des hommes en 2021, une part qui évolue très lentement depuis dix ans, et seulement 7 % des femmes sont aux manettes des films d’animation. Enfin dans les arts plastiques, la parité est atteinte ou presque atteinte en acquisitions d’œuvres réalisées par des femmes : 52 % en 2021 par le Fonds national d’art contemporain, 42 % par les fonds régionaux d’art contemporain.
Le montant moyen des aides accordées est souvent inégalitaire et plus faible pour les femmes. Sur l’ensemble des disciplines du spectacle vivant, 36 % des équipes récipiendaires sont dirigées par des femmes mais elles ne touchent que 27 % des montants totaux. La situation est meilleure pour les autrices dont la part des demandes au titre du soutien à la création et à la traduction littéraire est de 53 % en 2022, mais le montant moyen par aide alloué est inférieur de 15 % à celui des hommes. Dans le domaine du cinéma, en 2021, sur les cinquante-huit projets bénéficiant de l’avance sur recettes du CNC, 41 % ont été réalisés par des femmes. Mais l’année 2022 se distingue doublement en signant le plus faible écart enregistré depuis vingt ans entre les devis des films réalisés par des femmes et ceux réalisés par des hommes (-21,3 %, contre -48,2 % en 2021) et en affichant un devis moyen pour les films strictement réalisés par des femmes au plus haut niveau de la décennie.
Toujours moins de femmes primées
L’Observatoire met également en évidence le peu de récompenses accordées aux œuvres féminines, notamment dans le cinéma. Depuis 1976, seulement 8 % des films primés aux Césars ont été réalisés par des femmes. Autre exemple international : seulement 3 % des récompenses du Festival de Cannes sont allées aux femmes et une seule Palme d’or en cinquante ans !
La situation est également peu favorable aux femmes pour la musique : 10 % d’artistes féminines primées aux Victoires de la musique du meilleur album depuis 1985. Dans le domaine de la photographie, bien que surreprésentées en début de carrière, les femmes ne grappillent que 32 % des prix de photographie emblématiques de 2012 à 2019, bien que ce chiffre monte à 50 % l’an dernier.
La situation s’améliore dans la musique classique - où les femmes représentent plus d’un tiers des récompensés – et au théâtre avec 40 % de metteuses en scène sélectionnées ou primées aux Molières. Le livre est un autre secteur où l’on s’approche de l’égalité avec les femmes bien représentées parmi les lauréates des grands prix littéraires (52 % de femmes de 2020 à 2022). En revanche, les jurys et les présidences de jury de ces prix demeurent majoritairement masculins en 2022 – 71 % en excluant le prix Femina.
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