Chaque année la DRAC Île-de-France intervient dans près de neuf quartiers prioritaires de la politique de la ville sur dix, à travers le soutien qu'elle apporte aux projets d'éducation artistique et culturelle, aux résidences d'artistes ou encore aux actions de sensibilisation au patrimoine. Ce travail, mené de concert avec les collectivités territoriales et les bailleurs sociaux, permet de rapprocher la culture des habitants et d'expérimenter de nouveaux terrains d'expressions.

 

L’Île-de-France compte 272 quartiers politique de la ville (QPV), soit 21 % des QPV de France métropolitaine. Cela représente 1,6 million d'habitants (13 % de la population régionale). Afin de prendre en compte cette spécificité francilienne et de répondre aux enjeux spécifiques de démocratie culturelle qui s'expriment dans ces quartiers, la DRAC s'est dotée de dispositifs pour certains uniques en France, et construit son action dans le dialogue avec les collectivités territoriales.

Le chemin vers la démocratie culturelle

Soutenir la culture dans les quartiers populaires, c’est déployer, en lien avec les partenaires, des projets culturels à double dimension à la fois territoriale et sociale. Les projets soutenus sont connectés à un écosystème plus large, une attention particulière étant portée à la circulation des bénéficiaires entre les quartiers et le reste du territoire, dans le but de rendre la culture accessible au plus grand nombre, de faire connaître les lieux culturels de la région, de provoquer des rencontres fécondes avec des artistes, en partant lorsque cela est possible de la richesse culturelle des quartiers pour en faire le matériau des projets et en mettant les pratiques et aspirations culturelles des habitants au cœur de la démarche.

Comme le reconnaît Laurent ROTURIER, directeur régional des affaires culturelles d'Île-de-France : "C'est un travail patient et le plus souvent invisible qui s'accomplit au quotidien, dans un dialogue permanent avec les collectivités, les structures culturelles, sociales et éducatives, mais aussi les bailleurs sociaux, et qui permet de porter des projets à la fois ambitieux artistiquement et porteurs de sens d'un point de vue social et humain. La clé de la réussite est de s'entendre tous ensemble sur les objectifs et de travailler de concert plutôt qu'isolément. La DRAC, du fait de la prégnance des quartiers politique de la ville en Île-de-France, a acquis une véritable expertise en matière de dialogue à l'échelon local et de construction des projets".

Les typologies de projets sont multiples. Il s'agit à la fois de projets artistiques liés aux transformations urbaines, de projets mettant en relation savoirs et savoir-faire du patrimoine, ou encore de projets où la fonction de médiation et les pratiques artistiques favorisent l’insertion professionnelle.

Pour la DRAC, il s’agit de prendre en compte la diversité des territoires, de favoriser les mises en relation et la co-construction avec les habitants en s’appuyant sur les ressources locales. L’un des enjeux est de rendre les participants acteurs des projets. Selon Jean-François DANIS, conseiller territorial à la DRAC :« L’objectif n’est pas seulement la démocratisation mais bien la démocratie culturelle. Les habitants ont leurs habitudes, leurs propres rapports au monde et l’enjeu pour nous est de leur proposer de décaler ce rapport au monde et à l’expression culturelle, avec d’autres outils, sous d’autres formes. »

Un appel à projets à la croisée des enjeux culturels et sociaux

"Culture et lien social" est un appel à projets annuel porté par la DRAC qui vise à développer des projets culturels et artistiques exemplaires et innovants à destination des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Le dispositif est destiné aux structures ayant comme principaux objectifs la création et la diffusion d’œuvres artistiques et culturelles.

Ces projets culturels et artistiques doivent être le fruit d'une co-construction entre une structure culturelle et une structure du champ social (maison de quartier, centre d'hébergement et de réinsertion sociale, centre social, bailleur social, association œuvrant dans le champ social, centre d'animation, mission locale, centre d'accueil de demandeurs d'asile, foyers d'accueil, résidence sociale...). Chaque projet doit aussi pouvoir proposer aux bénéficiaires d’entrer dans un processus de création, en prenant appui sur les droits culturels, et en veillant à la parité femmes-hommes.

Les critères de sélection portent à la fois sur la capacité de la structure culturelle à travailler en réseau sur le territoire, la qualité du partenariat noué avec les acteurs du champ social, la capacité des structures à identifier et mobiliser les bénéficiaires, les modalités de mise en œuvre et de restitution.

En 2021, ce sont 128 projets qui ont été accompagnés par la DRAC dans le cadre du dispositif "Culture et lien social", un appel à projets unique en France

Deux projets soutenus cette année donnent un bon aperçu des aventures culturelles menées grâce à l'aide de la DRAC.

A Sannois, l’espace Michel Berger (EMB), scène de jauge modulable labellisée Scènes de Musiques Actuelles (SMAC) s’attache depuis plus de 15 ans à faciliter l’accès aux musiques actuelles. L’établissement imagine des temps de rencontres, d’échanges, de création avec des artistes professionnels et un public valdoisien diversifié. C’est dans la continuité de sa démarche participative que l’EMB Sannois, en collaboration avec le centre social Eliane-Chouchena, le service jeunesse de la Ville de Sannois et la DRAC, a mis en place son projet "Culture et lien social". Une quinzaine de jeunes sannoisiens ont eu l’occasion de découvrir un processus de création musicale, partant de la rencontre avec les artistes, Ismaël Allem et Louise Holt, et allant jusqu’à la composition d’une chanson, sa production et la réalisation d’un clip vidéo.

Si l’objectif était de sensibiliser ce public à la création musicale, le projet leur a également permis de découvrir l’ensemble des métiers techniques et artistiques, à la plus grande satisfaction des participants qui n'entrevoient pas toujours ce type de carrières professionnelles dans leur champ des possibles.

Culture et lien social

De son côté, AREP Compagnie porte un projet artistique et collaboratif triennal (2021-2023), intitulé "Signaux faibles", construit en trois opus avec des jeunes en situation de grande exclusion d'Aubervilliers et des 13e et 14e arrondissements de Paris.

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Fort de son succès en 2021, l’opus 2 offre en 2022 une réponse artistique à la crise sanitaire et aux confinements qui ont été particulièrement éprouvants dans les quartiers prioritaires. L’outil "téléphone portable" sera un point de jonction entre l’exploration de l’espace intime des jeunes participants et l’exploration de l’espace public en tant qu’espace de transformation des possibles. Écriture de textes, images filmées ou encore récits enregistrés côtoieront les propositions théâtrales et chorégraphiques.

Les jeunes participants, issus de huit quartiers politique de la ville, offriront au public deux temps forts de restitution de leur travail artistique.

L'Été culturel : les quartiers prioritaires au devant de la scène

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En 2021, pour sa 2e édition, l'Été culturel (dispositif du ministère de la Culture conçu et mis en œuvre par la DRAC) a permis d'accompagner 350 propositions artistiques déclinées en plus de 2 000 événements franciliens, de juin à septembre. Plus de 60 % des projets accompagnés se sont déroulés dans les quartiers prioritaires de la région, au bénéfice de populations n'ayant pas le loisir de partir en vacances durant cette période.

Parmi les 200 projets QPV accompagnés en 2021, une fresque de street-art réalisée en partenariat avec le bailleur social Valophis et la commune de Villeneuve-Saint-Georges, sélectionnée parmi les plus belles fresques mondiales dans le cadre du Golden Street Art 2022.

Un autre projet qui a marqué les esprits est la "Yourte dans ma ville" des Frères Kazamaroff, compagnie de cirque actuel, qui a installé son centre culturel itinérant au pied des tours du quartier des Navigateurs à Choisy-le-Roi et dans le quartier du Clos Nollet à Athis-Mons. Pour le plus grand bonheur des habitants.

Les Yourtes dans ma ville / Les Frères Kazamaroff

L’opération C’est mon patrimoine ! : découvrir les joyaux du patrimoine durant les vacances scolaires

C’est mon patrimoine ! est un programme du ministère de la Culture mis en œuvre par la DRAC. Il permet aux jeunes de 6 à 18 ans et à leurs familles de s’approprier de façon originale les lieux patrimoniaux, leur histoire et leurs collections.

Le projet est mené dans une logique partenariale et se déroule sur les sites patrimoniaux. Il s'agit d'une façon de contribuer à l’émancipation des jeunes par la culture en s’appuyant sur la rencontre avec les artistes et les œuvres, sur la connaissance des arts et du patrimoine, et sur la pratique artistique. Chaque jeune est en effet invité à entrer dans le processus de création et à restituer publiquement le travail effectué avec le groupe.

C’est mon patrimoine ! vise l’ensemble des territoire prioritaires, chaque projet devant s'adresser majoritairement à des jeunes issus des quartiers politique de la ville de la région.

Un accord-cadre inédit avec les bailleurs sociaux franciliens

Au-delà des contractualisations qu'elle porte avec les collectivités territoriales, la DRAC appuie son action sur un partenariat avec l'union régionale des bailleurs sociaux (AORIF) autour du thème de l’accès à la culture pour les habitants du logement social en Île-de-France.

Un premier temps d’échanges le 8 décembre 2021 a permis de confirmer les partenariats avec les acteurs de l'habitat social. Ces accords sont formalisés dans un accord-cadre DRAC-AORIF pour la période 2021-2023.

Rencontres DRAC-AORIF du 8 décembre 2021

Cet accord permet à la DRAC de travailler au plus près des populations sur les enjeux de lien social, d’inclusion et d’équilibre territorial. Vincent ROUGEOT, responsable de la communication de l'AORIF, résume ce partenariat inédit en quatre verbes : "Favoriser - informer – faire connaître – mettre en relation".

Micro-Folies : déploiement dans les quartiers et création d’une collection francilienne

Sous l'impulsion de l'Établissement public du Parc de la Grande Halle de la Villette et avec le soutien de la préfecture de région et de la DRAC, les Micro-Folies se déploient sur l'ensemble du territoire. Une Micro-Folie est un équipement qui propose des contenus culturels ludiques et numériques. C’est un espace modulable de démocratie culturelle et d’accès aux œuvres qui peut s’installer dans tous les lieux existants et qui ne nécessite pas d’infrastructure particulière. De nombreuses Micro-Folies sont aujourd'hui implantées au cœur de quartiers politique de la ville.

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Afin d'accompagner le déploiement francilien des Micro-Folies, la DRAC a engagé la production d'une collection francilienne qui va permettre de mettre en lumière les richesses artistiques et patrimoniales de la région pour le musée numérique du réseau des Micro-Folies.

Trois des huit chapitres de cette collection croiseront l'histoire des quartiers populaires franciliens : le premier consacré à l'histoire du breakdance, marqueur fort de l'identité culturelle des quartiers franciliens et qui sera discipline olympique aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris en 2024 (crédits photo : Willy Vainqueur, Aubervilliers, 1984) ; le deuxième sur l'histoire des migrations ; le troisième sur le thème "Habiter la ville au XXe siècle".