Monsieur le député, cher Pascal,
Mesdames et Messieurs les Présidents et les Directeurs généraux,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis de la filière musicale,
C’est un grand plaisir pour moi que de vous retrouver à l’occasion du lancement des travaux préparatoires à la création d’un Centre national de la musique. Je vous remercie vivement de vous être rendus disponibles aussi nombreux, malgré les délais courts et le changement de date.
Nous sommes réunis aujourd’hui pour lancer les travaux opérationnels qui permettront l’installation du CNM dès le 1er janvier prochain.
C’est un délai ambitieux, mais nous pourrons nous appuyer sur les travaux approfondis déjà conduits récemment. Tout d’abord, sur ceux de Roch-Olivier Maistre, qui ne peut pas être parmi nous ce matin mais que je remercie également, dont le rapport à l’intitulé « programmatique », « Rassembler la musique, pour un centre national », a été largement salué et dont la principale recommandation est la création d’un Centre national de la musique.
Ensuite, une mission parlementaire de préfiguration a été confiée à Emilie Cariou et Pascal Bois en mai dernier. Au terme d’un travail dense, mené en concertation avec tous les acteurs, un rapport a été remis au Premier ministre, qui a confirmé la volonté du Gouvernement de créer un nouvel établissement public, le Centre national de la musique, qui devra être installé au début de l’année 2020. Le rapport est publié depuis début février sur le site du Premier ministre.
Ces travaux convergent et fournissent des arguments étayés pour confirmer la nécessité de créer un CNM, en dépit du retour de la croissance pour la musique enregistrée, et en dépit de la mise en sommeil en 2012 d’une première réflexion, à laquelle j’avais d’ailleurs participé.
Certains d’entre vous ont pu écrire que « la musique est le parent pauvre de la politique culturelle ». Sans adhérer à cette affirmation, il me semble néanmoins, qu’en effet, il est temps de renforcer le soutien à la musique, en la dotant d’un centre national, à même de rassembler la filière, de rationnaliser et renforcer le soutien qui lui est accordé et de représenter ses intérêts.
La musique est la première pratique culturelle des Français. C’est en outre un art démocratique par excellence, ainsi qu’un puissant levier d’émancipation. C’est aussi une des principales industries culturelles du pays.
Cependant, la filière musicale demeure éclatée et fragile. Elle a été bouleversée par la révolution numérique et les évolutions des usages. Au cours des quinze dernières années, l’industrie du disque a ainsi connu une crise de grande ampleur, notamment du fait du piratage de masse, avec une baisse de son chiffre d’affaires de l’ordre de 60% entre 2002 et 2015.
Si elle renoue depuis 2016 avec la croissance grâce à l’essor de la musique diffusée en flux, il convient néanmoins de rester très prudent. En effet, la musique diffusée en flux peut être porteuse de menaces pour la diversité musicale, avec un risque, renforcé par les algorithmes de recommandation, de concentration des écoutes sur quelques artistes et genres musicaux les plus populaires. Plus largement, la position désormais dominante des plateformes peut engendrer des phénomènes de concentration et porter atteinte à la diversité culturelle ainsi qu’à l’écosystème qui la porte et la défend.
Enfin, l’essor de la musique diffusée en flux entraîne une quasi-disparition des frontières et accroit la concurrence internationale, ce qui constitue une formidable opportunité pour la diffusion des artistes français à l’étranger mais aussi potentiellement une menace pour la place de la création musicale française et francophone dans notre pays.
De la même façon, le spectacle vivant musical a connu un dynamisme remarquable au cours des dernières années, malgré les attaques ignobles qu’il a eu à subir. Il est cependant lui aussi exposé à un risque de concentration excessive au sein de grands groupes et a connu l’an dernier un ralentissement de son activité, que je crois être purement conjoncturel.
Enfin, la distinction entre spectacle vivant et musique enregistrée apparaît de moins en moins opérante. Les acteurs conçoivent en effet désormais leur développement artistique et économique de manière de plus en plus intégrée, en s’appuyant pleinement sur ces deux piliers de leur diffusion.
Face à ces nouveaux enjeux communs, il apparaît aujourd’hui plus que jamais nécessaire de rassembler les dispositifs de soutien à la filière musicale au sein d’un Centre national de la musique. Ce Centre devra être au service de l’ensemble de la vie musicale, de l’ensemble des esthétiques et, au premier chef, des artistes. Son objectif sera de fédérer la filière et de mieux répondre à ses enjeux de diversité culturelle, de soutien économique, de développement international et d’action territoriale.
Il viendra compléter et amplifier l'action que mènent au quotidien les DRAC, aux côtés le plus souvent des collectivités territoriales, en faveur des acteurs de la musique dans toutes leurs composantes et au bénéfice de la diversité des esthétiques.
Afin de préparer cette installation, j’ai souhaité la mise en place dès aujourd’hui d’un comité opérationnel, dont j’ai confié la présidence à Catherine Ruggeri, Inspectrice générale des affaires culturelles, que je remercie d’avoir accepté cette mission. Elle m’a semblé être la personne la plus à même de conduire cette mission délicate, en raison de sa longue expérience dans le domaine culturel, de sa connaissance de l’administration et, bien sûr, de son expertise dans le secteur musical.
Ce comité aura pour mission de produire tous les « livrables » attendus pour la mise en œuvre concrète du projet. Ainsi, il devra traiter les aspects juridiques, budgétaires, administratifs, immobiliers, et sociaux –liés aux transferts de personnels –. J’insiste d’ailleurs sur ce dernier point, pour souligner l’importance de cette dimension du projet. Je tiens à ce qu’une attention particulière soit portée aux collaborateurs concernés et aux conditions de leur transfert vers le CNM.
Il réunira les structures qui ont vocation à être fédérées par le CNM : le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV) bien sûr, mais aussi le Fonds pour la création musicale (FCM), le Centre d’information et de ressources pour les musiques actuelles (IRMA) et le bureau export de la musique. Quand je dis « fédérer », je souhaite être bien compris : la question de l’intégration du Burex dans le CNM est un sujet qui a été largement débattu, notamment à l’occasion des consultations menées par Roch-Olivier Maistre, Emilie Cariou et Pascal Bois. Des arguments plaident en faveur d’une telle intégration, d’autres pour le maintien de son autonomie en dehors du CNM. Le sujet me semble mériter encore des réflexions. Mais quoi qu’il en soit, pour instaurer une politique cohérente, a minima, la subvention que l’Etat verse au Burex devra transiter par le CNM.
Le comité opérationnel réunira également les services compétents du ministère de la Culture, dont la Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC), qui sera chef de file et assurera le pilotage ministériel du projet, mais aussi la Direction générale de la création artistique (DGCA), qui sera pleinement mobilisée, et le Secrétariat général (SG), qui apportera son expertise en matière juridique, budgétaire, immobilière ou de ressources humaines.
Les directions régionales des affaires culturelles (DRAC), qui ont un rôle clé à jouer notamment en matière d’action territoriale, seront également étroitement associées à chaque étape de ce processus. C’est pourquoi le comité opérationnel inclura également un représentant des DRAC.
Je souhaite bien entendu que, vous, acteurs et professionnels du secteur, soyez pleinement associés à ces réflexions. Je m’y suis engagé. Je souhaite donc que soit réuni un « comité de liaison » des professionnels. Dans un souci d’efficacité et de mise en place effective et rapide du CNM, ce comité de liaison se réunira selon deux formats : un format restreint, qui aura vocation à échanger très régulièrement avec le comité opérationnel, par exemple sur un rythme mensuel, et un format plénier, intégrant l’ensemble de la filière, qui rencontrera le comité opérationnel sur une base trimestrielle.
Sur le plan législatif, la création du Centre national de la musique nécessite le recours à la loi. Cette exigence devrait être remplie par une proposition de loi, déposée par Pascal Bois, initiative dont je me réjouis vivement et que je soutiens pleinement. Monsieur le Député, vous prendrez la parole tout à l’heure pour nous présenter votre projet de texte et je vous en remercie.
Vous le savez, le projet de Centre national de la musique me tient aussi à cœur à titre personnel depuis longtemps, puisque j’ai participé activement dès 2011, comme Didier Selles, Alain Chamfort, Marc Thonon et Daniel Colling, ainsi que Catherine Ruggeri qui nous a rejoint ensuite, aux premières réflexions visant à le faire aboutir. Vous pouvez donc compter sur moi pour mettre toute mon énergie et toute ma volonté dans sa création rapide et effective.
Je cède maintenant la parole à Pascal Bois, qui va vous préciser le contenu de sa proposition de loi. Catherine Ruggeri vous présentera ensuite la méthode de travail qu’elle souhaite retenir.
Je vous remercie.