Alors que neuf villes sont encore en lice, la ministre de la Culture va désigner, le 30 mars, à l’issue d’une semaine d’auditions du jury, la première Capitale française de la culture.
On connaissait les Capitales européennes de la culture, voici leurs homologues au plan national : les Capitales françaises de la culture. Après une première pré-sélection, neuf villes sont actuellement en lice pour recevoir ce label attribué pour l’année 2022 : la Communauté d’agglomération Grand Angoulême, Brest, Laval, Le Mans, Metz, Saint-Paul de la Réunion, Sète, la Communauté de communes du Val Briard, et Villeurbanne. Alors que le jury chargé de les départager se réunit pendant une semaine, à partir du 22 mars, nous avons rencontré son président, Bernard Faivre d’Arcier. Entretien.
D’où vient l’idée de ce label de Capitale française de la culture ?
Ce label s’inspire des Capitales européennes de la culture qui, depuis leur lancement en 1985 par la Commission européenne, connaissent un vif succès. Chaque année, deux villes, l’une à l’ouest, l’autre à l’est, sont désignées Capitales européennes de la culture. Du fait de la désignation à tour de rôle par les États, la France, qui a déjà été représentée à quatre reprises, en 1989 avec Paris, en 1999 avec Avignon, en 2004 avec Lille, et en 2013 avec Marseille, ne pourra désigner une nouvelle ville qu’en 2028. C’est un horizon lointain. Aussi, à côté des Capitales européennes de la culture, il a semblé opportun à la ministre de la Culture de décliner ce concept au plan national.
Quelles sont les villes concernées ?
L’éventail est large puisqu’il s’agit de villes allant de 20 000 à 200 000 habitants. Le projet a été conçu en relation étroite avec les associations d’élus, et tout particulièrement « France urbaine », l’association des maires des grandes villes de France.
Quels critères avez-vous retenus ?
Chaque candidature doit reposer sur un projet culturel mettant en valeur la richesse et la diversité du territoire. Le projet doit donc présenter une vision et une stratégie culturelle claires et cohérentes au regard de huit critères définis par le ministère de la Culture : le caractère innovant du projet, la transmission artistique et culturelle, la participation des habitants, le rayonnement et la coopération internationale, l’accessibilité à l’égard des personnes en situations de handicap, la solidarité territoriale, la capacité de mise en œuvre et enfin l’inscription dans la durée. C’est bien l’ensemble de ces critères qui, conjugués entre eux, doivent participer d’une même dynamique de développement pour la ville. Enfin, il faut ajouter une dimension particulièrement importante : le tourisme.
Un financement spécifique du ministère de la Culture et la Caisse des Dépôts souligne l'importance de cette dimension culturelle...
La plupart des projets reposent sur des budgets conséquents de plusieurs millions d’euros , essentiellement financés par les collectivités locales ainsi que par leurs départements et leur région. À cette somme, s’ajoutera en effet pour la ville désignée un financement d’un million d’euros financé à parité par le ministère de la Culture et la Caisse des Dépôts. D’autres opérateurs de l’État pourraient également participer à la notoriété de l’événement comme Atout France pour le tourisme ou encore l’Institut français pour la promotion à l’étranger.
Que retenez-vous de cette initiative des Capitales françaises de la culture ?
C’est un succès puisque nous avons reçu 29 candidatures. Nous avons fait une première pré-sélection de neuf villes, et nous apprêtons cette semaine [la semaine du 22 mars] à auditionner les candidats retenus.
Cette pré-sélection a-t-elle été facile ?
De nombreuses collectivités candidates étaient déjà connues pour leur fort tempérament culturel, d’autres moins, mais toutes ont su faire preuve d’une grande qualité et diversité dans les projets proposés. L’enthousiasme et la créativité de ces 29 collectivités étaient remarquables, plus encore au regard du contexte si particulier dans lequel ces candidatures ont dû être construites. Le jury a pu être accompagné lors de cette premier phase de pré-sélection par un travail précieux d’analyse conduit par les directions régionales des affaires culturelles et les directions des affaires culturelles d’outremers dont il faut saluer la qualité et la précision. Sur cette base solide et grâce à la richesse des profils des membres du jury apportant chacun un regard et une expertise propres, nous nous sommes surtout attachés à retenir des villes qui avaient des projets d’avenir pour leur permettre de passer cette étape et devenir à leur tour des villes culturelles remarquables.
De nombreuses collectivités candidates étaient déjà connues pour leur fort tempérament culturel, d’autres moins, mais toutes ont su faire preuve d’une grande qualité et diversité dans les projets proposés
Vous énonciez les critères sur la base desquelles les villes étaient retenues. Qu’est-ce qui pourrait faire la différence entre les neuf villes encore en lice ?
Ces neuf villes mettent actuellement la dernière main à leur dossier qui sera ensuite transmis à la Réunion des musées nationaux - Grand Palais, l’opérateur désigné par le ministère de la Culture. C’est en étudiant ces dossiers plus exhaustifs que ceux dont nous disposions jusque-là – ils sont notamment accompagnés de documents financiers – que nous pourrons encore mieux juger des conditions de mise en œuvre de leurs projets.
Du fait de la situation sanitaire, le contexte est particulier : les projets mettent en valeur une culture incarnée dans chaque territoire dans un moment où chacun est face à son écran. N’est-ce pas paradoxal ?
Le label sera attribué pour 2022, à un moment, espérons-le, où la situation sera redevenue normale. Les projets ont d’ailleurs été majoritairement pensés dans ce sens, même si certains s’appuient aussi sur une diffusion de la culture par le biais des écrans.
Un mot sur le jury que vous présidez ?
L’entente est excellente au sein de ce jury collégial, composé de sept membres : quatre femmes et trois hommes. On y trouve notamment Françoise Benhamou, économiste de la culture, Hassane Kouyaté, metteur en scène et directeur du festival des francophonies en Limousin, ou encore le plasticien Adel Abdessemed. C’est un jury restreint mais qui représente une variété de situations dans le schéma culturel : artiste, acteurs du développement ou du tourisme culturel, organisateur d’événements, spécialiste des politiques publiques et représentant d’associations.
Le label Capitale française de la culture, c'est...
• 1 ville moyenne ou un groupement de communes de 20 000 à 200 000 habitants désigné tous les deux ans
• 1 million d'euros pour le projet culturel retenu
• 1 Capitale désignée en mars 2021 pour une première édition en 2022
Le label Capitale française de la culture est un projet piloté et financé par le ministère de la Culture avec le soutien de la Caisse des Dépôts, et mis en œuvre par la Réunion des musées nationaux-Grand Palais. Ce projet a également bénéficié de la mobilisation des ministères de l’Europe et des Affaires étrangères, de l’Économie, des Finances et de la Relance, de la Cohésion des Territoires et des Relations avec les Collectivités Territoriales, ainsi que l’ensemble des associations représentant les élus des collectivités territoriales.