« Nous devons provoquer la rencontre avec les artistes et les œuvres dans le quotidien de chacun », a indiqué Fleur Pellerin en inaugurant, lundi 3 novembre, à l'usine Renault de Flins, un nouveau dispositif de démocratisation culturelle : « L'entreprise à l'oeuvre ».

Rencontre. C'est une initiative particulièrement « symbolique ». Pour sa première exposition, « L'entreprise à l'oeuvre », nouveau dispositif lancé par le ministère de la Culture et de la Communication pour rapprocher la culture et le monde du travail, présente une toile monumentale de Fernand Léger, « Les Constructeurs », dans l'usine Renault de Flins (Yvelines). En 1953, Léger lui-même avait souhaité montrer son oeuvre aux travailleurs de l'usine Renault de Boulogne-Billancourt, fleuron de l'industrie française et fierté du monde ouvrier. Si en soixante ans, les contours de la société française ont considérablement évolué, le but de l'opération, lui, n'a pas varié : permettre aux salariés une rencontre au quotidien avec l’art.

Entreprises. Pour cela, six expositions vont être organisées dans des entreprises situées à travers la France jusqu'en décembre 2014. Après « Les Constructeurs » de Fernand Léger à l'usine Renault de Flins que les salariés pourront admirer pendant une semaine (du 3 au 7 novembre), d'autres propositions porteront sur les « Figures féminines dans l’art asiatique », «  Le Portrait à la Renaissance », «  Chagall graveur » ou la « Lumière ». Précision importante : les choix des thèmes émanent d'un travail collectif mené sous l'égide du ministère entre entreprises et musées. Les expositions peuvent être en rapport direct avec la raison sociale de l'entreprise (ERDF accueillera sur son site de Mérignac l'exposition « Lumière ») ou entretenir des liens plus éloignés. Elles permettent aussi de faire circuler les oeuvres appartenant à un musée : les oeuvres de Léger sont prêtées par le Musée Léger, à Biot, à l'usine Renault ; celles du musée Chagall, à Nice, rejoindront les Laboratoires Mérieux à Marcy-L'Etoile ; celles du musée de la Renaissance, à Ecouen, se retrouveront sur le port de Rouen à la société HAROPA ; ou celles du musée Guimet, à Paris, seront prêtées au groupe Sothys, à Brive. Dernier critère : accompagner ceux qui regardent les oeuvres à travers la scénographie (« comparable à celle des plus grandes expositions », a précisé Fleur Pellerin) etun dispositif de médiation détaillé et adapté.

In situ. Car c'est bien de cela dont il s'agit : favoriser par tous les moyens la rencontre avec l'art, renouveler les moyens d'accéder aux oeuvres, permettre une circulation plus intense de l'art. « Repenser l’accès à la culture, souligne la ministre de la Culture et de la Communication, c'est revisiter la conception même de nos politiques culturelles : nos concitoyens ne veulent plus d’une politique culturelle verticale et parisienne, d’une culture clef en main dont le périmètre aurait été une fois pour toutes arrêté. Pour repenser l’accès à la culture, nous devons partir de leurs pratiques et des lieux qui font vivre la culture partout sur notre territoire ». Première étape d'un vaste chantier, cette présentation in situ des « Constructeurs » de Léger à l'usine Renault ne sera assurément pas la dernière.

Fernand Léger : comment les ouvriers ont regardé « Les Constructeurs » en 1953

« J'ai apporté Les constructeurs aux Usines Renault et on les a installés sur les murs de la cantine. A midi les gars sont arrivés. En mangeant ils regardaient les toiles. Il y en avait qui ricanaient: Regarde-les, mais ils ne pourraient jamais travailler ces bonhommes avec des mains comme ça. Mes toiles leur semblaient drôles, ils ne comprenaient rien. Huit jours plus tard je suis retourné manger à la cantine. L'atmosphère avait changé. Les gars ne riaient plus, ils ne s'occupaient plus des tableaux. Pourtant pas mal d'entre eux, tout en mangeant, levaient les yeux, regardaient un instant les toiles, puis ils plongeaient à nouveau dans l'assiette ».

L'entreprise à l'oeuvre : les premières dates

  • 3-7 novembre : Les Constructeurs de Fernand Léger / Renault (Flins) et Musée national Fernand Léger (Biot)
  • 3-7 novembre : Figures féminines dans l’art asiatique / Sothys (Brive) et Musée national des arts asiatiques Guimet (Paris)
  • 17-21 novembre :Le Portrait à la Renaissance / Haropa (Ports autonomes de Rouen, Le Havre et Gennevilliers) et Musée national de la Renaissance (Ecouen)
  • 17-21 novembre :Chagall graveur / Bio-Mérieux (Marcy-L’Etoile) et Musée national Marc Chagall (Nice)
  • 1-5 décembre : Lumière / ERDF (Mérignac) et Centre national des arts plastiques (Paris-La Défense)