Le CIPAC (fédération d'associations des professionnels de l'art contemporain) réunit son sixième congrès à Lyon sur le thème « Nécessités de l'art ». Avec un objectif : mettre l'accent sur la formation et développer la pédagogie. Rencontre avec son président, Emmanuel Latreille.
Le CIPAC organise les 27, 28 et 29 novembre son sixième congrès après 6 ans d'absence. Pourquoi?
Le monde de l'art contemporain est fragilisé par des budgets qui s'érodent, un manque de visibilité dans les territoires, de reconnaissance pour certains métiers liés aux arts plastiques et visuels. Il s'agit aussi de donner plus d'élan à des opérations nationales et internationales qui nécessitent un fort soutien des pouvoirs publics et de l’État. Le rôle du congrès du CIPAC est de rendre compte de cet écosystème, de dresser un état des lieux, avec tous les acteurs du secteur : les commissaires d'exposition, les personnels des bibliothèques d'art, les régisseurs d’œuvres, les galeristes, des chercheurs, des critiques d'art, des enseignants, des artistes bien sûr et des étudiants en écoles d'art. Le congrès est ce moment de visibilité-là qui doit servir avant tout les acteurs de l'art contemporain et les métiers.
Avec l'accent mis sur la pédagogie?
Le CIPAC forme à des métiers du secteur, propose des stages et des emplois. Nous travaillons avec des régisseurs afin de montrer à des futurs étudiants la vulnérabilité des œuvres d'art face au temps, et les liens des métiers de la régie avec celui de la restauration. Nous abordons les métiers de la communication avec les diverses façons de promouvoir les événements liés à l'art contemporain, sur Internet, et sur les différentes plateformes d'art contemporain. Le métier de critique d'art figure également parmi nos préoccupations. Métier pour lequel nous souhaitons un statut à part entière.
Quelle place pour le public et comment développer le lien à l'art contemporain?
Dès que l'on pose la question du public, il faut s'intéresser à la formation. Quelles méthodes de transmission choisissons-nous pour intéresser et sensibiliser le public à l'art contemporain? Cela ne va pas forcément dans le sens du plus grand nombre, même s'il faut garder à l'esprit l'essentielle question de la démocratisation de l'art. Il faut penser des formes de rencontres nouvelles, et ce depuis l'enfance en s’appuyant sur l'éducation artistique. Avec, par exemple, comme nous l'avons proposé dans le FRAC (Languedoc-Roussillon) que je dirige, des danseurs qui étudient avec des élèves de maternelle et de primaire les formes de corps, la gestuelle, comme une introduction à l’œuvre d'art. Ou encore, des lectures de contes pour stimuler l'imagination des élèves et les conduire à voir d'autres démarches de création. La compréhension de l'art contemporain s'inscrit dans un parcours qu'il faut engager dès le plus jeune âge.
Qu'en est-il des artistes?
Nous voulons diffuser au mieux l'art contemporain et ses métiers. Forcément, l'artiste en est la pierre angulaire. Les artistes savent qu'ils peuvent compter sur les professionnels pour défendre leurs droits, promouvoir leur travail, améliorer la question de leur survie économique. Cette complémentarité entre les professionnels de l'art contemporain et les artistes est bien illustrée par l’œuvre d'art commandée à l'occasion du congrès. Une Palissade, une pièce inédite de l'artiste Niek Van de Steeg, une ligne de bois haute de 2,50 m et longue de 60 mètres qui serpentera la cour intérieure de l’École des Beaux-Arts de Lyon, avec des portes, des passages, comme pour figurer ce lien et ce regard vers l'autre, la matrice même d'une œuvre d'art.