A partir du 19 juin, #Archeorama, l'édition numérique des Journées européennes de l'archéologie, nous entraîne dans une expérience fascinante : la rencontre avec le passé.
Cette année, les Journées européennes de l'archéologie (JEA) - une manifestation conçue par le ministère de la Culture pour partager avec le grand public le meilleur de la recherche archéologique - se réinventent pour cause de crise sanitaire en une nouvelle opération numérique : #Archeorama. Théresia Duvernay, directrice du développement culturel et de la communication à l’Inrap (institut national de recherches archéologiques préventives), nous explique les enjeux de ce nouvel événement, qui se tient pendant trois jours, du 19 au 21 juin, dans toute la France.
Si, cette année, les Journées européennes de l'archéologie se présentent de façon inédite dans un format numérique, #Archeorama, elles ne sont pas pour autant désincarnées… Comment les chercheurs vont-ils partager leur passion avec le public en ces temps de crise sanitaire ?
Les archéologues ont l’habitude de la rencontre avec le public : les chantiers de fouille étant très souvent implanté au cœur de l’espace public, la médiation fait partie de leur ADN. Cela fait maintenant onze ans que le ministère de la Culture a confié à l’Inrap la coordination des JEA, et chaque année, nous avons pu constater combien cette manifestation est un rendez-vous important entre les citoyens et les archéologues, et cette année encore, malgré le contexte, la rencontre sera un mot clé des JEA.
Que ce soit sur Facebook, Instagram ou discord, nombreux seront les rendez-vous en direct, les chercheurs ont rivalisé d’ingéniosité pour maintenir cette rencontre directe ! En archéologie, la matérialité est importante : nous travaillons sur les vestiges matériels des sociétés, et la rencontre avec ces témoignages concrets, tangibles, du passé est un atout de notre discipline. En archéologie, le passé est bien présent : il est fait de céramique, d’ossements, de sédiments, de réalités concrètes et matérielles qui, grâce aux travail des chercheurs, permet de redonner vie à des individus et des collectifs, de raconter les histoires de nos prédécesseurs. Cette dimension matérielle, ce rapport au réel, est une force des JEA et c’était à ce titre une gageure de transformer l’événement en manifestation numérique !
Pour avoir pas mal navigué dans les ressources et les projets proposés par les 300 acteurs inscrits à ce jour pour l’opération #Archeorama, je peux vous assurer que le défi est relevé : la rencontre directe avec le passé aura encore lieu cette année, et définitivement, virtuel ne signifie pas désincarné !
Une enquête réalisée dans onze pays européens a montré que, pour 90 % des personnes interrogées, l’archéologie est utile pour connaître le passé, tandis que 86 % des personnes interrogées pensent que la présence de vestiges dans un territoire représente un atout
Lors de cette édition, #Archeorama mettra en lumière un grand nombre d’outils de partage des dernières connaissances, comme la reconstitution en 3D du site archéologique de Glanum ou les atlas archéologiques des villes de Rennes, Toulouse ou Besançon. En quoi ce portail permettra-t-il de rendre compte de la grande diversité des recherches archéologiques ?
La particularité des JEA, c’est de rassembler tous les acteurs de l’archéologie dans leur diversité, de la fouille au musée ! Ainsi, les laboratoires, les universités, les collectivités territoriales, musées, associations, les directions régionales des affaires culturelles (DRAC), tous concourent à la connaissance, la préservation et la diffusion du patrimoine archéologique et les JEA traduisent cette richesse.
#Archeorama permet à chacun de ces acteurs de faire connaître la grande variété et la richesse de ses productions culturelles, que ce soit des podcasts, des expositions virtuelles, des visites de fouilles en 3D, des webdocumentaires... Tous les media sont désormais utilisés pour non seulement restituer des collections ou sites archéologiques mais aussi pour établir de nouvelles formes de dialogue avec le public, de nouvelles narrations… Le renouvellement concerne tout autant les outils que le discours.
Le geste archéologique est particulier : il retire, couche après couche, les objets de son étude. Lorsque j’étais étudiante, on nous disait que l’archéologue détruisait son objet d’étude. Cette formulation est à nuancer car, en vérité, nous conservons le mobilier archéologique, sauvegardons les données, effectuons des prélèvements pour les analyses paléo-environnementales etc. Mais derrière cette formulation lapidaire, se cache une réalité : le site, une fois fouillé, n’existera plus. Alors l’archéologue a toujours documenté, avec beaucoup de précisions et de rigueur, l’acte de fouille. Des carnets de fouille aquarellés du XIXe siècle au photogrammétries d’aujourd’hui, ce n’est jamais que la technologie qui change.
Donc la matière à disposition des vulgarisateurs et médiateurs de l’archéologie est riche et importante ; ce qui a permis que les outils de médiation numérique s’adaptent assez rapidement aux mutations des pratiques numériques. A l’Inrap par exemple, nous proposons à tous en ligne une galerie muséale numérique qui permet de découvrir les objets archéologiques issus de nos fouilles entrés dans des collections publiques, une iconothèque riche de 5000 documents, une médiathèque comprenant plus de 1000 archives audiovisuelles, des podcast, des multimédia… L’éventail des solutions numériques est tel désormais, que le partage de la connaissance avec le public est facilité. #Archeorama témoigne de cette vitalité !
Découvertes in situ, expositions hors-les-murs, prolongement numérique, avant-goût multimédia... quel que soit le vecteur de découverte, ils se conjuguent tous au service d’un même objectif : rencontrer le passé par delà les frontières
Pour la première fois, cet événement mettra en avant la dimension européenne de l’archéologie. De Herculanum (Italie) à Stonehenge (Royaume-Uni), en passant par Altamira (Espagne), on ne compte plus les sites archéologiques remarquables en Europe. En quoi cet élargissement participe-t-il d’un renouveau de l’intérêt du public ?
Vingt-sept pays européens participeront cette année aux JEA malgré le contexte sanitaire et la difficulté de préparer un événement international commun ! Alors que chacun de ces pays connaissaient des situations sanitaires différentes, que les restrictions et les calendriers n’étaient pas les mêmes partout, qu’il n’y a pas deux cadres règlementaires identiques… vingt-sept pays vont, pendant trois jours, célébrer ensemble l’archéologie !
Donc la dynamique est bien là - et c'est déjà un beau succès. Mais cela témoigne aussi combien ces journées répondent à un besoin des acteurs de l’archéologie de se retrouver autour d’un rendez-vous fédérateur. L’intérêt du public pour l’archéologie est important, nous avons la chance de bénéficier d’un fort « capital sympathie », qui est partagé par tous les pays européens. Une enquête réalisée par l’institut Harris* auprès de citoyens de onze pays européens a montré que, pour 90 % des personnes interrogées, l’archéologie est utile pour connaître le passé, tandis que 86 % des personnes interrogées pensent que la présence de vestiges dans un territoire représente un atout. Les JEA peuvent contribuer au partage du patrimoine culturel au niveau européen, de manière à constituer un instrument de cohésion tout en préservant l'identité culturelle de chacun des participants.
Les chantiers de fouille étant très souvent implantés au cœur de l’espace public, la médiation fait partie de l'ADN des archéologues
Le patrimoine archéologique n’a pas de frontières : prenons l’exemple emblématique de Pompéi. L’Italie ouvre les portes du site d’Herculanum pour les JEA, tandis qu’en France, l’exposition "Pompéi" au Grand Palais plongera le visiteur dans une Pompéi numérique et immersive, et que le site web de l’Inrap permet de découvrir une websérie coproduite avec France Télévision et Gédéon programme ! Découverte in situ, exposition hors-les-murs, prolongement numérique, avant-goût multimedia... quel que soit le vecteur de découverte, ils se conjuguent tous au service d’un même objectif : rencontrer le passé par delà les frontières.
* les résultats de l’enquête sont consultables ici.
Retrouvez le programme sur #Archeorama