collected and presented by Françoise Mosser, with a preface by Maryvonne de Saint Pulgent and Jean-Pierre Bady, Comité d'histoire du ministère de la Culture, La Documentation française, 2016, 488 p.
2.Méthodologie de la collecte
Le ministère Lecat n’ayant encore donné lieu à aucune étude de fond, la première étape de notre travail a consisté à repérer les sources les plus pertinentes pour obtenir une vue d’ensemble sur son action et identifier les grandes lignes de sa politique. Il est apparu que les périodiques diffusés, à ce moment-là, sous l’égide de la Rue de Valois : la Lettre d’information bimensuelle du ministère de la Culture et de la Communication (qui relate, de façon très précise et quasi au jour le jour, les faits intervenus) et la revue mensuelle Culture et Communication (dont le contenu constitue, en quelque sorte, un miroir de la politique conduite à l’époque) apportaient, pour ce faire, des renseignements de premier ordre. La phase initiale de la recherche a donc pris la forme d’un dépouillement systématique de ces deux publications19, qui a conduit à une véritable immersion dans la période. Cette reconnaissance a été complétée par l’exploitation d’autres types de documents20, en particulier les agendas du ministre, opportunément retrouvés, qui ont joué un rôle essentiel pour la constitution du corpus. Ainsi a été réuni un ensemble de données permettant d’acquérir une connaissance sinon exhaustive, en tout cas assez vaste, des activités de Jean-Philippe Lecat et de ses services dans leurs divers domaines de compétence et, plus largement, de leur contexte culturel. Il a été de la sorte possible de dégager les orientations de l’enquête et de constituer des dossiers documentaires qui ont servi de base à la définition du programme puis à l’organisation des entretiens.
Plutôt que de conduire une série d’interviews abordant, classiquement, les différents secteurs relevant du ministère et privilégiant ceux où ses interventions avaient été les plus significatives, l’idée s’est imposée d’élaborer un programme axé sur des thèmes transversaux, correspondant mieux – nous a-t-il semblé – à l’approche qu’un membre du gouvernement est appelé à avoir de son département, et de proposer une mise en perspective de l’action de Jean-Philippe Lecat par rapport à une politique (les grands établissements nationaux, les projets et aménagements culturels, les régions…) ou à un milieu (le gouvernement, le Parlement, le monde artistique, les médias, l’environnement économique…). On a choisi, en outre, de s’attacher à des aspects moins notoires de ses interventions, telles ses initiatives à l’international – attestées par l’analyse de ses agendas – ou ses relations inter - ministérielles : des faits restés méconnus, au point qu’il a pu dire : « Vous avez mis le doigt sur des choses oubliées et vous avez révélé des cohérences. » Ce programme, qu’il avait approuvé («D’accord pour la suite – par thèmes – que vous prévoyez », 3 juillet 2009 ; « D’accord pour le programme à venir », 17 septembre 2009), n’était évidemment pas figé. Il a évolué et a été complété, au fur et à mesure de la progression des échanges, avec l’émergence d’autres éclairages suggérés par le narrateur ou inspirés par l’approfondissement des recherches. Les champs qui n’avaient pas été évoqués dans cette première phase devaient être l’occasion d’une seconde série d’entretiens.
Pour préparer chaque entrevue ou – plus précisément – chaque sujet qu’il était convenu d’y traiter, deux types de fiches étaient établis à partir de la documentation rassemblée : une chronologie mentionnant les faits qui avaient pu être repérés sur ledit sujet, enrichie de citations destinées à les illustrer : déclarations ministérielles, documents d’archives, extraits de presse, etc. ; une note de synthèse, rédigée à partir de cette chronologie et accompagnée d’un questionnaire. Ce dossier, adressé à Jean-Philippe Lecat avant chaque rendez-vous, visait à raviver ses souvenirs, à lui permettre d’identifier les points qui lui paraissaient les plus intéressants à développer ou à commenter, l’invitait à réagir sur les interprétations suggérées. Celui-ci pouvait les utiliser à sa guise mais, la plupart du temps, il a parlé en adoptant le déroulé de ces notes-questionnaires. Il n’y a pas eu, lors de l’entretien suivant, de retour systématique sur les propos tenus la fois précédente mais, souvent, l’ancien ministre a ajouté des précisions par le biais de messages manuscrits, envoyés sans attendre une nouvelle rencontre. Il en a, cependant, repris certains aspects : par exemple lorsqu’il a souhaité préciser les caractéristiques de son ministère. Il lui est arrivé aussi – ce fut pourtant assez rare – de se saisir d’une question non « inscrite à l’ordre du jour » mais qui lui tenait à cœur : on retiendra une brève notation sur l’Année du patrimoine et, surtout, ce qu’il a dit des radios libres.
Les témoignages ont été intégralement enregistrés et retranscrits, puis ont fait l’objet, par mes soins, d’une première mise en forme qui a été transmise à leur auteur. Celui-ci les a revus très minutieusement et les a validés après deux – parfois trois – relectures. Mais s’il a beaucoup remanié ses textes dans la forme, en apportant aux versions dactylographiées successives de nombreux ajouts manuscrits (notés en marge ou au dos des feuillets), on a vu qu’il ne les avait que très rarement modifiés sur le fond. Il importe de préciser que, dès l’origine de ce travail, il avait été entendu avec lui que seules les transcriptions qu’il avait approuvées seraient diffusées et que les enregistrements n’avaient pas vocation à être communiqués, sans restriction, à des tiers.
Six entretiens ont donc pu avoir lieu, qui se sont déroulés de juin 2008 à septembre 201021. À l’exception du premier, plus court, qui fut une simple prise de contact, ils ont eu une durée moyenne de 2 heures à 2 heures 30 et représentent, au total, 12 heures 20 d’enregistrement. Ces rencontres relativement espacées s’expliquent par le temps réclamé pour l’établissement des dossiers documentaires. La première, le 12 juin 2008, a constitué une entrée en matière. Elle n’avait été précédée d’aucun préliminaire, mais Jean-Philippe Lecat, qui ignorait encore comment s’organiserait l’enquête, l’avait très précisément préparée afin d’y faire passer les messages qu’il considérait comme essentiels. Cet exposé a, d’ailleurs, largement inspiré le programme qui fut ensuite élaboré. Les cinq autres entretiens, organisés à partir de juin 2009, ont permis de traiter, sans toutefois respecter l’ordre prévu à l’origine, une part de ce programme, mais le projet n’a pu, malheureusement, être mené à son terme22.
19 - Relevé et classement par thèmes des principales informations signalées dans la Lettre d’information ; réalisation d’une table des matières de Culture et communication (dossiers, articles de fond et notes d’actualité).
20 - Voir infra p. 49 et le chapitre « Sources et bibliographie »
21 - Ces entretiens ont eu lieu, précisément, le 12 juin 2008, les 18 juin, 16 octobre et 10 décembre 2009 et les 18 mai et 16 septembre 2010.
22 - Ces rencontres ont eu successivement pour objet : l’action internationale et les grands projets (18 juin 2009) ; les grands projets (suite) et le Centre Pompidou (16 octobre 2009) ; l’action du ministre au sein du gouvernement (10 décembre 2009) ; la suite des grandes institutions nationales (Opéra de Paris, Comédie-Française) ; un retour sur l’action internationale, après qu’on eut retrouvé les agendas qui permettaient de préciser l’emploi du temps du ministre en la matière ; les prix et distinctions, après la rédaction par Jean-Philippe Lecat d’une « note sur les décorations » (18 mai 2010) ; la politique culturelle dans les régions et la Bourgogne, après la remise du témoignage spontané sur « la circonscription » ; les industries culturelles et le mécénat sur la suggestion de Geneviève Gentil, qui travaillait à un ouvrage sur Augustin Girard (16 septembre 2010). L’entretien sur les relations avec le Parlement, pour lequel un dossier avait été préparé, n’a pu avoir lieu.