Ce mardi 10 avril, a été présenté à la presse "L'Homme Lion", projet de sculpture-performance d’Abraham Poincheval. La performance de l’artiste se déroulera du 2 au 8 juin 2018 au Musée-forum de l'Aurignacien, à Aurignac (Haute-Garonne).
Une commande publique
Le projet d'Abraham Poincheval a été retenu parmi 110 candidatures, suite à un appel à projets lancé en octobre 2016 dans le cadre d'une commande publique par la Communauté de communes des Terres d’Aurignac et le ministère de la Culture (Drac Occitanie) pour la réalisation d’une œuvre d’art originale pérenne permettant de tisser des liens entre la préhistoire, l’art contemporain et l’environnement, et d’apporter un nouveau regard sur le patrimoine d’Aurignac.
Ce projet de commande publique a été conduit par un comité artistique chargé de définir le cahier des charges, de choisir l’artiste et d’assurer le suivi de la réalisation de la commande artistique. Ce comité est constitué de la Communauté de communes, du Musée-forum de l'Aurignacien, de la Direction régionale des affaires culturelles d’Occitanie, et de personnalités qualifiées, les directeurs de la Chapelle Saint-Jacques, centre d’art contemporain de Saint-Gaudens et de l’École Supérieure d’Art des Pyrénées – Pau-Tarbes.
Le choix de "L'Homme Lion"
Le projet d'Abraham Poincheval "L'Homme Lion", à la fois sculpture et performance, a parfaitement intégré les trois éléments majeurs du programme de la commande liés à la singularité du site d’Aurignac : les thèmes de l’abri, du cheminement, de l’itinérance et du déplacement ainsi que celui de l’environnement naturel.
Le projet d'Abraham Poincheval
Cet artiste atypique investit physiquement les œuvres qu’il crée. Il a réalisé de nombreuses performances dans lesquelles il repousse ses limites physiques et mentales. La vie en autarcie, l’enfermement, l’immobilité ou la perte progressive des sens sont pour lui des moyens d’exploration du monde et de la nature humaine.
Pour Aurignac, Abraham Poincheval a proposé d’habiter ce paysage qui joue le rôle de pont géographique et temporel entre le musée, à l’architecture contemporaine et le passé, incarné par l’abri sous roche découvert en 1852 par Edouard Lartet. Il permet au visiteur d’habiter, en imaginaire, le corps d’un homo sapiens nomade le temps du parcours qui le mènera du musée à l’abri.
L’artiste s’est demandé comment Homo sapiens, cet homme moderne, comme nous, qui vivait lors de la première occupation de l’abri, se repérait dans ce paysage, sans cartes. Il devait nécessairement se fier à des repères et des particularités topographiques. C’est pourquoi il a choisi d’intégrer sur le sentier un point d’ancrage, une sculpture emblématique de la préhistoire, l’"homme-lion", la plus ancienne sculpture anthropomorphe qui nous soit parvenue, rappelant ainsi aux visiteurs du musée, comme aux randonneurs, qu’ils marchent dans les pas d’autres hommes, plus anciens, beaucoup plus anciens. Elle représente un corps humain surmonté d’une tête de lion, dont une copie est actuellement présentée au Musée-forum de l’Aurignacien. Découverte en Allemagne en 1939, dans la grotte de Hohlenstein-Stadel, cette statuette datée du Paléolithique supérieur, environ 32 000 ans avant notre ère, appartient à la culture aurignacienne. Actuellement conservée au musée de la ville d’Ulm, elle mesure 32 centimètres de haut et sa reconstitution se compose de plus de 300 fragments d'ivoire de mammouth.
Son projet prévoit de reproduire, en bois de mélèze, et d’agrandir la statuette pour atteindre 3,20 mètres de hauteur, afin de "l’habiter" lors d’une performance qui durera une semaine, du 2 au 8 juin, nuit et jour, dans l’obscurité de la pièce, en autonomie totale, afin de vivre l’expérience de la grotte.
Cette réplique respectera fidèlement les particularités de l’original, sa forme, ses manques, son nombril, les sept traits horizontaux et parallèles qui ornent son bras gauche... Seule modification, le torse de l’Homme Lion sera évidé afin d’aménager un habitacle à l’intérieur duquel pourra s’installer Abraham Poincheval.
Habiter l’Homme Lion, c’est à la fois faire l’expérience de la grotte et entrer dans l’imaginaire, dans la singularité d’une société. Abraham Poincheval.
Pendant la performance, l’artiste tiendra un journal puis, le jour de sa sortie, rencontrera le public, pour un récit de cette expérience hors-norme.
Après la performance, le public pourra vivre la même expérience et "habiter" à son tour l’œuvre.
Par la suite, la sculpture restera visible de façon pérenne sur son lieu d'implantation, le parcours qui relie le musée-forum à l’abri d’Aurignac.
Cette proposition artistique est à la fois une façon originale de mettre en lumière un patrimoine majeur méconnu, cet Homme Lion, mi-homme, mi-animal en cours d’études scientifiques, et un moyen de créer des passerelles avec le musée d’Ulm et le site en cours de fouilles en Allemagne.
Abraham Poincheval, un artiste performeur
Abraham Poincheval est un artiste contemporain français, né en 1972 à Alençon. Il vit et travaille actuellement à Marseille. Au début de sa carrière, de 2001 à 2009, il entreprend, avec Laurent Tixador, des expéditions extrêmes et insensées : creuser un tunnel, marcher de Nantes à Metz en ligne droite, camper au sommet d'un building. Adepte de la performance, il choisit par la suite d’expérimenter l’enfermement et l’isolement, ou bien, plus récemment, de se confronter au monde vivant en se substituant à l’animal : en 2017, installé dans les espaces du Palais de Tokyo, il tente de couver des œufs de poule jusqu’à leur éclosion.
Les partenaires
Cette commande artistique est financée par le ministère de la Culture, l’Europe (programme GAL-Leader Comminges-Pyrénées) et le syndicat mixte du Musée-forum de l’Aurignacien (Conseil départemental de la Haute-Garonne, Communauté de communes Cœur et Coteaux du Comminges).