Les 5, 6 et 7 juin, Rendez-vous aux jardins revient dans près de 2300 parcs et jardins. Sur le thème de « La promenade », la 13e édition de cette manifestation populaire lancée par le ministère de la Culture et de la Communication montrera que le jardin peut être - aussi - un lieu de vivre-ensemble.


« On prend soin du jardin, qui prend soin de nous »

A Marseille, Gilles Clément a transformé le jardin de l'hôpital Salvator pour enfants et adolescents en « Jardin de l'hospitalité ». Emmanuelle Ancona, attachée culturelle à l'APHM - Assistance publique hôpitaux de Marseille - nous en dit plus.

« Labellisé Marseille Provence 2013, ce projet a vu le jour lorsque Marseille était capitale européenne de la culture. L'APHM l'a confié à Gilles Clément, un paysagiste de renommée internationale dont on connaît l'habileté à se servir de l'existant. Le jardin de l'hôpital Salvator, en effet, n'était pas une page blanche : c'était déjà un jardin présent et généreux. Au lieu de tout changer, il fallait juste le « re-périmétrer » et l'accompagner vers les jeunes. C'est Gilles Clément qui lui a donné son nom de « Jardin de l'hospitalité » et qui l'a conçu dans ce sens. L'hospitalité, ce n'est pas seulement ouvrir les portes de chez soi, c'est aussi créer des modalités d'échanges et de rencontres. La relation avec la nature, le fait de jardiner, est une relation mutuelle particulièrement bénéfique pour les jeunes malades. On prend soin du jardin, qui prend soin de nous.

« La relation avec la nature est une relation mutuelle particulièrement bénéfique pour les jeunes malades »

« Le jardin se compose de plusieurs espaces. Une aire de jeu circulaire – en phase d'aménagement - sur l'emplacement de l'ancienne héli-station. Deux potagers, ronds eux aussi, en forme de mandalas, avec des ateliers de jardinage et d'entretien animés à l'année par l'association Naturoscope. Le personnel soignant troque les blouses contre les bottes et les gants. Soignants et petits malades ont les mains dans la terre. Les enfants ont dessiné une cabane du jardinier, qui sera bientôt réalité. Il y a aussi un beau théâtre de verdure pour accueillir des concerts, spectacles, ateliers de danse et de théâtre. Et enfin la prairie et le sous-bois : des espaces de contemplation et de détente sur lesquels on a installé les hôtels à insectes et nichoirs, si chers aux enfants. Le jardin est conçu de manière à permettre une gestion écologique rigoureuse : tonte sélective pour une meilleure repousse des arbres, arrosage minimum, respect de la biodiversité. Authentique jardin partagé, le Jardin de l'hospitalité se veut aussi lieu de ressources et de transmission. C'est aussi chez l'enfant, qu'il faut planter des graines ».


« Il n'existe pas de "mauvaises graines" dans la nature ! »

A Graulhet (Midi-Pyrénées), les architectes paysagistes Arnaud Maurières et Eric Ossart finissent pour Rendez-vous aux jardins le « Jardin de la Rivière », né sur une friche industrielle. Visite avec Arnaud Maurières.

« Ce jardin répond à une commande publique lancée en 2013 pour une friche en pleine ville. Graulhet, ville de 20 000 habitants, fut une grande ville du cuir qui abritait une centaine de mégisseries, désaffectées depuis une dizaine d'années. Situé entre la rue saint Jean et la rivière du Dadou, le « Jardin de la Rivière », primitivement appelé « Jardin des mauvaises graines » à cause des plantes rustiques qui envahissent les décombres, veut relier la ville à la rivière. Sur cette pente naturelle du terrain, on a donc aménagé une palmeraie de soixante-deux palmiers. Ils sont notamment un clin d’œil à la mode des palmiers qui sévissait au XIXe siècle dans le sud-ouest. Pour relier la rue à la rivière, deux grands escaliers-jardins de gabion – sortes de cages métalliques servant à élever un mur - et un troisième évoquant un amphithéâtre de verdure. Entre les palmiers et les escaliers, on a semé une prairie naturelle, plantée de figuiers, cognassiers et budleyas. On a joué sur la carte de la végétation spontanée du lieu. Nul besoin de plantes extraordinaires pour faire un jardin extraordinaire !

« On travaille sur les plantes dé-polluantes endémiques afin de dépolluer le sol des friches industrielles »

« C'est une belle expérience humaine. Nous avons travaillé en quelque sorte en « régie directe » avec les jardiniers et terrassiers de la ville, qui se sont appropriés le projet. Le jardin est très apprécié des habitants de ce quartier où cohabitent plusieurs communautés. A la faveur de ce projet, Graulhet s'est découvert une vocation de plateforme expérimentale. En lien avec le CNRS, elle travaille sur les plantes dé-polluantes endémiques afin de dépolluer le sol des friches industrielles, saturé en mercure. Ce sont des plantes banales qui, une fois fauchées et brûlées, absorbent les métaux lourds. Vous voyez, il n'existe pas de « mauvaises graines » dans la nature. »

« Le jardin, c'est partager et transmettre des expériences »

Balade photographique au « Jardin des métamorphozes », dans le Domaine du Prieuré à Valaire (Val de Loire), avec sa propriétaire, Marie-France Gallou Le Gall.

« Je suis née et je vis ici, dans ce prieuré qui date du XIe siècle. Ce jardin, constitué de multiples petits jardins de styles différents, je l'ai créé en 1984 pour mon propre plaisir. J'y ai installé une galerie d'art contemporain et un salon de thé. Je l'ai ouvert au public il y a sept ans pour montrer l'art dans un jardin. Les deux, me semble-t-il, vont bien ensemble. Les sculptures ne sont-elles pas arrivées dans les jardins à la Renaissance ? Chez moi, on trouve de l'art topiaire, comme par exemple un dragon en buis taillé de cinq mètres, des sculptures en métal d'animaux, de fleurs, de légumes... Le nom de « Jardin des Métamorphozes » avec un - z - s'inspire, bien sûr, de la légende du magicien d'Oz. Le jardin est un lieu changeant, qui évolue, et l'histoire d'Oz nous apprend à ne jamais juger sur l'apparence. Lorsqu'on ouvre un jardin, on suit des formations à la botanique, au paysage, à la protection de la biodiversité. Dès lors, j'ai vu mon jardin autrement. J'applique la permaculture : je paille, je couvre ma terre, je ne bêche jamais. Le jardin, c'est aussi la transmission de ces expériences.

« Montrer l'art dans un jardin »

« Pour l'édition 2015 des Rendez-vous aux jardins, la photographie servira de guide. A partir de photos prises en 1984 et exposées à l'endroit où elles ont été faites, on mesurera le « tour de taille » pris par les arbres ! Une photographe expliquera aux visiteurs comment on fait de la photographie de jardin. Une photographe plasticienne, à partir de clichés d'écorces d'arbres, produira une peinture de corps de femme, « Rebelles ». Un jeune artiste fera une démonstration de street art sur une toile tendue entre deux arbres, en expliquant pourquoi les tags respectent les lieux. Un sculpteur sur métal livrera une grande grenouille créée spécialement. Un jardin fait par la personne qui habite les lieux a une âme différente des autres jardins. Les gens se l'approprient instinctivement. Le plus beau compliment m'a été fait par une visiteuse hollandaise : Je me suis sentie comme une carotte, avec les racines dans la terre et l'énergie qui remonte. Et moi, je voyais des fanes au-dessus de sa tête ».

> Partout en France et bien sûr dans les territoires d’outre-mer, 2 300 parcs et jardins publics ou privés proposeront autant de variations autour du thème de la promenade. Nouvelles créations de jardins, ouvertures exceptionnelles, les jardins dérouleront le tapis rouge pour tous les publics et en particulier les familles : animations, visites guidées, ateliers, parcours ludiques, spectacles, expositions...

> Emblématique de l’action du ministère de la Culture et de la Communication en faveur de la connaissance, la protection, la conservation, l’entretien, la restauration, la création de jardins et la transmission des savoir-faire, Rendez-vous aux jardins fédère les nombreuses initiatives mises en place par les directions régionales des affaires culturelles et les collectivités territoriales.

> Cet événement est mené en collaboration avec le Centre des monuments nationaux, le Comité des parcs et jardins de France, la Demeure Historique, les Vieilles Maisons Françaises et le réseau des Villes et pays d’art et d’histoire.