Madame la directrice du musée de Cluny, Elisabeth Taburet-Delahaye,
Madame la maire du 5e arrondissement, Florence Berthout,
Madame la Présidente de la RMN-GP, Sylvie Hubac
Madame la présidente de l’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture, Clarisse Mazoyer,
Monsieur l’architecte en chef des monuments historiques, Paul Barnoud
Monsieur l’architecte, Bernard Desmoulin et ses équipes,
Mesdames, Messieurs, Chers amis,
Il est certains lieux qui nous rappellent de la plus éclatante des manières la richesse de l’histoire de Paris, la richesse de l’Histoire de France. Des lieux qui forment ce patrimoine exceptionnel, unique au monde, un héritage précieux.
Le musée national de Cluny, ou plutôt devrais-je parler des thermes et de l’Hôtel de Cluny, en font assurément partie. Au cœur du Quartier latin, cet hôtel particulier du XVème siècle a été le témoin de quelques grandes heures de notre histoire ou du moins de quelques épisodes atypiques.
Après avoir accueilli les abbés de l’ordre de Cluny en Bourgogne, on s’y est assuré que la jeune Marie d’Angleterre ne porte pas d’enfant afin que son cousin François Ier puisse accéder au trône.
A partir du XVIIème siècle, l’Hôtel a servi de nonciatures aux légats du pape puis, avant la Révolution, il a abrité les presses de l’imprimeur de la Reine.
L’État s’en porte acquéreur en 1843 ainsi que de la collection de son dernier propriétaire, Alexandre Du Sommerard, Conseiller maître à la Cour des comptes, qui était passionné par le Moyen-Age.
Le Musée est né. Les bâtiments sont restaurés. L’Hôtel est classé monument historique en 1846.
Peu à peu le musée accroît ses collections et sa vocation est confirmée en 1992 par sa nouvelle appellation de Musée national du Moyen-Age.
Ce musée, riche de plus de 14 300 pièces (peintures, sculptures romanes et gothiques, en pierre ou en bois, vitraux, œuvres d’orfèvrerie et d’émaillerie, tapisseries mais aussi objets du quotidien), recèle une des plus belles collections consacrée au Moyen-Age dans le monde.
Un de ses joyaux est bien sûr la fabuleuse tenture de la Dame à la licorne, icône exceptionnelle, adulée des petits et des grands, cet ensemble de six tapisseries du début du XVIème siècle représentant les cinq sens et même un sixième, « Mon seul désir », formule sur laquelle on s’interroge encore.
Cette tenture n’est pas la seule raison du succès du musée de Cluny. Elles sont nombreuses. D’abord la beauté du site et de son emplacement. Mais aussi l’attrait des visiteurs pour cette période du Moyen Âge.
Car comme le disait le grand médiéviste Georges Duby « le Moyen-Age est un monde merveilleux, c’est notre western. »
La période tourmentée que nous traversons est propice à l'attrait d'un voyage dans le temps pour refaire connaissance avec l’histoire, avec notre histoire partagée.
Le Musée de Cluny a, comme d’autres, souffert des attentats qui ont touché Paris en 2015, avec une diminution notable de sa fréquentation.
Je veux donc vous assurer du soutien de l’Etat au Musée pour assumer financièrement les conséquences des besoins de sécurité renforcée. Et nous continuerons à la faire, bien sûr, dans les mois qui viennent.
Je tiens d'ailleurs à remercier toutes les équipes du musée d'avoir intégré et assumé cette contrainte nouvelle sans entamer la qualité d'accueil du public.
C'est cet objectif de mieux accueillir le public qui nous réunit aujourd'hui.
Un musée qui ne peut plus accueillir dans de bonnes conditions ses visiteurs est un musée qui risque le désintérêt des visiteurs. Cela est d’autant plus vrai aujourd’hui dans le contexte d’une offre toujours plus forte, voire d’une concurrence entre les établissements.
Le défi ici était double.
D’une part le musée souffrait de son manque d’ouverture sur la ville, en dépit de son implantation exceptionnelle.
D’autre part il ne répondait plus aux exigences d’accueil du public, et notamment des visiteurs en situation de handicap physique. L’État s’est engagé avec le musée, pour le musée, dans un chantier sans précédent de rénovation, pour une véritable renaissance, en mobilisant 25 millions d’euros. D’abord pour créer un nouveau bâtiment d’accueil. Nous en poserons dans un instant la première pierre. Je m’en réjouis et je veux saluer l’architecte Bernard Desmoulin pour la qualité de son projet.
Vous avez, par le passé, mis votre art au service du Musée des Arts décoratifs ou du musée de Sarrebourg, ou, plus récemment, à l’aménagement intérieur et contemporain du Grand Commun du Château de Versailles.
Le Musée de Cluny vous donne à nouveau l'occasion d'une belle réalisation. Vous avez conçu avec les équipes du musée une nouvelle lecture des différents ensembles architecturaux aujourd’hui reliés de façon hasardeuse, quelque peu labyrinthique selon vos propres mots. Votre projet vise aussi bien l’accessibilité à tous, aujourd’hui insuffisante, qu’une nouvelle présentation des collections.
Bien sûr, construire un nouveau bâtiment au cœur de cet ensemble historique est un geste qui est loin d’être anodin. Pour ma part, je crois que la meilleure façon de protéger notre patrimoine c’est de le valoriser en le faisant vivre et en l'intégrant dans notre quotidien. Ouvrir ce site, c’est aussi lui donner une nouvelle respiration, un nouvel attrait auprès du public. C’est lui donner un nouvel avenir.
Il nous faudra attendre encore une année environ pour profiter de ce nouveau site d’accueil, dont la construction va s’accompagner d’une nouvelle muséographie, conçue par Bernard Desmoulin et le studio Gardère, qui vont procéder à une véritable refonte des parcours dans le musée.
Trois autres grands chantiers sont en cours ou tout récemment achevés : la restauration des vestiges gallo-romains, la restauration extérieure et intérieure de la chapelle – que je viens de visiter avec l’architecte en chef des monuments historiques, Paul Barnoud - ainsi que la restauration des toitures du bâtiment construit par Paul Boeswillwald à la fin du XIXe siècle pour relier l’hôtel médiéval aux thermes antiques.
Ces projets immobiliers majeurs, que vous avez regroupés sous l’appellation « Cluny IV », vont ainsi, bien évidemment, contribuer à changer le visage du Musée de Cluny.
Le Musée va s’ouvrir physiquement comme il l’est déjà profondément dans son esprit. Je pense à la politique active de prêts et d’expositions hors les murs. En 2016, on a pu retrouver ses collections à Loche mais aussi à Séoul ou à Prague.
Le musée de Cluny est fortement engagé dans le projet «Louvre Abou Dabi» où il apportera la plus grande part de la représentation de l’art médiéval occidental.
J’étais à Abou Dabi il y un peu plus d’un mois pour la conférence internationale sur la protection du patrimoine en péril voulue par le Président de la République. J’ai eu la chance de visiter le chantier du Louvre avec son architecte, Jean Nouvel. Le Louvre Abou Dabi sera un écrin magnifique pour les œuvres du musée de Cluny au sein d’un musée universel.
C’est dans le même esprit de circulation des œuvres et du savoir, que le musée de Cluny est d’ailleurs membre fondateur du réseau européen des musées d’art médiéval.
Ainsi le Palazzo Madama de Turin accueille actuellement l'exposition présentée ici le printemps dernier, « Les émaux de Limoges à décor profane. Autour des collections du cardinal Guala Bicchieri. »
Cette exposition a connu un beau succès, tout comme celle à laquelle elle a laissé la place, « Les temps mérovingiens. Trois siècles d’art et de culture en Gaule franque ». C’est une exposition passionnante qui permet une lecture scientifique et réfléchie de notre rapport à ces ancêtres.
Pour terminer, je veux vous dire que je me réjouis particulièrement d’être ici à l’heure où nous sommes en train d’achever la grande réflexion sur le Musée du XXIème siècle que j’ai lancée en mai dernier.
En novembre dernier, je réunissais au Ministère de la Culture l’ensemble des dirigeants de musées nationaux. Vous y étiez présente, Madame la Directrice.
Il s’agit en quelques mots de redéfinir la place du musée au cœur de la société, de repenser ses liens avec la population, son rôle citoyen, sa fonction et son fonctionnement.
C’est une grande ambition. Je me réjouis que le Musée de Cluny, en soit pleinement partie prenante.
Je veux conclure en saluant toutes les équipes du musée, qui chacun à leur endroit et dans leurs compétences, permettent que soit étudié, valorisé et partagé un patrimoine d’exception, producteur de sens et fédérateur, cimentant notre société et lui permettant de regarder vers l’avenir.
C’est ce travail d’exception que l’État accompagne et soutient dans ce chantier majeur.
Je vous remercie.