Une œuvre monumentale de Nicolas Mignard
Cette œuvre monumentale, mesurant près de 5,5 m de haut sur 3,75m de large sans son cadre, a été commandée en 1645 par les chanoines de Nîmes pour orner le maître-autel de la cathédrale. Achevée en 1647, elle est due aux pinceaux du peintre Nicolas Mignard (1606-1668), frère de Pierre, premier peintre du roi, et lui-même formé à Rome avant de revenir s’installer à Avignon : il s’est inspiré pour l’occasion d’une toile de Guido Reni, grand maître de la peinture italienne, exécutée en 1617 pour l’église Sant’ Ambroggio de Gênes.
Elle représente l’ascension de la Vierge Marie vers les cieux, dans son manteau bleu et portée par des anges, tandis qu’en partie basse les apôtres se pressent et se penchent au-dessus de son tombeau vide.
L’incroyable histoire du tableau
A la Révolution, le tableau a été descendu et roulé pour servir de tapis, avant d’être redécouvert et « restauré » au cours du 19e siècle par Numa Boucoiran, professeur de dessin à Nîmes. Il n’a toutefois pas été réinstallé dans la cathédrale, mais a rejoint le grand escalier de l’évêché, devenu musée des Beaux-Arts en 1919, où il est resté bien en vue pendant plusieurs décennies.
L'opération fait suite à la redécouverte en 1995 du tableau dans les réserves du musée de Nîmes où il avait été remisé suite à un dégât des eaux, puis à une étude préalable conduite en 2015-2016. Conduite sous la maîtrise d’ouvrage de la DRAC Occitanie, elle sera réalisée par un groupement de 7 conservateurs-restaurateurs spécialisés sous la direction d’un mandataire (Mme Marina Weissman, Avignon, associée à M. Hervé Giocanti, Mme Tiphaine Vialle, Mme Armelle Demongeot, Mme Marine Victorien, Mme Silvia Petrescu Ruffat et Mme Mylène Bonnardel).
Le coût et la durée du projet de restauration
Le projet représente un coût total de 233 036,44 € TTC, dont 39 998,40 € TTC en tranche ferme (complément d’étude, mise au point des protocoles et retrait des repeints), et 193 038 € TTC en tranche optionnelle (masticage et réintégration des lacunes) dont le montant sera éventuellement ajusté en fonction des choix.
Les travaux ont débuté au printemps 2022 et devraient se dérouler sur près de 27 mois, avant d’envisager le retour de l’œuvre à Nîmes et son installation pressentie dans la cathédrale, qui nécessitera des études plus approfondies sur les conditions d’accrochage.
Une restauration délicate
La grande taille du tableau, même si elle nécessite un atelier spécifique avec échafaudage pour son traitement, n’est pas le principal problème que pose cette restauration. Une première « restauration » conduite au 19e siècle a en effet été réalisée avec des mastics à la céruse, substance blanche fabriquée à partir de carbonate de plomb, posant des problèmes de dureté, très difficile et longue à retirer, voire simplement à amincir lorsque le retrait n’est pas possible. Une deuxième « restauration », datant peut-être du 20e siècle, a quant à elle consisté en une reprise complète des vêtements des personnages en partie basse, avec une modification des postures et des motifs, n’épargnant que les visages, seuls éléments conservés du 17e siècle.
La couche picturale doit donc bénéficier d'une restauration fondamentale, conciliant la présentation mixte de l'œuvre, dans son état d'origine pour la moitié haute (état n°2, correspondant à la peinture originale réalisée en 1647, globalement bien conservée avec des repeints disgracieux mais localisés et pouvant être retirés), dans son état historique postérieur pour la partie basse (état n°3, correspondant à la dernière restauration avec retrait des mastics indurés, tout en conservant les modifications apportées dans le dessin, mais sans dégagement de l’état d’origine beaucoup trop lacunaire et fragile).
Comme dans beaucoup d’interventions patrimoniales, la restauration du tableau de Nîmes est donc un compromis entre la mise en valeur esthétique de la peinture initiale et la conservation de son histoire mouvementée.
Le comité scientifique
Le rôle du comité scientifique, réuni tous les 6 mois et composé de personnalités et universitaires spécialistes dans l’histoire de la peinture du 17e siècle, conservateurs responsables de l’œuvre, ingénieurs du CICRP de Marseille, et de l’ensemble des conservateurs-restaurateurs en charge des travaux, consiste à valider les différentes étapes cruciales du chantier et garantir que les choix initiaux seront poursuivis ou adaptés tout au long de cette opération longue et complexe.
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