La Scène Watteau, scène conventionnée de Nogent-sur-Marne, présente "Phèdre" de Jean Racine, mise en scène signée Sterenn Guirriec. Puisant dans la mythologie grecque, "Phèdre" est l’exemple parfait de la tragédie classique. Des âmes déchirées et des corps fiévreux sont sublimés par des alexandrins d’une soyeuse beauté. Du 25 janvier au 4 février.
Jean Racine est au sommet de sa gloire lorsque "Phèdre" est représentée pour la première fois en 1677 à l’Hôtel de Bourgogne, sous le titre "Phèdre et Hippolyte". Racine s’inspire d’Euripide, mais centre sa tragédie sur le personnage de Phèdre, offrant une puissante peinture de l’âme féminine. Associant le fatum des tragédies antiques à la prédestination janséniste, il fait de son héroïne une victime de sa passion. La pièce fait l’objet d’une véritable cabale lors de sa création car le propos est jugé révoltant et peu respectueux des convenances du théâtre de l’époque. Aujourd’hui, "Phèdre" est considérée comme l’un des chefs-d'œuvre absolus de la littérature française, tant la construction est parfaite, le vers noble et l’harmonie de la langue d’une suprême beauté.
Note d’intentionIl était une mythologique fois qui contenait toutes les fois du monde. J’ai voulu mettre en scène "Phèdre" de Racine, en célébrant les secrets tapis à l’ombre de l’intrigue, ces secrets qui piaffent en l’interdiction d’aimer et de le dire : c’est le bannissement d’un fils par son père, c’est la solitude qui condamne, lorsque "ne pas être aimé" se traduit par "ne pas être", c’est la pulsion de vie lorsqu’elle déchire jusqu’au mourir et c’est enfin cette part de notre humanité qui trouve son écho dans les silences où vacarme la mythologie. Dans cet affolement de l’âme et du cœur, le déploiement du mot vivre vient secouer la parole. C’est alors à l’acteur d’offrir du "jeu" aux mots. Les faire mentir, sourire, se contredire, par un silence, un regard, une hésitation. Offrir toutes ses chances à la vie, à l’espoir, à un épilogue non encore imaginé. Les personnages ne savent pas, eux, que leur dire est écrit. Et que par l’écriture s’encre la tragédie. |
J’ai choisi pour décor ce qui ressemblerait à un monde construit depuis une projection de notre inconscient, un monde qui se plie, se déplie, en un rêve où s’impriment les ricochets possibles d’un réel. Le palais de Trézène, comme une métaphore de nos envies, s’inscrit sur une trace, sur des vestiges, ceux d’un royaume abandonné par son roi, ceux d’un royaume pillé d’avoir appartenu à d’autres. L’incendie d’une menace ravage la bucolique image d’un jardin fantastique ; un arbre s’érigeant vers le ciel, mais calciné. Des rochers volcaniques, mais à bien les regarder, des amoncellements d’objets (chaussures, valises, livres,…) ravagés eux aussi par les flammes, qui se figent en symbole de l’exode. Et au sein de la cendre de ce cauchemar, la vie qui persiste, toujours. Une baignoire, un trône, un lit… des signes du quotidien presque dérisoires, où la vie se réfugie, comme une trêve lancée à l’inéluctable. Les lumières cisèlent l’espace, jusqu’à parfois le réinventer, accompagnent les arrivées et sorties de la petite fille du Soleil, Phèdre, comme le font les levers ou couchers du soleil. La chronologie peut sembler s’inverser, ou la distribution se confondre, lorsque qu’un effet retrouvé après l’ellipse d’un noir fait basculer la scène. Les lumières accompagnent et signent la métaphore d’un lieu qui n’a pas lieu. Du cuir, des sangles, de larges ceintures, des costumes aux lignes fortes. Plus une réponse à la menace qui rôde qu’à une époque qui circonscrit. Du noir, de l’ocre sombre jusqu’au doré. Un jeu de transparence avec différentes matières. La création musicale originale est composée par Nicolas Larmignat. Des voix enregistrées, transformées, inversées, afin que les désirs, les peurs, les fureurs se fassent entendre. Des rythmes, des répétitions, des distorsions… comme le battement d’un cœur sous la tragédie. La musique viendra aussi s’inscrire dans le silence comme une réponse des Dieux que l’on invoque : Neptune, Vénus… Il aura été cette fois. Cette histoire qui est la nôtre. Celle de nos secrets qui rugissent dans nos silences. Celle d’une fureur d’aimer qui, dans la nuit du soleil, s’amplifie. Sterenn Guirriec |
Sterenn Guirriec, actrice et metteur en scène, a suivi sa formation dans la classe libre du Cours Florent puis au Conservatoire National Supérieur d’Art dramatique. Elle a déjà joué sous la direction de Daniel Mesguich, Nicolas Liautard, Sandrine Anglade… Sa première mise en scène, très remarquée, du "Partage de midi" de Paul Claudel dans laquelle elle interprétait également le rôle d’Yzé, est présentée au Conservatoire National Supérieur d’Art dramatique puis jouée à La Scène Watteau en septembre 2014. " Phèdre" sera son second spectacle, qui sera répété et créé à La Scène Watteau dans le cadre d’une résidence de création.
Texte Jean Racine / mise en scène Sterenn Guirriec / assistante à la mise en scène Hélène Ollivier / scénographie Camille Ansquer / lumières Bruno Rudtmann / musique Nicolas Larmignat / costumes Dominique Louis / maquillage et coiffure Eva Bouillaut / conception des décors élèves de l’Ecole Prép’art / régie son Thomas Lucet / avec Johann Cuny, Nanou Garcia, Sterenn Guirriec, Joëlle Lüthi, Philippe Maymat, Hélène Ollivier, Marie Sambourg.
La Scène Watteau est une scène conventionnée subventionnée par la Ville de Nogent-sur-Marne, la DRAC Ile-de-France, le Conseil départemental du Val-de-Marne et la Région Ile-de-France.
Informations pratiques
La Scène Watteau, Place du Théâtre, Nogent-sur-Marne. Représentations à 20h30, relâche le dimanche 31 janvier.
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