Un site privilégié, accessibilité, organisation du bâti
- Un site privilégié
Le site du programme bénéficie d’une situation géographique privilégiée dans le paysage urbain aixois.
C’est un terrain de 8 hectares, situé dans le quartier Saint-Eutrope, au nord de la ville, au pied de la colline d’Entremont. Il correspond à une butte en forme de losange irrégulier dans sa partie nord-ouest. Il est orienté nord-ouest, sud-est dans le sens de la longueur.
Son plateau culmine à 266 mètres et offre une vue quasi-aérienne sur la ville au sud, et un panorama exceptionnel qui se perd au loin sur les chaînes de Sainte-Victoire, de l’Etoile et sur le Montaiguet.
Le tiers nord et nord-est laisse apparaître des pentes assez faibles. Dans son premier tiers, au sud-est, deux versants le limitent ; l’un, au sud, en pente régulière avec une déclivité de 7 mètres, l’autre, à l’ouest, accuse une forte déclivité de 20 mètres adoucie par des terrasses.
- Accessibilité, desserte
La Cité Beisson se situe dans la proximité immédiate de deux axes de circulation majeurs constitués par l’ancienne route des Alpes, qui alimente au nord, l’un des accès principaux de la ville, et le boulevard périphérique, qui dessert les accès du centre-ville et vers lequel converge le réseau des principaux axes de circulation de toute l’agglomération.
Ainsi trois accès sont possibles :
- soit par le nord, depuis l’ancienne route des Alpes d’où l’on rejoint, à son point de jonction avec l’avenue Jules Isaac, l’allée des Peupliers qui débouche sur l’avenue Poincaré,
- soit par le sud-est, depuis le boulevard périphérique, place Bellegarde, en empruntant l’avenue Jules Isaac puis l’allée des Peupliers pour rejoindre l’avenue Poincaré,
- soit par le sud-ouest, depuis le boulevard périphérique, en remontant l’avenue Pasteur puis l’avenue Paul Cézanne sur laquelle se greffe l’avenue Poincaré.
Cette desserte est idéale puisque les deux itinéraires, sud-est/sud-ouest, se rejoignent en formant une boucle.
La parcelle est délimitée par :
- au nord et à l’est, l’avenue Raymond Poincaré.
- à l’ouest, l’avenue Paul Cézanne et la rue Vincent Auriol.
- au sud, la rue Vincent Auriol.
Les immeubles sont desservis par deux voies de pénétrations :
- La rue Vincent Auriol greffée à ses extrémités nord et sud sur l’avenue Raymond Poincaré irrigue le programme dans sa partie ouest.
- La rue René Coty greffée au nord-est sur l’avenue Raymond Poincaré irrigue le programme dans sa partie est.
Le programme comprend 15 immeubles-barres nommés chacun par une lettre de A à O (pas de I), et un centre commercial aménagé au rez-de-chaussée du bâtiment E.
Les HLM départementales sont rassemblées dans les bâtiments A – B – C – D – E – F – G, l’Office municipal administre les bâtiments H – J – K – L – M – M’ – N – 0.
L’organisation du bâti tient compte de quatre facteurs : la forme particulière du terrain, le relief topographique accidenté, les vues essentielles à préserver et une enclave constituant une servitude extrêmement contraignante (zone hachurée en rouge, plan), imposée par le vendeur qui conserve, au nord du terrain, dans la partie la plus large et en position centrale, un hectare de jardin autour de sa bastide.
Face à ces contraintes, l’architecte a su tirer profit au mieux du potentiel constructif du terrain et du panorama environnant.
L’ensemble des bâtiments affiche un facteur d’homogénéité par le respect d’une échelle de construction raisonnable et quasi identique sur tout le programme : les bâtiments positionnés en bordure de parcelle ne dépassent pas quatre étages (deux ou trois pour ceux situés à l’intérieur du terrain dans sa pointe sud) ; une homogénéité qui s’harmonise avec l’échelle urbaine, classique, de la ville.
Les immeubles-barres sont fractionnés en petites unités articulées les unes aux autres. Leurs articulations épousent la forme irrégulière de la parcelle.
La déclivité a permis une logique d’aménagement étagée afin d’offrir des vues dégagées au maximum d’appartements pour profiter au mieux du paysage environnant.
L’implantation des bâtiments privilégie une orientation est-ouest pour leur offrir le meilleur ensoleillement.
La circulation automobile et les aires de stationnement sont rejetées à l’extérieur du programme pour privilégier à l’intérieur l’aménagement d’espaces collectifs piétons très différenciés.
Quatre parkings sont prévus à l’est, face au bâtiment A, au nord, à l’arrière du bâtiment O, à l’ouest, face aux bâtiments L, et à l’ouest face au bâtiment G. Leur superficie est de 2 900 m² pour environ 200 places de stationnements.
Rappelons que les normes prévues à l’époque en matière de stationnement dans les programmes du Secteur Industrialisé sont une voiture pour quatre logements !
Une partie du terrain est réservée pour la construction d’une école.
L’architecte Olmeta propose dans ce programme une composition de volumes modernes qui imprime dans le tissu urbain du quartier une dynamique nouvelle et innovante qui s’exprime par l’introduction d’une nouvelle typologie dans le vocabulaire architectural du quartier, celle de l’immeuble-barre, qu’il décline ici sous deux formes pourtant diamétralement opposées : la courbe et la ligne. A la fluidité de l’une s’oppose la segmentation de l’autre.
Tout en s’inscrivant dans les grands principes urbains et architecturaux prônés par le Mouvement Moderne[1], Olmeta fait le choix d’une composition fermée qui peut apparaître comme anachronique par rapport au fonctionnalisme de l’ordre ouvert prôné par la Charte d’Athènes en matière de disposition urbaine.
Mais ce plan manifeste surtout la volonté de créer non pas un grand ensemble constitué de bâtiments isolés et répétitifs, implantés au milieu d’une vaste étendue verte dépourvue de limites, de clôtures, de seuil, mais au contraire, de créer ici une nouvelle localité limitée, ceinte, dont la physionomie est plus celle d’un ensemble résidentiel, raisonnable et autonome, conçu en rapport avec l’échelle et les espaces de la ville traditionnelle ; des principes de dispositions urbaines qui renvoient à l’image du village ou de la citadelle.
Les travaux de voiries importants réalisés à l’époque pour faciliter l’accès et la desserte de cette cité mettent en évidence la volonté municipale d’inscrire ce programme non pas comme une enclave urbaine isolée et livrée à elle-même, mais comme l’élément générateur d’une nouvelle urbanité.
Le quartier conserve sa vocation résidentielle mais intègre dorénavant les contrastes issus de la juxtaposition de différentes formes de sociabilités, allant de la petite propriété individuelle jusqu’au logement social en grand collectif.
Son écriture moderne, monumentale, fortement présente dans le panorama urbain du quartier, bouleverse d’un seul coup des siècles d’habitude. Elle est en rupture tant au niveau de la forme que de l’échelle avec le tissu urbain environnant de l’époque qui affiche encore un caractère profondément rural.
Elle devient le signal urbain fort d’une nouvelle modernité qui s’appréhende grâce a un parti pris audacieux que l’architecte impose par son choix de positionner un front bâti en continu sur 350 mètres, qui jalonne la ligne d’horizon Est du plateau, face à la montagne Sainte-Victoire, et inscrit avec virtuosité et insolence, la Cité Beisson dans son cadre urbain.
La forme infléchie de l’immeuble, probablement suggérée par la courbure naturelle du terrain, permet d’asseoir depuis l’extérieur l’identité innovante du programme. Sa vaste trame "coliséenne" exprime visuellement la densité statistique des besoins en logements qui apparaissent brutalement à cette époque. Depuis l’intérieur, elle est un véritable mur de scène, la cavea d’un théâtre antique, face auquel se déploie le spectacle quotidien de la vie dans cette cité.
La fameuse "banane" de la Cité Beisson est devenue un paysage-clé qui illustre l’introduction d’une nouvelle esthétique, d’une nouvelle attitude urbaine et d’une nouvelle modernité dans la vie de ce quartier.
La situation géographique privilégiée de la cité et sa liaison avec la ville lui permettent de s’inscrire dans la continuité et non pas en rupture avec la ville traditionnelle.
En composant avec la configuration naturelle du terrain, Olmeta donne à son programme une forme singulière et de ce fait clairement identifiable.
_______________________
[1] A l’origine de la conception de la forme architecturale et urbaine des grands ensembles se trouvent les théories du Mouvement Moderne – rationalité, fonctionnalisme, hygiénisme – un mouvement né dans les années 1920-1930 dont la doctrine architecturale et urbaine, formulée en 1933 dans la Charte d’Athènes, est diffusée par le biais des CIAM (Congrès International des Architectes Modernes). Les théories du Mouvement Moderne sont influencées par d’autres mouvements comme le Cubisme, le Bauhaus, De Stijl ou encore le Futurisme italien. Les figures emblématiques de ce mouvement sont Le Corbusier pour la France, Mies Van der Rohe et Walter Gropius pour l’Allemagne.
Partager la page