Parler du travail ou de l’oeuvre de Lucas Morin, c’est choisir deux termes restrictifs. Sa pratique artistique va au-delà et en deça d’une conception encore contemporaine, laborieuse et objectivée de l’art. Lucas se situe entre les arts plastiques et la musique, pas dans un entre deux, mais dans une génération atypique où le son, l’image ou le livre d’artiste sont mêlés, puisant son inspiration dans la culture dite populaire, des comics, associés ou pas à la Marvel, de la science-fiction anglaise et américaine aux références pointues et conceptuellement délicieusement inédites, à la culture internet, dont l’image sert de support à des micro-éditions enthousiastes, généreuses, qui puisent leur esthétique dans leur aspect rudimentaire même. Ces quelques mots seraient insuffisants encore si je ne précisais que côtoyer sa pratique artistique procure ce que l’art contemporain oublie trop souvent. La joie.

 (Lucas Morin & Catherine Schwartz), dynamic duo et microéditeur, publie (à crédit) brochures, artzines photocopiés à domicile, affiches, stickers, éditions sonores et fait jouer en concert (à perte) ses groupes préférés. Parfois, le duo devient Toner sous les tropiques, dj-selecta de baile funk, moombahton et tropical-bass.

La technique du figuralisme permet de transmettre une idée, ou une émotion à l’aide de procédés purement musicaux. Ainsi, l’évolution de la mélodie principale dans des tonalités plus aiguës au fil d’un morceau est généralement associée aux sentiments tels que la joie ou l’amour. Thank you for the sunshine bouquet est une pièce musicale utilisant le premier couplet du célèbre morceau Sunny de Bobby Hebb. Ce couplet est transposé dans le grave aux limites de l’audible et monte ensuite de ton en ton jusqu’à retrouver sa tonalité d’origine. Il se transpose encore d’un ton et disparaît progressivement.

L’imageboard 4chan est caractérisé par une quasi absence de modération. Tous les sujets sont susceptibles d’y être traités sous couvert d’anonymat. What about Bright Stars ? dresse le constat de l’incapacité de la “communauté 4chan” à réagir à une image du manuscrit du poème Bright Star de John Keats.

Celestial superpose une illustration du Livre de Mormon représentant le Livre d’Or dans les mains du prophète Moroni, la représentation par Jack Kirby de l’un des dieux composant le panthéon gigantesque qu’il a créé pour l’éditeur Marvel Comics et des dessins réalisés sous mes yeux par un missionnaire mormon lors d’un entretien auquel je l’avais convié.

Dans le cycle littéraire Les Cantos d’Hypérion, l’écrivain Dan Simmons multiplie les références au poète John Keats. L’univers du romancier comporte un fleuve reliant différents mondes grâce à des portails interdimensionnels. Les couvertures d’un recueil de poèmes de John Keats et du roman Endymion de Dan Simmons sont juxtaposées de façon à ce que leurs illustrations, représentant toutes deux un fleuve, concordent et se mêlent.

Les Brigades Anti-Criminalité arborent un insigne distinctif, le plus souvent animalier (cobras, aigles, mygales, scorpions, fauves...). Cette iconographie agressive est comparable aux codes utilisés par certains gangs et certaines communautés marginales. Les animaux de ces insignes sont détourés en des formes simplifiées et disposés sur un ovale jaune. L’animation des 85 insignes crée un signal d’alarme clignotant.

Si les personnages de comics, lorsqu’ils mangent ou boivent s’incarnent davantage aux yeux du lecteur, on peut s’interroger sur ce qui peut bien nourrir des héros aux capacités physiques extraordinaires tels que Conan le Barbare ou encore Wolverine. Take Away Heroes est un blog en cours compilant des personnages extraits de comic books mangeant, buvant, cuisinant ou faisant la vaisselle.

Dans la musique du Moyen-Age, un intervalle de trois tons (triton), ressenti par l’auditeur comme une tension ou une dissonance (et évité dans toute composition), était nommé diabolus in musica. Pour Diabolus inc., la pièce In C de Terry Riley est dupliquée puis sa copie augmentée de trois tons. L’aspect consonant de la pièce d’origine disparaît pour laisser place à une version démoniaque.