Pour mener à bien ce projet exceptionnel, défendu par la Directrice du musée Pantxika Béguérie de Paepe, une aide de l’État de 250 000€ a été octroyée sur les 720 000€ que compte l’opération (soit 35%), pour une œuvre qui appartient à l'État mais a été déposée à la Ville de Colmar aux lendemains de la Révolution.
Le mécénat d’entreprises et de particuliers a également été fortement mobilisé - cet engagement citoyen, particulièrement stimulé en France depuis la loi Aillagon de 2003 qui permet des déductions fiscales substantielles (60 % pour les entreprises, 66 % pour les particuliers), oblitérant ainsi les recettes de l’État au profit de projets culturels structurants.
Deux groupements de restaurateurs et de photographes mobilisés tout au long de la restauration
Deux groupements de restaurateurs et de photographes, ont mené avec dextérité les interventions sous la houlette d’Anthony Pontabry pour les panneaux peints, et sous la direction de Juliette Lévy pour les sculptures.
Cette opération extraordinaire a révélé des teintes chromatiques vives et extrêmement subtiles, qui peuvent décontenancer le regard habitué aux anciens vernis jaunissants. La cohérence visuelle a également été redonnée par les dégagements des repeints du XVIIIe siècle sur les sculptures et révèle un ensemble d’une immense qualité artistique.
Le Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF)
Les équipes des départements de la recherche et de la restauration du C2RMF, Service à compétence nationale, ont fortement été mobilisées pour accueillir les œuvres, mener gratuitement les campagnes d’imagerie et de recherches scientifiques pointues nécessaires au diagnostic de ce bien, et ainsi orienter les comités et les restaurateurs dans leurs choix déontologiques et techniques.
Présentation du retable d’Issenheim
Cette œuvre, caractéristique de l’art du Rhin Supérieur, a été commandée pour la commanderie des Antonins d’Issenheim, célèbre pour guérir du feu de Saint-Antoine ou mal des ardents (ergotisme).
Les volets peints de ce polyptyque sont attribués à Mathis Gothard Nithard, plus connu sous le nom de Grünewald (1475-vers 1528) ; la partie sculptée serait quant à elle de Nicolas de Haguenau et son atelier. L’ensemble a été exécuté entre 1512 et 1516.
Destiné à orner le maître-autel de l’église, le retable se voit doté d’un programme iconographique qui illustre la vie de Jésus et celle de saint Antoine l'ermite (vers 251-356), patron de l'ordre hospitalier des Antonins.
Fermé, ce polyptique représente la Crucifixion et, dans la prédelle, la Mise au Tombeau.
Il pouvait ensuite se développer en « trois ouvertures » en fonction de la liturgie et des fêtes correspondantes : les volets peints s’ouvraient les uns après les autres – l’espoir de la guérison étant par exemple transmis par la scène de la Résurrection – sur une caisse centrale sculptée et polychromée.
Dans cette dernière, les figures monumentales de saint Augustin, saint Antoine et saint Jérôme, dominent la prédelle où le Christ est entouré des apôtres, tous en bustes.
La caisse originale ainsi que le couronnement sculpté ont disparu après la Révolution française.
En déclin, l’ordre des Antonins a été rattaché en décembre 1776 à l’ordre de Malte, avec pour conséquence le transfert des religieux et de ses propriétés.
A la Révolution, le 2 novembre 1789, les biens du clergé séculier sont « mis à la disposition de la Nation » et la Convention déclare biens nationaux les possessions des établissements religieux hospitaliers. Le retable est donc saisi par l’État, démonté et transféré à Colmar, où il est présenté en pièces détachées dans le nouveau « Musée national » installé dans la bibliothèque de l’ancien collège des Jésuites.
En 1852, les volets peints et les sculptures sont installés dans l’église de l’ancien couvent des Dominicaines d’Unterlinden mis à disposition de la Société Schongauer, par la Ville de Colmar, dans la perspective de l’ouverture, en 1853, du musée.
Montant de l’opération
Maitrise d’ouvrage : Société Schongauer
Coût global de l’opération depuis 2015 comprenant l’étude préalable, la structure d’évacuation en cas de sinistre, la restauration : 1,4 M€ TTC
Coût de la restauration : 720 350€ TTC dont 250 000€ de subventions de la DRAC Grand Est
Mécénat : 1,1 M€ de mécénat, à 80 % par le mécénat d’entreprises et des donateurs particuliers et à 20 % par la Société Schongauer.
La réouverture des salles du cloître
Les salles dédiées à la création artistique de la fin du XIVe siècle et du début du XVe siècle seront également inaugurées le 1er juillet 2022. Elles témoignent des aspects de la production artistique de cette période, et de l’identification de personnalités comme des styles propres des centres de création tels que Strasbourg ou Colmar.
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