D’abord constituée par un tarif postal privilégié dont l’impact économique n’est pas évalué par une administration postale pleinement intégrée à l’Etat, l’aide postale se formalise et se complexifie à mesure que l’opérateur postal se détache de la puissance publique.
1. Un tarif privilégié
L’aide postale est la plus ancienne des aides à la presse. Après qu’en 1796, le Directoire eut imposé une taxe sur les envois postaux, la loi du 4 thermidor an IV vint en effet reconnaître à la presse un tarif postal privilégié.
Supprimé sous le Consulat, ce régime fut rétabli par la loi de finances du 16 avril 1930 au profit des journaux, écrits et périodiques publiés dans un but d’intérêt général pour l’instruction, l’éducation et l’information du public, à condition qu’ils respectent les dispositions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et aient été enregistrés préalablement à la direction des Postes.
Le principe en est aujourd’hui posé à l’article 2 de la loi du 2 juillet 1990 qui dispose que La Poste assure le service public du transport et de la distribution de la presse bénéficiant du régime spécifique prévu par le code des postes et télécommunications.
La contribution de l’État au service public du transport postal de la presse constitue aujourd’hui le principal soutien que les pouvoirs publics apportent à la presse. Conformément à l’article 38 du cahier des charges de La Poste, l’État participe à la prise en charge du coût du service obligatoire du transport et de l’acheminement de la presse en allouant à La Poste « une juste compensation financière » à raison des sujétions particulières qui lui sont imposées du fait du régime de distribution de la presse.
2. Des accords tripartites depuis 1980
Il est de tradition, depuis plus de vingt-cinq ans, que les questions liées à la tarification du transport postal de la presse soient négociées dans le cadre de relations tripartites.
a) Les accords Laurent
En février 1980, une commission tripartite composée de parlementaires, de représentants des administrations concernées et de représentants de la presse et présidée par M. Pierre Laurent, conseiller d’Etat, avait fixé le taux de couverture par la presse des charges du transport postal des journaux. Selon les estimations de La Poste, entre 1986 et 1990, le budget annexe des postes et télécommunications supportait entre 65 % et 75 % du coût global du transport de la presse. La Poste étant devenue exploitant autonome le 1er janvier 1991, un protocole d’accord signé le 25 mars 1992 entre l’opérateur, la Fédération nationale de la presse française et le ministère des Postes et Télécommunications, a prévu que la presse acquitterait 33 % du coût du transport postal de ses publications, le solde étant partagé entre l’Etat (37 %) et La Poste (30 %). Sous l’empire de ce protocole, l’Etat a donc versé à La Poste une subvention, fixée à 145 M€ (950 MF) en 1991, portée à 294 M€ (1 930 MF) en 1992 et stabilisée ensuite à 289 M€. Cette subvention était inscrite au budget du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie.
b) Les accords Galmot
Succédant aux accords Laurent de 1980, les accords Galmot datés du 4 juillet 1996 et du 10 janvier 1997 ont dégagé plusieurs points d’accord. La Poste s’engageait à réaliser des efforts de productivité, à améliorer la qualité de ses prestations, notamment ses délais de distribution et à présenter des comptes analytiques clairs permettant de déterminer la réalité exacte de la charge représentée par la diffusion de la presse. Elle obtenait en échange, la promesse d’une revalorisation tarifaire de 50 % sur cinq ans, ce qui devait permettre de réduire le déficit de cette activité et de stabiliser la contribution de l’Etat.
A cette occasion, une différenciation tarifaire a été introduite entre la presse et la presse d’information politique et générale et un abattement supplémentaire a été introduit au profit des titres à faibles ressources publicitaires.
Si la teneur des accords a été respectée par l’Etat comme par les éditeurs de presse, le déficit de l’activité du transport de presse n’a pas été réduit.
Entre 1996 et 2001, l’augmentation de la contribution des éditeurs de presse a été de 46,8%. L’Etat a rempli ses engagements en stabilisant sa contribution en euros courants sur la période de référence (290 M€ par an). Les progrès de productivité de La Poste ont été supérieurs à la norme de 1,5 % par an prévue par les accords Galmot : elle a progressé d’environ 2,1 % par an. La contribution nette de La Poste, c’est-à-dire la part de ses coûts totaux restant à sa charge, après l’encaissement des recettes venant des éditeurs et de l’Etat, après avoir diminué sensiblement entre 1996 et 1999, a repris sa croissance en 2000 et 2001, essentiellement du fait de la mise en œuvre de l’aménagement et de la réduction du temps de travail. La reprise de la réduction des charges de La Poste s’est effectuée dès 2002 et s’est poursuivie en 2003.
Le dispositif Galmot a été dans l’ensemble correctement appliqué par chacun des trois partenaires à l’accord, mais l’objectif de réduction des coûts restant à la charge de La Poste, n’a pas été atteint. Le transport de presse est demeuré une activité très fortement déficitaire.
c) Les principales évolutions inscrites dans les accords Paul
Les négociations entre les entreprises de presse, La Poste et l’État, conduites en 2003-2004 sous l’égide de M. Henri Paul, conseiller maître à la Cour des Comptes, ont abouti à un protocole d’accord signé le 22 juillet 2004, par les représentants des éditeurs et le président de La Poste, en présence du ministre de la culture et de la communication et du ministre délégué à l’industrie.
L’accord destiné à définir un nouveau cadre de relations entre l’État, la presse et La Poste détermine les conditions de prise en charge, d’acheminement, de traitement et de distribution de la presse par La Poste pour quatre années (2005 à 2008). Il prévoit une revalorisation progressive et maîtrisée des tarifs préférentiels accordés à la presse, nécessaire pour permettre à La Poste de consolider sa situation financière dans un contexte marqué par l’évolution de son environnement réglementaire, économique et concurrentiel.
Cet accord fixe à chacune des parties des objectifs clairement définis. Il s’agit pour La Poste, dans une phase de forte mutation industrielle et commerciale, d’améliorer son offre de services tout en réalisant un effort important de productivité. Soucieuse de bénéficier d’un service adapté à ses besoins pour développer sa diffusion par une politique d’abonnements à un coût raisonnable, la presse souhaite pour sa part entrer dans une logique de relation contractuelle avec La Poste. L’Etat, enfin, continue à assurer le pluralisme de l’information et veiller sur tout le territoire à l’égalité des titres et des lecteurs en matière de distribution postale.
La Poste propose aux éditeurs une offre mixte, avec un cadre de base et des options, tandis que ces derniers, directement concernés par la préparation des envois de presse se sont engagés sur la conformité de l’adressage, du routage, de la documentation et du dépôt de leurs expéditions. L’accord du 22 juillet 2004 s’est ainsi traduit par le passage à la contractualisation avec les éditeurs sous l’égide de l’Etat.
Sur le plan budgétaire, l’ancien système, dans lequel une subvention unique de 290 M€ était versée annuellement à l’opérateur postal, a fait place à deux aides distinctes, d’un montant total de 242 M€ par an, pour la durée de l’accord, correspondant à deux objectifs clairement identifiés :
- une aide au pluralisme pour la diffusion de la presse d’information politique et générale. Gérée par la DDM, cette aide constitue une aide aux éditeurs qui transite par La Poste et se traduit par une minoration de la facture des éditeurs pour le transport des titres de la presse d’information politique et générale bénéficiant des mesures de « ciblage »
- une aide à la distribution en zones peu denses, gérée par la direction générale des entreprises compensant une partie des surcoûts liés à l’acheminement dans les zones considérées et permettant ainsi le maintien d’un tarif égal sur tout le territoire, est versée à l’opérateur postal.
Une convention a été conclue en février 2005 entre l’État et La Poste pour établir les modalités concrètes de gestion de l’aide publique.
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