PCI et musées
En 2006, la France a approuvé la Convention de l’Unesco de 2003 pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel (loi n° 2006-791 du 5 juillet 2006). Elle vise les pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire que les communautés reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. 178 États dans le monde l’ont ratifiée aujourd’hui. En 2016, la loi relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 dite loi LCAP) a intégré le patrimoine culturel immatériel dans la définition officielle du patrimoine :
« Le patrimoine s'entend, au sens du présent code, de l'ensemble des biens, immobiliers ou mobiliers, relevant de la propriété publique ou privée, qui présentent un intérêt historique, artistique, archéologique, esthétique, scientifique ou technique. Il s'entend également des éléments du patrimoine culturel immatériel, au sens de l'article 2 de la convention internationale pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, adoptée à Paris le 17 octobre 2003. » (art. 55).
Dès la promulgation de la convention de l’Unesco, le Conseil international des musées (ICOM), sous l’influence des comités asiatiques notamment, a tenu sa conférence générale internationale sur ce thème (Séoul, octobre 2004). En France, les associations professionnelles, la Fédération des écomusées et musées de société (FEMS) et l’Association des conservateurs de collections publiques (AGCPP) se sont emparées du débat autour d’un concept fécond au sein de la communauté muséale.
Deux enjeux se sont dessinés : le premier, muséologique et muséographique, découle du statut des collections d’objets ethnologiques, de leur exposition et de leur rapport à la science ; le second tient aux rapports entre des projets d’identité territoriale, en nombre croissant depuis la loi n° 99-553 du 25 juin 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire, dite loi Voynet, dans le cadre de l’aménagement du territoire national et des multiples tentatives de redécoupage décentralisateur, et l’affirmation continue d’un patrimoine inscrit dans un espace, dont il tire sa légitimité et qu’il légitime à son tour (Poulot, 2009). Le PCI dans les musées concerne « non seulement le statut des collections, mais également leur rôle dans la cité, dans la transmission des savoirs et dans la recherche » (Calas, 2008 : 37). En ce sens, il est parfaitement pris en compte dans la « Recommandation concernant la protection et la promotion des musées et des collections, leur diversité et leur rôle dans la société », approuvée lors de la 38e session de la Conférence générale de l’Unesco, le 17 novembre 2015.
Au cœur des missions muséales, le champ a été pris en compte : la gestion des collections implique aussi de « veiller à la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel », selon la charte de déontologie des conservateurs du patrimoine et responsables scientifiques des musées de France (circulaire n° 2007/007 du 26 avril 2007, section II.G.). Dix ans plus tard, le projet Intangible Cultural Heritage & Museums Project (IMP) (2017-2019) du programme Europe Creative questionne les modalités d’intégration du PCI aux politiques générales des musées en Europe.
Enjeu de taille dans le développement des musées, si le PCI y est un outil fédérateur, apte à donner du sens aux collections, à placer les activités de l’homme au cœur des notions traitées, voire à stimuler la créativité scénographique, il est nettement placé du côté de la médiation auprès des publics (enquête 2018).
De la recherche scientifique à la constitution du patrimoine matériel ou immatériel, de la gestion à la restitution d’un savoir ou de collections, le PCI souligne « les mutations opérées depuis plusieurs décennies dans les musées d’art et traditions populaires, sous l’effet conjugué d’innovations muséographiques amorcées avant la seconde guerre mondiale, et de questionnements plus centrés sur la société contemporaine » (Séréna-Allier, 2013). Il propose des enjeux scientifiques et culturels pour le présent, auxquels ne peuvent manquer de se confronter les musées de société, dès lors qu’ils s’interrogent sur les orientations ou la pertinence d’une collecte contemporaine ou qu’ils s’attachent à répondre au désir de patrimoine traversant la société française.