
Marche et démarche. Une histoire de la chaussure au MAD

Après "La Mécanique des dessous" en 2013 et "Tenue correcte exigée" en 2017, expositions explorant le rapport entre le corps et la mode, le Musée des Arts Décoratifs propose un troisième volet autour de la chaussure, analysant de manière aussi surprenante qu'originale la marche et la démarche.
L'exposition revisite le statut et l'histoire de la chaussure, cet accessoire indispensable de notre quotidien. Avec près de 500 pièces: chaussures, peintures photographies, objets d'art, films et publicités issues de diverses collections publiques et privées, se déroule une lecture insolite et surprenante des différentes façons de marcher, du Moyen-Âge à nos jours, tant en Occident que dans les cultures non européennes.
Chaussure de Marie-Antoinette, 1792 - Paris, Musée des Arts Décoratifs © MAD Paris / photo : Christophe Dellière
Le thème de l'exposition est issu de l'étude d'un soulier porté par Marie-Antoinette en 1972, figurant dans les collections du musée. Il ne mesure en fait que 21 cm de long et pas plus de 5 cm de large. Comment a-t-il pu être chaussé par une femme âgée alors de 37 ans? Les textes de l'époque révèlent que les dames de l'aristocratie au XVIIIe siècle et celles de la haute bourgeoisie au XIXe siècle se déplaçaient peu à pied, que leur mobilité était contrôlée et l'univers urbain hostile. Du XVe au XIXe siècle, les sols irréguliers et boueux venaient contraindre la marche, imposant l'usage de souliers adaptés. Les femmes en ces temps portaient des souliers pour ne pas marcher! Délicates, fragiles ou volontairement inconfortables, elles servaient plus généralement à clamer une distinction sociale.
L'exposition "Marche et démarche. Une histoire de la chaussure" développe un parcours érudit explorant quelques millénaires d'humanité, partout dans le monde et révèle une incroyable diversité de formes. Elle fait de cet accessoire un enjeu essentiel de mode qui détermine le geste et le mouvement, l'allure et la silhouette, et renverse également certaines idées reçues. Ainsi, la forme des chaussures portées en Afrique, en Amérique ou en Asie sont adaptées à la vie rurale, au climat et à l'environnement. Le bout relevé de certaines sandales n'est pas conçu pour un principe d'originalité, mais pour éviter que le sable ne se glisse entre le pied et la semelle. Néanmoins, beaucoup de chaussures de ces pays sont décorées de broderies, de perles, de fourrure et révèlent en même temps l'origine ethnique ou sociale du porteur.
Les interventions formelles sur la chaussure engendrent une démarche particulière, et portent sur trois points principaux: le bout, l'épaisseur de la semelle et le talon, en particulier chez les femmes, sa hauteur provoquant un défi constant de l'équilibre. L'exposition évoque les accessoires portés en des occasions précises, pour par exemple marcher sur la plage, sur un tapis de danse ou un terrain de sport, agrémentés pour servir au mieux les fonctions qui leur sont attribuées. Le godillot, la botte du soldat, la ballerine de la danseuse et le soulier démesuré du clown sont des attributs si caractéristiques qu'ils ne peuvent qu'engendrer une marche et une démarche atypiques. Dans l'exposition, sont également présentées les chaussures de Charlie Chaplin, les talonnières d'Hermès, les bottes de sept lieues et les Horseshoes d'Iris Schieferstein, ainsi que les photographies des danseuses du Crazy Horse portant des souliers à talons démesurés lors d'une collaboration en 2007 entre Christian Louboutin et David Lynch.
De gauche à droite : Christian Louboutin et David Lynch, paire de ballerines pour femme, modèle Ballerina Ultima, Paris, 2007. Paris, Archives maison Christian Louboutin © MAD, Paris - Photo: Hughes Dubois / Iris Schieferstein, Horseshoes, 2006. Berlin, Iris Schieferstein © MAD, Paris - Photo: Hughes Dubois
Exposition du 7 novembre 2019 au 23 février 2020. Musée des Arts Décoratifs, 107 rue de Rivoli - 75001 Paris. Ouverture du mardi au dimanche de 11h à 18h, nocturne le jeudi jusqu'à 21h. Fermé le 25 décembre et le 1er janvier.