Le service du patrimoine (sous-direction des monuments historiques et des espaces protégés - SDMHEP) établit et diffuse un bilan qui illustre la diversité des actions conduites par les services du ministère de la Culture auprès des propriétaires en matière de prévention des vols et de lutte contre le trafic illicite des objets mobiliers classés ou inscrits au titre des monuments historiques.

Le bilan est constitué à partir des données fournies par les conservateurs des antiquités et objets d'art (CAOA), les directions régionales des affaires culturelles (conservation régionale des monuments historiques) et le chargé de mission sûreté de l’inspection des patrimoines. Ces données ont été échangées tout au long de l'année par la SDMHEP (bureau de la conservation du patrimoine mobilier et instrumental) avec celles recueillies par le service central de renseignement criminel de la gendarmerie nationale (SCRC à Pontoise) et l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC) direction centrale de la Police Judiciaire à Nanterre).

Documenter et diffuser l’information

Dans le cadre de la prévention des vols, les campagnes de récolement périodique (contrôle de la présence et de l’état de conservation) permettent d’identifier et de documenter des vols ou disparitions anciennes.

Outre leurs enregistrements dans les bases de données policières TREIMA II (thésaurus de recherche électronique et d'imagerie en matière artistique) de l’OCBC, créée en 1995, et PSYCHé, base internationale d’INTERPOL, accessible au public depuis 2009, les photographies des objets volés (avec dépôt de plainte) ou disparus sont diffusées au sein des bases de données patrimoniales du ministère de la Culture par la Plateforme ouverte du patrimoine POP, qui propose, sur la page de recherche simple, un filtre "Objets manquants ou volés", pour les bases Joconde (biens des musées de France) et Palissy (totalité des objets mobiliers classés ou inscrits au titre des monuments historique) depuis juillet 2019.

Chiffres clés

Durant la dernière décennie, la baisse du nombre de faits de vols est notable pour les églises. De plus de 600 faits de vols dans les années 2000, ce chiffre oscille désormais chaque année entre 80 et 150 faits de vols sur tout le territoire.

Peu d’entre eux concernent des objets mobiliers classés ou inscrits au titre des monuments historiques mais la plupart des biens pillés sont propriété publique des communes. Ces objets mobiliers relevant de la domanialité publique sont des trésors nationaux, inaliénables et imprescriptibles au sens de la législation française. Pour chaque commune, c’est une perte irrémédiable et un appauvrissement du patrimoine culturel de la Nation.

Les faits de vols d’objets protégés au titre des monuments historiques sont passés de 5 faits en 2018 à 11 faits en 2019.

  • 2018 : 5 faits correspondant au vol de 9 objets mobiliers (6 classés et 3 inscrits)
  • 2019 : 11 faits correspondant au vol de 36 objets mobiliers (8 classés et 28 inscrits)
 
Exemples de vols en 2019

Bretagne, Ille-et-Vilaine, Rennes, cathédrale Saint-Pierre
Orfèvrerie, burettes et leur plateau, argent doré, Pierre Henry-Favier, XIXe siècle, inscrits au titre des monuments historiques le 27 mars 1974.

Burette à eau volée le 20 octobre 2019.

 

Grand-Est, Meuse, Dun-sur-Meuse, église Notre-Dame de la Ville Haute
Sculpture, 4 anges, bois polychrome et doré, XVIIIe siècle, inscrits au titre des monuments historiques le 7 septembre 1984.
La disparition d’un des 4 anges a été constatée le 10 juillet 2019. Les 3 autres ont été vandalisés (ailes brisées)

Lieux des vols

Les vols signalés ont été commis en majorité dans les lieux de culte.

Typologie des objets volés

Du point de vue typologique, au cours de ces dernières années, les objets volés relèvent principalement de l’orfèvrerie (exemples de vols plus anciens : ciboire, ostensoir, calice et patène, encensoir) ou des objets liés aux procession, à l’éclairage ou au culte (bâton de procession, chandeliers d'autel, clochette à main).

Des restitutions

Source : Ministère de la Culture/DGP/SP/SDMHEP/BCPMI

 

Ces deux courbes permettent d’illustrer l’évolution chiffrée en matière de vols et des redécouvertes/restitutions au cours de ces dix dernières années.

En 2018, on y observe un phénomène révélateur…Là où, pendant des années, ces deux courbes étaient bien distinctes l’une de l’autre, leurs croisements démontrent que le nombre des redécouvertes/restitutions est supérieur au nombre d’objets volés.

Cela peut s’expliquer par l’amélioration de la documentation photographique du patrimoine culturel et par son insertion rapide dans les bases de données des objets mobiliers volés des services de police et de gendarmerie et dans les bases nationales du ministère de la Culture, étape essentielle, en plus du dépôt de plainte, pour de futures identifications et restitutions.

Les identifications et les restitutions d’objets volés sont en hausse constante, fruit d’un intense travail de documentation et de diffusion de l’information, en particulier par les bases de données culturelles ou policières.

Plusieurs objets volés dans les années 1960-1980, ou parfois plus anciennement, réapparaissent sur le marché de l’art en France ou à l’étranger (Belgique, Hollande, Allemagne…).

La veille constante exercée par les services de police, de gendarmerie, des douanes ou des professionnels du patrimoine, universitaires et conservateurs sur le territoire national comme à l’étranger permet aux propriétaires légitimes de retrouver leur patrimoine. Il peut s’écouler plusieurs années entre le moment de l’identification du bien et sa restitution du fait de la longueur de certaines enquêtes, du temps nécessaire à la négociation à l’amiable ou de la durée de certains contentieux.

 
Exemples récents de redécouvertes et restitutions

Nouvelle-Aquitaine, Gironde, Bordeaux, église Saint-Michel
Classés au titre des monuments historiques sur la liste de 1846, sept reliefs du XVe siècle avaient été remplacés par des moulages en plâtre.

La substitution réalisée avant le 7 septembre 1984, date de la première transaction, est découverte en décembre 1993 lors de l’instruction d’une proposition de dation des reliefs de L’Assomption et du Couronnement de la Vierge. En 1994, l’enquête internationale de l’OCBC localise les reliefs manquants aux États-Unis sans obtenir leur retour. Le Saint Jean-Baptiste est restitué en 2005 avec l’aide du Syndicat national des antiquaires (inauguration en mars 2006). En 2011, les reliefs sont remis en place aux côtés de La Résurrection et du plâtre ancien du Saint Joseph, non volés.
En 2016, l’enquête est reprise conjointement par la Ville et le ministère de la Culture avec l’aide de l’ambassade de France aux États-Unis. Les reliefs manquants (l’Annonciation, la Nativité, l’Adoration des Mages et l’Ascension), vendus aux États-Unis en 1988, avaient été revendus par des antiquaires anglais, sans connaissance de leur provenance, à un collectionneur anglais. Leur retour sur le territoire national est effectif le 19 février 2019. L’ensemble, après restauration et sécurisation, a fait l’objet d’une inauguration lors des Journées européennes du patrimoine le 21 septembre 2019.

Île-de-France, Essonne, Marcoussis, église Sainte-Marie-Madeleine
Tableau : Jésus chez Marthe et Marie, huile sur toile, XIXe siècle, Théodore Chassériau (1819-1856), classé au titre des monuments historiques le 19 décembre 1950.
Bien volé entre le 23 et 24 mai 1973.
Dépôt de plainte le 29 mai 2019.

En mai 2019, le tableau est identifié par un collectionneur sur un site internet de vente aux enchères en Allemagne. Le 24 mai 2019, la mairie prend contact avec la DGP. À la demande du BCPMI, l’OCBC, bureau central pour Interpol, saisit les autorités homologues à Wiesbaden pour faire retirer le tableau de la vente. Le 12 juin 2019, le tableau est saisi par la police allemande de Westhessen, puis conservé dans les bureaux d’Interpol à Wiesbaden en attendant sa restitution. Le maire et sa directrice générale des services assurent le transport du tableau et son retour sur le territoire national le 8 juillet 2019, qui est mis en réserve à Chamarande sous le contrôle du CAOA. Après constat d’état par la DRAC-CRMH et CAOA et dépoussiérage, il est présenté à la population de la commune de Marcoussis le jeudi 10 octobre 2019.