Patrimoine industriel, scientifique et technique (PIST)
ÉMERGENCE D’UNE NOUVELLE CATÉGORIE DE PATRIMOINE
Les sociétés occidentales ont été profondément marquées par les Révolutions industrielles des XVIIIe et XIXe siècles ; en résulte une société industrielle à l’idéologie technicienne et rationaliste. Cette puissance industrielle nouvelle s’impose comme un marqueur temporel, structurant les rapports sociaux, la géographie et l’architecture des villes.
Il faut attendre le milieu des années 1970 et les premiers chocs pétroliers qui provoquent la première vague de délocalisation de l’outil industriel, pour qu’une prise de conscience s’opère en France quant à la question de la protection du patrimoine industriel. L’évolution du regard mémoriel, les changements sociaux, économiques, techniques et paysagers ont progressivement modifié la notion même de patrimoine.
La cellule chargée du patrimoine industriel est créée en 1983, elle dépend de l’Inventaire général du patrimoine culturel. À l’origine, cette cellule centre ses études sur les sites et bâtiments abritant ou ayant abrité des activités industrielles liées à l’histoire des techniques. Font également partie de ce champ d’étude les infrastructures et les outils de production liées à ces industries. Il faut attendre 1993 pour que la cellule élargisse finalement son champ d’étude à la prise en compte du patrimoine scientifique et technique (observatoires astronomiques, patrimoine ferroviaire, médical, naval, etc). À partir de 1994, le recensement des machines complète celui du bâti. En 1995, la cellule du patrimoine industriel disparaît en tant que telle. L’approche du patrimoine scientifique, technique et industriel devient globale et inscrite dans une démarche d’étude de l’architecture et des objets. Les actions d’Inventaire en régions sont partagées entre les missions de connaissance d’urgence d’un patrimoine en péril et la nécessité d’une étude approfondie sur un domaine encore peu étudié.
DÉFINITION DU PATRIMOINE INDUSTRIEL
En juillet 2003, le Comité International pour la Conservation du Patrimoine Industriel (TICCIH) propose avec la charte Nizhny Tagil, une définition du patrimoine industriel. Cette première définition sera complétée en 2011, les Principes de Dublin détaillent ainsi que : « Le patrimoine industriel comprend les sites, les constructions, les complexes, les territoires et les paysages ainsi que les équipements, les objets ou les documents qui témoignent des procédés industriels anciens ou courants de production par l’extraction et la transformation des matières premières ainsi que des infrastructures énergétiques ou de transport qui y sont associées. Il exprime une relation étroite entre l’environnement culturel et naturel puisque les procédés industriels anciens ou modernes dépendent de ressources naturelles, d’énergie et de voies de communication pour produire et distribuer des biens sur les marchés. Ce patrimoine comporte des dimensions immatérielles comme les savoir-faire techniques, l’organisation du travail et des travailleurs ou un héritage complexe de pratiques sociales et culturelles résultant de l’influence de l’industrie sur la vie des communautés et sur la mutation des sociétés et du monde en général. »
PATRIMOINE NAVAL
La notion même de patrimoine naval apparaît pour la première fois en 1980 : année du patrimoine. Ce concept est précisé et développé en décembre 1981 à l’issue d’une rencontre entre le ministre de la Culture et le ministre de la Mer à bord du Belem, à Paris. À dater de 1982, la procédure de classement instituée par le ministère de la Culture est appliquée aux bateaux.
Au fil du temps, ce patrimoine s’est constitué selon des critères de protection qui tiennent compte à la fois de la représentativité d’un type de production, de sa rareté, de l’innovation technologique, de son empreinte historique ou bien encore de la notoriété de ses concepteurs.
À l’échelle nationale, c’est ainsi cent-quinze bateaux qui ont été protégés au titre des monuments historiques (cent-dix classés et cinq inscrits) en qualité d’objets mobiliers. Mobiles par essence, les bateaux voient leur classement et leur inscription régis par le titre II du livre VI du Code du patrimoine complété par un décret de 2007. Les deux tiers des bateaux protégés le sont au titre du patrimoine maritime, le dernier tiers concernant le patrimoine fluvial. Seul un faible pourcentage de ces embarcations (15%) est exposé à terre. Les bateaux sont présentés à flot ou en état de navigation autant que le permettent leur conservation et le respect des règles de sécurité. Les bateaux de plaisance et de pêche représentent à eux seuls près des deux tiers des bateaux protégés. Cette même proportion est observée en région des Pays de la Loire.
La région des Pays de la Loire abrite vingt-cinq bateaux classés et inscrits au titre des monuments historiques. Elle peut s’enorgueillir d’avoir sur son territoire le dernier trois-mâts barque à phares carrés : le Belem, le seul bâtiment de combat : le Maillé-Brézé ainsi que les seuls bateaux-lavoirs : le Saint-Julien et le Saint-Yves, classés au titre des monuments historiques. Par ailleurs le Vezon, construit en 1887, demeure l’un des plus anciens bateaux classés encore naviguant.
UN PATRIMOINE RICHE ET VARIE
La région des Pays de la Loire dispose d’un riche patrimoine naval, héritage de sa situation géographique et des liens historiques qu’elle a toujours entretenus avec la Loire et l’océan Atlantique. La région peut également mettre en avant un important patrimoine directement lié aux transports, qu’ils soient aériens, routiers, ferroviaires ou maritimes. Ce patrimoine conserve la trace et le souvenir d’anciennes pratiques et techniques.
La France connaît un important développement industriel à partir du Second Empire. Les réseaux de chemins de fer se développent à travers le pays et permettent de désenclaver des communes rurales où peut alors se développer une petite industrie. La densification des réseaux de transports s’est faite autour de villes et de pôles industriels. Le rail, en reliant ces différentes villes, s’impose comme un sérieux concurrent du transport fluvial. La richesse du patrimoine ferroviaire conservé, s’explique en Sarthe notamment, par la situation géographique. Le département s’impose, de fait, comme véritable nœud ferroviaire reliant Paris à l’ouest de la France. Le patrimoine ferroviaire des Pays de la Loire relate l’évolution technique des locomotives, lesquelles passent de la propulsion vapeur à la propulsion électrique.
Cette relation intime qu’entretient la région avec ses moyens de transport s’observe également dans les grandes villes. Ainsi Nantes, ville historiquement en pointe dans le développement des transports en commun, conserve un autobus Chausson des années 1950. De même, à titre de témoignage des anciens moyens et techniques de lutte incendie, une autopompe-échelle Delahaye construite en 1928 et depuis classée, est conservée aux Herbiers.
Ouverte sur l’Atlantique, la Région des Pays de la Loire, via son patrimoine aéronautique et en particulier grâce au Super Constellation qui y est classé, conserve vivace la mémoire des premiers appareils transatlantiques. Ce patrimoine technique concerne également les planeurs classés au titre des monuments historiques et exposés au Musée régional de l’air d’Angers. Leur histoire mouvementée évoque certains sombres épisodes de la Seconde Guerre mondiale.
La protection du patrimoine industriel, scientifique et technique des Pays de la Loire, renvoie immanquablement au souvenir d’une histoire ouvrière. Les machines industrielles, à l’image de la grue Titan 01 des chantiers navals de Nantes et les moyens de transport en commun qu’empruntaient ces ouvriers, ont contribué à façonner et façonnent encore le paysage urbanistique et rural de cette région.