Présentées durant une dizaine de jours en mars dernier, quatre tapisseries du XVIIe siècle évoquant la vie de saint Étienne seront à nouveau accrochées, du 16 décembre 2016 au 4 janvier 2017, dans le chœur de la cathédrale.

La cathédrale Saint-Étienne de Toulouse, propriété de l’État, conserve un bel ensemble d’une trentaine de tapisseries affectées au culte, soit l’une des plus grandes collections de tapisseries conservées dans les cathédrales en France. Datant du XVIe au XVIIIe siècles et classées au titre des Monuments historiques en 1897, ces tapisseries figurent dans l’inventaire dressé suite à la séparation des Églises et de l’État de 1905.

Vue du chœur

Le sauvetage d’une prestigieuse collection

En 2000, douze d’entre elles étaient encore exposées sous le buffet d’orgue, dans le chœur, le transept ou la nef. Certaines étaient restées pliées dans un placard humide de la sacristie. Souffrant de déformations dangereuses, de déchirures liées aux anciens modes d’accrochage, de salissures ainsi que de décolorations dues à une exposition permanente à la lumière, elles ont dû être déposées il y a une douzaine d’années.

De longs travaux de conservation pour un patrimoine fragile

Ces œuvres fragiles ont fait l’objet d’opérations pluriannuelles de conservation préventive et, pour certaines, de restauration depuis une quinzaine d’années.

Des restaurateurs qualifiés dans le domaine du textile sont intervenus sur ces collections : l’entreprise Chevalier conservation (Aubusson et Paris), Isabelle Bedat puis Montaine Bongrand, restauratrices spécialisées dans les tapisseries, et Nadège François, restauratrice de textiles installée à Toulouse.

Aujourd’hui, après traitement, toutes les œuvres ont été photographiées, montées sur rouleaux et stockées à l’abri de la lumière et des insectes, dans des lieux adaptés, sécurisés et contrôlés sur le plan de la température et de l’hygrométrie.

En 2015, une étude spécifique a été commandée par la Direction régionale des affaires culturelles à François Lunardi, spécialiste de soclage d’œuvres d’art, associé à Montaine Bongrand, restauratrice, pour étudier un système d’accrochage sur mesure, respectueux des tapisseries et des stalles où elles sont exposées.

Afin qu’elles bénéficient d'un temps de repos assurant leur bonne conservation, une présentation de quatre tapisseries a été envisagée une ou deux fois par an à l'occasion de certains moments liturgiques.

Après une première présentation en mars dernier, les tapisseries seront de nouveau exposées lors des fêtes de fin d'année et le jour de la saint Étienne (26 décembre).

La tenture de la Vie de saint Étienne : une œuvre majeure

Lapidation et Ensevelissement

Les quatre pièces murales présentées ici font partie d’une série de huit tapisseries (ou tenture) illustrant la Vie de saint Étienne, commandées en 1608 par Jean Daffis, évêque de Lombez et prévôt du chapitre de la cathédrale.

Il est à noter que le mobilier du chœur de la cathédrale a été détruit par un incendie en 1609. Cette tenture, commandée avant ce sinistre, a pu prendre place, après travaux, dans la nouvelle organisation du chœur.

Pour cette commande, Jean Daffis fit d’abord appel à Philippe Mercier, "maître tapissier de la ville d’Aubusson". La première livraison n’ayant pas donné satisfaction, il fit une nouvelle commande à Jean Dumazet, maître tapissier natif de Montauban, habitant Castillon, diocèse de Lombez (Gers), le 17 juin 1609. Jean Dumazet installa son atelier dans l’Hôtel de la Prévôté, situé alors près du chevet de la cathédrale, où il œuvra pendant plusieurs années.

Des épisodes marquants de la vie du saint

  • Ordination de saint Étienne
    Au centre de la composition, saint Pierre tient les clefs dans sa main gauche et impose la droite sur la tête de saint Étienne agenouillé devant lui. À l’arrière de saint Étienne, se tiennent les six autres diacres agenouillés et derrière saint Pierre, les apôtres.
Ordination de saint Étienne
  • Lapidation de saint Étienne
    Cette scène représente le martyre de saint Étienne : il est agenouillé au sol, les bras ouverts et encerclé par ses bourreaux qui lui jettent des pierres. Le Christ lui apparaît dans une nuée en haut à droite de la scène tandis qu’à gauche, Saül assiste, consentant, à la lapidation.
Lapidation de saint Étienne
  • Ensevelissement de saint Étienne
    La scène se passe dans un paysage champêtre en arrière plan, dont la douceur contraste avec le thème de l’ensevelissement du corps au premier plan. En arrière plan, on aperçoit la ville de Jérusalem.
Ensevelissement de saint Étienne
  • Translation des reliques de saint Étienne
    La tapisserie illustre le transport des reliques de saint Étienne vers l’église de Sion lors d’une grande procession précédée de nombreux chanoines en blanc. À gauche, on aperçoit une partie du tombeau (sarcophage) vide.
Translation des reliques de saint Étienne

Les autres tapisseries de ce cycle, illustrant les miracles du saint, sa prédication et sa condamnation ne sont pas toutes restaurées et seront présentées plus tard.

Ces tapisseries sur métier, en laine et soie, mesurent 2 m de hauteur et près de 5 m de largeur et ont été créées pour être présentées dans les stalles.

Au-delà de l’iconographie religieuse, elles présentent des scènes vivantes et colorées, chargées de nombreux personnages richement vêtus et de riches décors, dont le détail des fonds, des arbres ou des éléments d’architecture témoignent de la prouesse technique des maîtres tapissiers de ce tout début du XVIIe siècle.

Chacune est dotée d’une longue inscription, au bas de la tapisserie, décrivant l’iconographie de la scène ainsi que des armoiries de l’évêque de Lombez : "D’argent à la bande de gueules chargée de trois rosettes d’or, tenues par un diacre et timbrées d’une mitre et d’une crosse".

Coût des travaux

Le coût des travaux de restauration des tapisseries, de mise en sécurité des meubles de conservation, d'études et de fabrication du système d'accrochage s'élève, sur une période d'une quinzaine d'années, à 172 000 euros pris en charge par la Drac (Conservation régionale des monuments historiques).