"Villes invisibles", l’œuvre d’Italo Calvino inspire et métamorphose en "Palais des villes imaginaires" le Centre d'art contemporain d'intérêt national de la Ferme du Buisson, soutenu par la Drac Île-de-France. Pour cette exposition collective, présentée du 26 mars au 24 juillet, les artistes proposent ici, à la manière de "Fedora" la note décrite par le romancier fabuliste italien, leur vision d’une ville inaperçue.
Les artistes invités dans le Palais des villes imaginaires investissent chaque espace et proposent leur vision d’une ville imaginaire, imprégnée de leurs représentations sensibles et intellectuelles de la civilisation. Des sociétés fictives dans lesquelles la ville peut être utopie urbaine, reflet d’une véritable citée rêvée ou a contrario dystopie, sont imaginées. C’est aussi une manière d’introduire de la fiction dans la réalité de la ville pour inventer de nouveaux possibles, renouveler le narratif et la réflexion que l’on porte sur l’écosystème ville. Inventer les villes de demain…
L’exposition se déploie dans le centre d’art, s'étend à l’extérieur, avec des productions spécifiques à l’image de nos villes organiques, éternels chantiers. Elle se nourrit de l’histoire des utopies de la cité dont un florilège subjectif est présenté dans le cabinet des utopies : histoire ancienne – de Claude-Nicolas Ledoux au Plan Voisin de Le Corbusier –, récente – avec la création des villes nouvelles, les dérives des situationnistes Guy Debord et Constant avec la New Babylon, les visions d’Archigram ou Yona Friedman –, contemporaine – avec des récits d’auteurs liés au territoire du Grand Paris, les visions oniriques de François Schuiten ou la ville végétale de Bert Theis. Commissaire associée de l'exposition : Julie Sicault Maillé.
Voyage fictionnel en quatre chapitres
Chapitre 1 – Imaginaires de la ville, utopies et dystopies – Archigram*, Alain Bublex, Le Corbusier*, Constant*, Nicolas Daubanes, Guy Debord*, Yona Friedman*
Alain Bublex nous engage à nous balader à travers un paysage tout aussi réel que fantastique, mix labyrinthique "en chantier" de projets ayant trait au paysage urbain (Glooscap, Plan voisin et Plug-in City), composé de divers médias (audio, son, diasec, affiches).
Alain Bublex, Five days in town, 2005, courtesy Galerie GP & N Vallois – Paris, Ferme du Buisson, 2022 © photo Émile Ouroumov
Nicolas Daubanes détruit-il la ville qui nous enferme ou pose-t-il les prémisses d’une nouvelle ville dans laquelle vivre librement ? En réduisant en poussière une porte de prison, il détruit symboliquement la porte de la ville qui nous emprisonne et crée à partir de la sciure les possibles d’une nouvelle cité.
Nicolas Daubanes, Mauvais œil : porte de l'ancienne Maison d'Arrêt de Colmar, 2022, production Ferme du Buisson © photo Émile Ouroumov
Chapitre 2 – Ville intelligente, ville connectée – Filipe Vilas-Boas
Filipe Vilas-Boas interroge et renverse les travers de la ville connectée en en poétisant les outils. La reconnaissance faciale se transforme en partition musicale pour piano, l’intelligence artificielle nous prémunit de glisser sur une peau de banane et le véhicule automatique dessine une cartographie fictionnelle.
Filipe Vilas-Boas, Mixed feelings, 2020, développement en collaboration avec Grégoire Jauvion, Ferme du Buisson 2022 © photo Émile Ouroumov
Chapitre 3 – Habiter la ville ensemble : la ville de tous les vivants – Louisa Raddatz, Bert Theis*
Louisa Raddatz nous immerge dans la ville de tous les vivants, celle dans laquelle nous devrions tous vivre ensemble, animaux, végétaux, humains. Elle tisse une ruche pénétrable générée par des éléments végétaux, organiques, humains, animaux…
Louisa Raddatz, La Maison des vivants, 2022, production Ferme du Buisson © photo Émile Ouroumov
Chapitre 4 – Rêver la ville – Fabrication Maison**, François Schuiten* , Capucine Vever
Capucine Vever redessine ce qui a déjà été totalement dessiné récemment par l’homme, une ville nouvelle (Évry-Courcouronnes) et nous la donne à rêver en un paysage montagneux suspendu, les sommets se substituant aux cimes des immeubles.
Capucine Vever, À la fin, on sera tout juste au début, 2019-21, production Grand Paris Sud, Ferme du Buisson, 2022 © photo Émile Ouroumov
Le Palais des villes imaginaires se prolonge avec Rêver la ville, une forme expérimentale pensée et coconstruite par des habitants du territoire et le collectif Fabrication Maison au fil des mois de l’exposition. À partir d’ateliers collaboratifs de co-création, les habitants repensent leur quartier et en construisent la carte sensible et une nouvelle signalétique urbaine, qui seront présentées à l’occasion d’un temps événementiel le 18 juin à La Ferme du Buisson.
Cette exposition s’inscrit dans la lignée de l’exposition précédente, Aterrir (du 2 octobre 2021 au 30 janvier 2022 au Centre d’art contemporain de la Ferme du Buisson). Une autre mise en lumière des questions de territoire, de commun, de communauté, de vivant et d’habiter, y est esquissée.
(*travaux présentés dans le cabinet des utopies- **Événement Rêver la ville le samedi 18 juin)
Œuvres des artistes
Installation créée spécifiquement pour Le Palais des villes imaginaires à partir des projets Plan Voisin, Glooscapet Plug-in City
Pour Le Palais des villes imaginaires, Alain Bublex se penche sur des projets fondateurs de sa pratique en en extrayant des films et images jusqu’alors très peu montrés. La ville fictive de Glooscap qu’il crée de toutes pièces, sur la côte est du Canada et en façonne les origines, plans, images contemporaines pendant plusieurs années. Le projet des Plan Voisin, inspiré de Le Corbusier, dans lesquels on retrouve l’importance des voies de circulation et de l’automobile – l’artiste fut anciennement designer automobile – au cœur d’une forêt de gratte-ciels redessinée. Les Plug-in City, hommage cette fois au groupe Archigram, qui développent une cité nomade dans laquelle des cabines de chantier dites UMH (Unité Mobile d’Habitation) produisent une ville organique en mouvement, reflet de nos vies contemporaines.
Alain Bublex, séries Plan Voisin (2004-13), Glooscap (1992-2011) et Plug-in City (2005-11), courtesy Galerie GP & N Vallois – Paris, Ferme du Buisson, 2022 © photo Émile Ouroumov
Alain Bublex propose ainsi une installation en chantier, composée d’images fixes et images animées plongées dans un environnement sonore, qui forment une installation "immersive" dans le paysage urbain... Il nous plonge dans une ville imaginaire composée de toutes ces images, à la manière des montages de vues de plusieurs villes, technique utilisée par l’artiste pour réaliser ses vidéos et inventer au final une seule ville.
Né en 1961, Alain Bublex vit et travaille entre Lyon et Paris. Fondées sur l’architecture, l’urbanisme, les notions de projet et de prototype, les créations d’Alain Bublex sont empreintes de fiction. L’artiste conçoit le processus artistique comme un "travail" qui agit sur le réel et le transforme ; la galerie ou le musée, comme une plateforme dont il se sert pour montrer ce processus aux publics. Artiste-ingénieur, mécanicien, photographe, urbaniste, il n’hésite pas à s’initier aux techniques de tout type de métiers qui lui permettent de réaliser ses expérimentations urbanistiques, à produire ses projets et objets hybrides, à voyager et filmer le monde moderne en mouvement.
Création pour Le Palais des villes imaginaires
Mauvais oeil : porte de l’ancienne Maison d’Arrêt de Colmar, 2022. Installation, sciure de bois et acier, dimensions variables. Production La Ferme du Buisson Courtesy de l’artiste.
Nicolas Daubanes, Mauvais œil : porte de l'ancienne Maison d'Arrêt de Colmar 2022, production Ferme du Buisson © photo Émile Ouroumov
"Inscrire la série Mauvais œil, série de portes de prison pulvérisées en milliard de particules de sciure de bois, dans l’exposition Le Palais des villes imaginairesest l’occasion d’appuyer très fortement sur une des interprétations possibles de cette expérience plastique. Au moment même de la réalisation de l’œuvre – c’est à dire le passage millimètre par millimètre d’une scie circulaire le long de la porte –, la machine expulse la sciure dans l’air. Cette dernière se dépose lentement dans la salle d’exposition et dessine naturellement un désert de sable. On y distingue quelques dunes, les vestiges d’une civilisation imaginaire à travers les différents éléments métalliques au sol (serrure, clef, gonds, charnières …). La pulvérisation d’une porte de prison peut ouvrir sur un nouveau monde. Cet amas de poussières et d’éléments ferreux manufacturés fait inévitablement penser à la scène finale du film La planète des singes (1968) de Franklin Schaffner : la découverte des vestiges d’une civilisation disparue depuis longtemps."
Né en 1983, Nicolas Daubanes vit et travaille à Perpignan. Il questionne la liberté en se nourrissant de l’histoire. Il réalise un travail autour du monde carcéral (dessins, installations, vidéos) issu de résidences immersives dans les maisons d’arrêt, depuis près de 10 ans. Depuis ses dessins à la limaille de fer aux monumentales installations de béton saboté au sucre, Nicolas Daubanes s’intéresse au moment combiné de la suspension et de la chute : il s’agit de voir avant la chute, avant la ruine, l’élan vital. Temporaire et fugitif.
Création pour Le Palais des villes imaginaires
La Maison des vivants, 2022.Installation, bois, cactus, palmier, lichen, fleurs, fibrede coco, crin végétal, argile, laines, plumes, latex, encres, colle, cheveux, toile de jute, bâche et grillage, dimensions variables. Production La Ferme du Buisson Courtesy de l’artiste
À travers cette nouvelle installation, Louisa Raddatz, sensible à l’environnement et à la matière, questionne la cohabitation entre les vivants en s’inspirant d’un nid d’abeilles sous forme monumentale et architecturale, qui deviendra ici symboliquement La Maison des vivants afin de sauvegarder des espèces et sur-vivre ensemble face au dérèglement climatique. "Ces structures hexagonales invitent à traverser des espaces de vie (niches, abris), imaginés à partir de matières naturelles. Ainsi je trie et classe la matière : chaque alvéole est égale à une matière choisie afin de représenter le monde végétal, le monde animal et l’homme (végétaux, lichen, argile, laine, plumes, latex, cheveux...)" Ces surfaces habitables nous plongent dans l’univers d’une ville onirique au cœur du vivant et nous confrontent avec la matière.
Louisa Raddatz, La Maison des vivants, 2022, production Ferme du Buisson © photo Émile Ouroumov
Née en 1990 en Allemagne, Louisa Raddatz vit et travaille en France. Plasticienne franco-allemande, Louisa Raddatz est diplômée de l’École Supérieure d’Art des Pyrénées en 2014. Son travail pluridisciplinaire se base sur la mémoire, l’intime, son histoire familiale mais également sur la matière vivante et organique. L’homme et son environnement naturel – végétal ou animal – sont au cœur de sa pratique afin de sensibiliser à l’impact écologique. Ses créations sont composées de strates du temps qui peuvent être géologiques, archéologiques, historiques ou même liées à notre peau, constituée également de plusieurs couches de tissus.
À la fin on sera tout juste au début,2019-21. Installation, câbles et disques en céramique, dimensions variables. Production Grand Paris Sud
"Le titre de cette installation À la fin on sera tout juste au début – extrait du livre Trace et archive, image et art deJacques Derrida – ramène à la question du temps, notion quim’est apparue comme essentielle pour aborder la (l’ancienne)ville nouvelle d’Évry-Courcouronnes. Je me suis intéressée àl’empreinte laissée sur le paysage par le processus d’urbanisationextraordinairement rapide. Une ville sortie de terre très vite,en quelques décennies, et dont la topographie a complètementtransformé les perspectives du paysage : les champs plats de betteraves et pommes de terre ont laissé place aux grands ensembles de 18 étages. À la fin de sa construction, la ville cherche encore son agencement urbain, de sorte qu’on a l’impression que tout est en perpétuelle transformation. En détournant un orographe, outil inventé en 1814 pour cartographier les Pyrénées, j’ai abordé la ville en hauteur, depuis ses toits, pour en effectuer les relevés qui sont le point de départ de ces dessins sur terre ".
Capucine Vever, À la fin, on sera tout juste au début, 2019-21, production Grand Paris Sud, Ferme du Buisson, 2022 © photo Émile Ouroumov
La métaphore de la naissance d’une chaîne de montagnes, à savoir celle du temps géologique, est ainsi usitée par l’artiste pour parler d’une ville qui a émergé et a transformé le paysage. C’est tout l’agencement urbain d’Évry-Courcouronnes qui se mue en géomorphologie au sein de cette œuvre : les grandes avenues sont devenues des rivières, les places urbaines des plaines, les maisons de petites collines, les grands ensembles de la ville nouvelle des falaises escarpées.
Née en 1986, Capucine Vever vit et travaille à Bobigny, France. La démarche artistique de Capucine Vever s’attache à ausculter les interactions entre environnement géographique et activités humaines. Ses œuvres s’intéressent à révéler ce qui est enfoui, dissolu, invisible ou imperceptible. Se jouant souvent à des échelles qui échappent au regard, du gigantisme à l’infime, les problématiques environnementales sont récurrentes dans sa pratique. Ses œuvres procèdent par analogies ou frottements entre réalité, fiction, recherche scientifique, narration et cartographie.
Création pour Le Palais des villes imaginaires
Mixed feelings, 2020Logiciel, ordinateur, caméra, écran et système audio,dimensions variables. Développement avec la collaboration de GrégoireJauvion
Dumb city – La peau de banane intelligente, 2022 Logiciel, nano-ordinateur, télémètres, roues, moteurs, batterie, peinture et mousse thermoformée, dimensions variables. Développement avec la collaboration de François Mocq
Data Driven – Sans les mains, 2022. Logiciel, nano-ordinateurs, volants et moteurs, écran tactile, dimensions variables. Développement avec la collaboration de Michael Guilhermet. Production La Ferme du Buisson et Filipe Vilas-Boas Toutes les œuvres : Courtesy de l’artiste
Dans Le Palais des villes imaginaires, Filipe Vilas-Boas interroge certaines composantes de la ville connectée, dite aussi smart city ou ville intelligente. "Tout à tour piéton, automobiliste, flâneur, consommateur ou encore travailleur et citoyen, le citadin lambda semble de toutes parts pris dans un dispositif technique dont il ne maîtrise pas le code. Nous nous retrouvons ainsi programmés dans les moindres recoins de nos interactions sociales en ligne et hors ligne. Cette colonisation du numérique interroge l’immense place donnée à la technologie dans la ville d’aujourd’hui et déjà, dans l’imaginaire de la ville du futur. Mais l’avons-nous disposée à la bonne place en tant qu’esclave de l’humanité ? Ne peut-elle pas être envisagée dans une autre forme de relation, défaite des rapports de domination ?"
Filipe Vilas-Boas, Data Driven – Sans les mains et Dumb City – La peau de banane intelligente, 2022, développement en collaboration avec Michael Guilhermet et François Mocq, Ferme du Buisson 2022 © photo Émile Ouroumov
Avec Data Driven – Sans les mains, l’artiste propose de lâcher le volant pour le confier à la technologie des véhicules autonomes. "La société de la flemme n’a pas l’énergie de se conduire mais semble en dépenser sans compter". La reconnaissance faciale est poétiquement détournée par Mixed feelings, "miroir audiovisuel qui génère de la musique inspirée de l’état émotionnel qui est lu en temps-réel sur notre visage". Dumb City - La peau de banane intelligenteexploite l’intelligence artificielle afin de nous prémunir de la chute. "Or dans notre désir ou délire de constante optimisation, ne sommes-nous pas en partie et d’une certaine manière, en train de nous couper de ce qui nous constitue : de la force du chaos, de la surprise, de la vie ?"
Né en 1981 au Portugal, Filipe Vilas-Boas vit et travaille à Paris. Designer de formation et autodidacte, Filipe Vilas-Boas est un artiste conceptuel qui explore nos usages de la technologie, ainsi que ses implications éthiques et esthétiques. Ses œuvres combinent récupération, détournement et nouveaux médias. Ni techno-utopiste, ni technophobe, il examine de manière critique et ironique nos temps hypermodernes et en particulier la notion de progrès. Ses installations, performances et vidéos questionnent la numérisation globale de nos sociétés.
Le cabinet des utopies
Archigram, Guy Debord, Charles Fourier, Le Corbusier, Yona Friedman, Claude-Nicolas Ledoux, Constant Anton Nieuwenhuys, François Schuiten, Bert Theis et Le Grand Paris des écrivains.
Yona Friedman (1923 – 2019) - Slide-Show Architecture. , 2016.
Direction artistique : Sylvie Boulanger Design graphique : Léna Arraguas Montage, animation et conformation : Aida Rebull Son : Max-Louis Raugel. Production cneai =, d’après la publication Yona Friedman –L’humain expliqué aux extra-terrestres, édition cneai = / L’éclat, 2016. Remerciements Fonds de dotation Denise et Yona Friedman. Avec le soutien de la Drac Île-de-France et du Conseil régional d’Île-de-France
Architecte hongrois, Yona Friedman publie en 1958 L’Architecture mobile, dans laquelle il est question de la mobilité de l’usageret non du bâtiment. L’architecture mobile est l’ "habitat décidépar l’habitant" à travers des "infrastructures non déterminéeset non déterminantes". Projet manifeste et iconique, la Ville spatiale est un principe imaginé dès 1959 par Yona Friedman.Structure spatiale surélevée sur pilotis, elle peut enjamber deszones non constructibles ou même des villes existantes. C’estune "ville tridimensionnelle". Les différentes fonctions de la villepeuvent s’y superposer. Elle dessine une cartographie nouvelledu territoire "et la ville redevient ce qu’elle a toujours été : unthéâtre de la vie quotidienne."
Peter Cook, Instant City in a Field Long Elevation, 1969 Fac-similé d’une sérigraphie, encre sur papier, 56,5 x 220 cm Collection FRAC Centre – Val de Loire
Architecte, théoricien et professeur, Peter Cook (né en 1936) fonde en 1963 avec Warren Chalk, Dennis Crompton, David Greene, Ron Herron et Michael Webb le groupe Archigram. Instant City est un projet de ville nomade entamé par Archigram avec Plug-in-City en 1964. « Métropole itinérante », Instant City est une ville instantanée, volante qui arrive sur un site, crée l’événement puis disparaît, une ville dédiée aux loisirs, transportée par des dirigeables.
Penseur, artiste, auteur de nombreux essais et films expérimentaux, Guy Debord développe dès les années 1950 une critique virulente de la culture contemporaine, notamment de la "société du spectacle". Fondateur de l’Internationale Lettriste puis de l’Internationale Situationniste, notamment avec Constant, il crée une nouvelle science, la psychogéographie, "étude des lois exactes et des effets précis du milieu géographique, consciemment aménagé ou non, agissant directement sur le comportement affectif des individus" et rendus intelligibles par la dérive, "technique du passage hâtif à travers des ambiances variées". Le Guide psychogéographique de Paris rend compte des expériences de dérive menées dans Paris par les lettristes.
Charles Fourier est à l’origine de la création de plusieurs communautés utopiques, inspirées de ses écrits. Le phalanstère est un dispositif expérimental central basé sur sa théorie du monde social. Philosophe français considéré par Karl Marx et Friedrich Engels comme une figure du "socialisme critico-utopique",
Cabinet des utopies Ferme du Buisson © Émile Ouroumov 2022
Dans la Théorie de l’unité universelle (1822) et ensuite dans Le nouveau monde industriel (1829), il présente le phalanstère comme un ensemble de bâtiments à usage communautaire formé par la libre association de leurs membres, une sorte d’exploitation agricole avec des bâtisses pour le logement et l’amusement. Pour Charles Fourier, les phalanstères formeront le socle d’un nouvel État.
Charles-Édouard Jeanneret-Gris, dit Le Corbusier, est architecte, urbaniste, décorateur, peintre, sculpteur suisse naturalisé français. Père du mouvement moderne avec Ludwig Mies van der Rohe, Walter Gropius, Alvar Aalto et Theo Van Doesburg, il a influencé des générations d’architectes, tout en étant régulièrement l’objet intellectuel de contestations de son œuvre architecturale, urbanistique et de ses engagements politiques.
Cabinet des utopies Ferme du Buisson © Émile Ouroumov 2022
Le Plan Voisin est un projet pour le centre de Paris dessiné entre 1922 et 1925. La rive droite de Paris y est rasée pour laisser place à un plan pour une ville de trois millions d’habitants.
Architecte du Roi, Claude-Nicolas Ledoux est surnommé "L’architecte des Lumières". Il publie en 1804 le premier tome d’un vaste ouvrage, L’Architecture considérée sous le rapport de l’art, des mœurs et de la législation, dans lequel la Saline royale d’Arc et Senans est présentée comme le point de départ d’un ample projet urbain : la cité idéale et de socialisme utopique de Chaux autour d’une manufacture intégrée.
Peintre de formation, Constant Anton Nieuwenhuys, dit Constant, est une figure majeure de la scène artistique néerlandaise de la seconde moitié du XXe siècle.
Cabinet des utopies Ferme du Buisson © Émile Ouroumov 2022
Au début des années 1950, il entame une réflexion sur la réalité urbaine, empreinte de nomadisme et de jeu. De 1956 à 1974, il se consacre exclusivement à New Babylon, d’abord nommée "Dériville", projet utopique de ville globale et illustration de "l’urbanisme unitaire" de Guy Debord. Pour Constant, "la forme labyrinthique de l’espace social new babylonien est l’expression directe de l’indépendance sociale".
Auteur de BD célèbre (grand prix d’Angoulême en 2002 pour l’ensemble de son œuvre), François Schuiten (né en 1956 à Bruxelles, vit et travaille entre Paris et Bruxelles. ) est aujourd’hui scénographe. Concepteur des stations de métro "Arts et Métiers" à Paris et "Porte de Hal" à Bruxelles, du musée du train de la même ville, le Train World, il a scénographié divers spectacles d’opéra et de danse et participé à la création de plusieurs films (Taxandria, Les Quarxs, Mr Nobody et Mars et Avril….)
Ensemble de dessins et sérigraphie appartenant à différentes séries, dont Meudon 2030 et Vision sur le future de Belval, Luxembourg.
Il a également dessiné des pavillons pour plusieurs expositions universelles : le pavillon du Luxembourg à Séville en 1992, le parc thématique des utopies à Hanovre en 2000 et le pavillon belge à l’Exposition mondiale de Aïchi (Japon) en 2005. L’objet de ses recherches scénographiques donne à rêver l’espace urbain afin d’en produire de nouvelles images inspirantes pour les transformations urbaines réelles, à l’image du travail qu’il réalise actuellement pour la ville de Meudon, autour de la perspective de Le Nôtre et de trois bâtiments historiques, l’Observatoire, le Hangar Y et la Grande Soufflerie, ou celui qu’il a pu imaginer pour le nouveau quartier de Belval au Luxembourg à partir de deux anciens hauts fourneaux dans lesquels il suggère que la nature reprenne ses droits.
Artiste luxembourgeois, Bert Theis crée des situations qui permettent au spectateur de sentir et de penser sa présence et sa place dans le monde qui l’entoure. Ses œuvres, qu’il qualifiait volontiers de « philosophiques », sont fidèles à son engagement politique, social et artistique. Elles suscitent le dialogue tout en favorisant l’introspection. L’art était pour Bert Theis un outil d’émancipation, l’humour une arme de la pensée et l’artiste un être social critique et responsable. Aggloville offre la vision d’un Paris dans lequel la nature a envahi la capitale. Bert Theis questionne ici la complexité et les enjeux d’une urbanisation puissante et irréversible, nourrie aujourd’hui du modèle urbain néolibéral, à l’aune d’une ville durable.
Aggloville (Paris), 2007 Photographie, impression jet d’encre à solvants sur toile canvas, 227 x 322 cm Collection Fonds d’art contemporain – Paris Collections
Le Grand Paris des écrivains" donne à entendre la voix d’autrices et d’auteurs contemporains sur des images de la ville aujourd’hui. Le principe en est simple : pour chaque film, un écrivain s’empare d’un bâtiment, un quartier, ou un axe du Grand Paris. Elle ou il écrit alors un texte, du genre littéraire de son choix, en lien avec l’espace choisi. La caméra du réalisateur, elle, capte l’esprit des lieux. Au montage, des correspondances se tissent entre l’histoire racontée en voix off et les images tournées.
Collection de courts métrages réalisée par Stéfan Cornic et produite par Année Zéro et le Pavillon de l’Arsenal. Disponible en ligne
Le Centre d’art contemporain de la Ferme du BuissonLABEL Centre d’art contemporain d’intérêt national (CACIN). Depuis le 8 janvier 2020, le Centre d’art est labelisé Centre d’art contemporain d’intérêt national. Créé en 2017 pour les lieux exerçant une "activité d’exposition, de production d’œuvres et de diffusion des arts visuels et contemporains", le label CACIN témoigne du soutien et de la reconnaissance de l’État envers un lieu pour son engagement dans le champ des arts visuels et son action envers le public. Il distingue la qualité de l’accompagnement des artistes ainsi que la logique d’expérimentation dans l’ensemble des actions menées faisant la part belle à la liberté de création et à sa transmission. Il compte vingt-sept bénéficiaires (février 2020). Au sein du projet pluridisciplinaire de la Ferme du Buisson, le Centre d’art contemporain est engagé depuis 1991 dans un soutien actif à la création à travers un travail de production, de diffusion et d’édition. Tout en permettant de découvrir des artistes français émergents ou des artistes internationaux méconnus en France, le Centre d’art fait dialoguer les disciplines et propose des formats d’exposition et de médiation originaux. Le Centre d’art contemporain de la Ferme du Buisson bénéficie du soutien de la Drac Île-de-France, de la Communauté d’Agglomération de Paris - Vallée de la Marne, du Conseil Général de Seine-et-Marne et du Conseil Régional d’Île-de-France. Il est membre des réseaux Relais (centres d’art en Seine-et-Marne), Tram (art contemporain en Île-de-France) et d.c.a. (association française de développement des centres d’art). |