Le patrimoine de la période précolombienne
Le Mésoindien
Le peuplement des Petites Antilles remonte au 4e millénaire avant notre ère, soit au Mésoindien également dénommé Age Archaïque. Des populations nomades originaires d’Amérique du Sud et d’Amérique Centrale ont alors migré vers les Grandes et les Petites Antilles. Leur longue tradition de peuples maritimes leur permet de maîtriser la navigation en haute mer et de rejoindre les îles des Antilles. A cette période les stratégies de subsistance reposent essentiellement sur la collecte de coquillages, la chasse sous-marine et terrestre, la pêche, la cueillette de plantes sauvages et sur une agriculture naissante. Ces communautés alors très mobiles, se déplacent d’île en île à bord d’embarcations de type canoé. Leur circulation dans les Petites Antilles apparaît guidée par des besoins socioéconomiques et des croyances, notamment la représentation cosmogonique de leur environnement. Des campements de plein air de courte durée, implantés le long des côtes, illustrent un mode de vie nomade perçu par des foyers, des aires de cuisson de coquillages et des zones d’atelier. La culture matérielle mésoindienne repose sur la production d’outils et d’objets à caractère symbolique façonnés en pierre, en coquille et en corail. Ces communautés fréquentent plus ponctuellement l’intérieur des terres où des cavités ont pu être reconnues comme des lieux d’inhumation et vraisemblablement d’expression des premières formes de l’art pariétal.
Le Néoindien ancien
A partir de 500 avant notre ère, une nouvelle vague migratoire issue des côtes du Venezuela et notamment du bassin de l’Orénoque, se diffuse à travers dans les Petites Antilles et Porto Rico. C’est alors l’avènement du Néoindien ancien dénommé également Age Céramique ancien. Ces populations d’agriculteurs-potiers sédentaires ou semi-sédentaires, apparaissent structurées en réseaux de villages et de sites satellites correspondant à des lieux d’activités spécialisées, disséminés à travers les îles. L’archipel présente alors une forme d’unité culturelle de Trinidad à Porto Rico. Comme leurs prédécesseurs, ces communautés villageoises puisent une grande partie de leurs ressources du milieu marin et exploitent l’intérieur des îles où elles chassent de petits animaux et y développent une agriculture. Ces communautés ont produit des céramiques richement ornées de décors modelés, peints et incisés, des éléments de parure sur différentes espèces de coquilles et de pierres semi-précieuses ainsi que de nombreux outils. A cette période les pratiques funéraires sont réalisées au sein des villages et l’art pariétal semble se développer en Guadeloupe et à Saint-Martin.
Le Néoindien récent
A partir du Néoindien récent, période appelée aussi Age Céramique récent, les populations vont se diffuser au-delà de Porto Rico, à travers les Grandes Antilles et les Bahamas. On assiste alors dans tout l’archipel à partir de 700-900 après notre ère à une régionalisation des communautés villageoises qui se traduit dans les Petites Antilles par des différences culturelles entre le sud et le nord de l’archipel. Ces variations sont perçues d’après la culture matérielle, notamment les formes et les décors des productions en céramique. Le mode d’habitat reste le village où sont centralisées la plupart des activités, notamment l’inhumation des défunts qui apparaît faire l’objet de rituels funéraires complexes. Les productions matérielles des Petites Antilles se modifient au profit de nouveaux répertoires stylistiques moins ornés. Les activités de subsistance de cette période sont alors plus orientées vers le domaine maritime. En 1492, Christophe Colomb reconnait les Bahamas et les Grandes Antilles puis la Guadeloupe en 1493. La colonisation qui s’en suivra va décimer les populations amérindiennes.
L'art rupestre
La Guadeloupe représente le plus riche patrimoine rupestre précolombien des Petites Antilles, on y dénombre plus de 400 roches gravées réparties sur 24 sites. Si leur signalement par le Père Breton remonte en 1647, ce n’est qu’au cours du XIXe que les premières études seront le fait d’érudits. La plupart des roches gravées sont concentrées sur la commune de Trois-Rivières qui se développe au sud de l’île de la Basse-Terre. Les sites de plein air comportent généralement plusieurs blocs ornés de gravures que l’on nomme aussi pétroglyphes. On compte également deux sites en cavités sur la Grande-Terre de Guadeloupe et à Marie-Galante, la grotte du Morne Rita et l’abris Patate. Les représentations évoquent des personnages anthropomorphes, le plus souvent figurés de façon très schématique, cependant on relève également quelques figurations d’animaux.
Les nombreuses ressemblances constatées avec l’art rupestre de la Caraïbe et certains sites d’Amérique du Sud et d’Amérique Centrale, suggèrent l’existence d’un puissant fond culturel commun. Si la datation des sites reste encore incertaine, des représentations peintes de Porto Rico, datées dès 1500 ans avant notre ère, suggèrent que cette forme d’art est apparue au Mésoindien dans les Antilles. On suppose que ces représentations ont pu être le support d’activités rituelles liées à des croyances, en interaction avec la nature, des esprits ou le culte des ancêtres. Malgré les hypothèses émises par les chercheurs, le sens qui accompagnait ces représentations reste difficile à percer, néanmoins leur localisation près des sources, des cours d’eau et en bord de mer suggère une forte relation avec l’eau. Un des plus beaux ensembles de Guadeloupe peut être visité aux Parc archéologique des roches gravées sur la commune de Trois-Rivières.
Le service régional de l’archéologie, le Département, la Région Guadeloupe et les collectivités territoriales soutiennent des actions d’inventaire et des études scientifiques de ce patrimoine très vulnérable en raison de sa dispersion sur le territoire et de sa localisation en plein air. Un dispositif de protection, combinant une gestion des aléas naturels et anthropiques est progressivement mis en place en Guadeloupe.