Les protections au titre des monuments historiques 2021 en Auvergne-Rhône-Alpes - 3eme trimestre
12.La Chambre (Savoie) : ancien couvent des Cordeliers
L'ancien couvent des Cordeliers est un rare témoignage de l'architecture religieuse gothique en Savoie et il constitue un ensemble remarquable, surtout du point de vue historique.
- 14e-18e siècles, remanié aux 19e et 20e siècles -
inscription au titre des monuments historiques le 1er octobre 2021 de l'ancien couvent des Cordeliers.
© F. de Peyronnet-Dryden DRAC Auvergne-Rhône-Alpes
Le couvent des Frères Mineurs Conventuels est fondé en 1365 sous l'épiscopat d'Amédée V de Savoie-Achaïe, évêque de Maurienne et beau-frère de Jean II, seigneur de La Chambre et de l'Huille, vicomte de Maurienne.
Cette partie de la Savoie comptait alors peu de couvents d'ordres mendiants. La position de la Chambre sur la route du Mont-Cenis lui conférait non seulement un attrait politique et économique mais aussi pastoral : ainsi les frères pouvaient prêcher auprès des nombreux pèlerins se rendant à Rome et en Terre Sainte et pour qui le bourg de La Chambre constituait une étape obligée.
Outre la rente annuelle reçue des seigneurs de La Chambre, les frères étaient propriétaires de leur église, des bâtiments conventuels, d'une grange, d'un cellier, d'une, de deux moulins situés le long du Bugeon, et tiraient donc une part importante de leurs revenus de l'exploitation agricole.
La Révolution démantela l'ordre et démolit de nombreux édifices, les cinq frères du couvent furent chassés et leurs biens vendus par lots à divers propriétaires et transformés en bâtiments agricoles. Sa nouvelle affectation le dénatura considérablement.
En 1997, la mairie de La Chambre, consciente de l'intérêt historique et architectural du couvent des Frères, décida de racheter les bâtiments. Sa protection au titre des monuments historiques doit permettre de favoriser la remise en valeur de ce site important pour l’histoire religieuse de la Savoie.
Le plan d'ensemble du couvent de La Chambre est constitué de la vaste église orientée à l'est et du cloître accolé sur son mur nord. Premier bâtiment du couvent construit au XIVe siècle, l’église a subi plusieurs remaniements dès le XVe siècle où des chapelles latérales lui sont adjointes.
Au XVIIIe siècle, elle est reconstruite en style baroque, comme nombre d'églises savoyardes. L'un des trois pilastres engagés à l’intérieur de l’église porte d’ailleurs la date de sa restauration : « RESTAURATUM DIE 20 MAII 1747 ».
La façade de l'église est simple, elle présente au-dessus du portail une fenêtre haute de style gothique flamboyant dont les remplages ont été supprimés après 1932.
L'église est à nef unique, à quatre travées sans transept et terminée par un chœur désaxé ; elle a été très remaniée : la nef, qui devait être à trois niveaux d'élévation - grandes arcades, tribunes et fenêtres hautes - est coupée en deux par un mur, et seule la partie ouest est couverte. Elle a également été séparée en deux dans le sens de la hauteur pour les besoins agricoles. Une partie des fenêtres hautes en arc brisé ont été obstruées par des piliers baroques. A gauche du chœur se trouve une chapelle désignée dans l'inventaire du XVIIIe siècle comme la « chapelle Ribaud ». Le clocher qui se trouvait à l'ouest de cette chapelle est aujourd’hui écroulé.
Le cloître fut accolé à l'église lors d'une deuxième phase de construction au XVe siècle, probablement conjointement à l'édification des chapelles ; il fut ensuite remanié aux XVIIe et XVIIIe siècles. Il est adossé au mur nord de la nef.
En grande partie ruiné, il conserve encore ses deux galeries méridionale et occidentale dont les arcades ont presque toutes été obstruées du fait de remaniements au cours des XIXe et XXe siècles.
De la première phase de construction ne subsiste que la partie orientale du cloître, constituée de trois pièces en enfilade. Au centre se trouve la salle capitulaire dont les quatre voûtes d'ogives, gardant quelques traces d'un décor polychrome, retombent sur un large pilier central. Elle a été subdivisée pour servir d'étables.
La petite pièce située à droite de la salle capitulaire est voûtée d'ogives retombant sur des chapiteaux figurés. Ces quatre visages, évoquant peut-être les quatre âges de la vie, sont symboliquement placés sous la protection divine, la clef de voûte étant ornée d'une main faisant le geste de la bénédiction. La richesse du décor sculpté et peint montre l'éloignement des religieux de La Chambre de la règle primitive de saint François, encouragé par l'implantation du couvent dans une zone d'échanges économiques.
Le bâtiment des novices, comprenant la cuisine et deux réfectoires au rez-de-chaussée et le dortoir des novices à l'étage, était autrefois accolé à la galerie occidentale. Il a été partiellement détruit par un incendie en 1962, et a été rasé au début de l'année 2013 pour des raisons de sécurité.