Mesdames et Messieurs,
Chers amis,

Si la France tient toujours aujourd'hui une place culturelle importante dans le monde, ce n'est pas le fruit du hasard. C’est au contraire le fruit du talent des femmes et des hommes qui créent et le fruit d’une politique qui, dans notre pays, souhaite prendre soin des créateurs. Cette influence, nous la devons aussi à quelques vecteurs de diffusion efficaces.

Le premier est sans conteste le livre qui reste, à l'heure d'Internet, un moyen de communication d'une remarquable modernité. Bon nombre des acteurs du livre, auteurs, penseurs, éditeurs, libraires, sont connus et agissent bien au-delà de nos frontières ; certains sont des intervenants majeurs d'une industrie désormais mondialisée et nous ne pouvons que nous en féliciter.

Dans cette période de crise, économique et culturelle, où une nouvelle révolution technologique modifie les positions acquises, notre industrie du livre reste puissante. Notre pays continue à se distinguer par sa capacité à proposer au monde entier une création littéraire inventive, ingénieuse, inattendue. La création et la diversité éditoriale proposées également à nos concitoyens sur l’ensemble du territoire grâce en partie à notre réseau de libraires, de bibliothèques et de médiathèques sont essentielles.

Vecteur de notre rayonnement culturel, signe de la vitalité et de la diversité de notre création littéraire, le livre a surtout pour nous un pouvoir symbolique considérable. Nous lisons pour apprendre et pour comprendre, nous lisons pour rêver. Nous lisons aussi pour entrer dans une autre temporalité, sortir de l’instant. Nous lisons pour devenir de meilleurs citoyens, car plus encore que toute autre forme artistique, le livre est ferment de citoyenneté, il contribue à renforcer le lien social. Par le livre et la lecture, nous accédons à la découverte de l’autre et de nous-mêmes. Ils nous permettent d’approfondir ce que l’on sent confusément en soi, de comprendre ce que l’on est amené à être. Car nous lisons aussi pour être, selon la formule proustienne, le propre lecteur de soi-même.

Dans notre système éducatif, où l'apprentissage de la langue est indissociable de celui de la littérature, le livre est le support naturel de l'édification des enfants, il est source de leur épanouissement, de l'éveil de leur conscience citoyenne : « faire lire un enfant, ce n’est pas emplir un vase, c’est allumer un feu » écrivait Montaigne.

Le livre et la lecture sont donc des éléments déterminants de l'exception culturelle qui distingue notre pays. Ils sont en cela appuyés par une politique publique, qui combine les trois objectifs fondateurs que sont la préservation du patrimoine écrit, la promotion de la création littéraire et, enfin, la stimulation de l'accès de tous les publics à cet univers.

S’agissant du patrimoine écrit, notre ambition s'incarne notamment dans la Bibliothèque nationale de France, cette très grande bibliothèque voulue par le Président François Mitterrand, qui parvient à concilier l'héritage d'une collecte du dépôt légal pratiquée depuis bientôt cinq siècles avec les projets de diffusion numérique s’adaptant aux nouvelles attentes et pratiques de nos concitoyens.

En matière de création, la France peut s’enorgueillir d’entretenir une politique publique protectrice des créateurs. La France demeure le pays du droit d'auteur qui, pour moi, n’est pas réductible à ses seules prérogatives économiques ; les avancées des derniers jours dans le secteur du livre illustrent que ce principe fondamental de respect des créateurs, le droit d’auteur, et la sphère numérique ne sont pas incompatibles.

En outre, par une régulation vertueuse de l'économie du livre dont le trait le plus emblématique est la loi Lang de 1981 sur le prix unique du livre, nous parvenons à assurer des débouchés à la diversité de la création éditoriale et nous permettons ainsi aux éditeurs de continuer à pouvoir prendre des risques et de s'engager sur le long terme auprès d'auteurs nouveaux et audacieux. Les librairies indépendantes, par leur nombre et par la variété de leurs choix en matière d'assortiment, par leur lien direct avec les publics, demeurent aujourd'hui les garantes de cette diversité éditoriale, que certains appellent « bibliodiversité ».

En matière d'accès pour les publics, d'immenses progrès ont été accomplis pendant les dernières décennies. Grâce à un investissement considérable des collectivités territoriales, que je souhaite remercier, un très solide réseau de lecture publique a été bâti sur l'ensemble du territoire. Le droit d'auteur a été aménagé dans tous les cas où il devait l'être, comme pour faciliter le prêt des livres par les bibliothèques publiques ou pour favoriser l'adaptation des œuvres pour les personnes handicapées. Nous accompagnons à ce titre les bibliothèques dans leur transition au numérique et je souhaite que nous le fassions encore davantage.

La réussite de la politique du livre et de la lecture tient enfin au fait qu'elle est fondée sur la recherche et le maintien de grands équilibres entre les acteurs qui composent la « chaîne du livre ». La régulation économique comme les principes du droit d'auteur permettent de garantir la qualité des relations entre auteurs et éditeurs, de partager des responsabilités entre éditeurs et libraires, et de proposer la complémentarité de l'action des bibliothèques-médiathèques avec le secteur marchand.

Alors que le secteur se trouve dans une mutation importante liée à l'essor de la vente en ligne, alors que le développement annoncé du livre numérique pourrait modifier radicalement les conditions de l'accès aux œuvres comme leur mode de commercialisation, ces équilibres nous devons aujourd'hui les repenser et les renforcer par la solidarité entre tous les acteurs de la filière. Cette solidarité a jusqu’à aujourd’hui fait la force de l’écosystème du livre. Il faut s’en servir à l’heure du numérique. Elle est l'objet de tous les grands dossiers qui font l'actualité du monde du livre et que je vais passer en revue.

  •  Le contrat d'édition

Le premier de ces dossiers est celui du contrat d'édition pour lequel nous venons de vivre un moment historique. Comme vous le savez, la semaine dernière, les représentants du Syndicat national de l’Edition et du Conseil Permanent des Ecrivains ont signé, rue de Valois, un accord-cadre proposant les grands principes de mutation du contrat d’édition à l’ère numérique. Le Président de la République lui même a tenu à saluer le succès de cette négociation. Ce succès, il faut tout d’abord le mettre au crédit de la volonté d’aboutir des négociateurs - je salue en particulier l'implication personnelle qui a été celle de Marie SELLIER, présidente du Conseil Permanent des Ecrivains, de Vincent MONTAGNE, président du Syndicat national de l'édition -, mais aussi à la finesse, à la détermination et à l’esprit de conciliation du médiateur, Pierre SIRINELLI, que j’avais désigné en septembre dernier. Il me semblait en effet que, si l’Etat ne pouvait se substituer aux acteurs les premiers concernés, il pouvait en revanche être ce tiers de confiance, et jouer un rôle de facilitateur attentif et déterminé à préserver les équilibres.

Afin de restaurer l'équilibre dans la relation entre auteurs et éditeurs, il est apparu qu’il ne fallait en effet pas se limiter à la seule prise en compte de la diffusion numérique des livres dans les règles qui encadrent historiquement les contrats d'édition : après plus de 50 années de pratique, les grands principes posés par le législateur en 1957 méritaient d'être revisités.

Dans tous les pays, l'arrivée du livre numérique a créé des tensions entre auteurs et éditeurs. Qu'il s'agisse des obligations nouvelles de l'éditeur, qu'il s'agisse des modèles économiques et de la répartition de la valeur, les équilibres anciens ont tous été interrogés lors de cette discussion. J'observe avec beaucoup de satisfaction que la France est le premier pays où cette question est réglée au terme d'une vraie négociation interprofessionnelle et nous pouvons en être fiers.

J’espère que les règles nouvelles qui sont proposées dans l’accord-cadre consolideront la relation de confiance nécessaire dans le dialogue entre auteurs et éditeurs. C’est indispensable pour le secteur du livre et il est désormais de ma responsabilité de transformer cet accord-cadre en loi.

  •  Les livres indisponibles

Le deuxième dossier est celui des livres indisponibles. Au moment où éditeurs et auteurs règlent le cadre de leurs relations pour l'avenir, une solution innovante commence à être mise en œuvre, durant ce salon 2013, pour moderniser le cadre de leurs relations passées.

Je veux parler de l'important projet de numérisation des livres devenus indisponibles, c’est à dire de ces livres qui, bien que sous droit, ne font plus l’objet de commercialisation sous forme imprimée. Ce projet, dénommé ReLire, est soutenu par les éditeurs et les auteurs aux côtés de l’État et de la BNF.

Une première liste de 60 000 livres indisponibles qui, sauf opposition des titulaires de droits qui ont, c’est très important, la possibilité de se manifester, entreront dans six mois en gestion collective, a été rendue publique par la Bibliothèque nationale de France le 21 mars sur le site relire.bnf.fr

Je tiens à ce propos à saluer tout particulièrement la remarquable mobilisation de la BNF sur ce projet, notamment pour mettre en place le « corpus » de ces indisponibles, dans des délais contraints.

La création du cadre juridique de la nouvelle exploitation numérique des livres indisponibles, initiée par la loi de mars 2012, est maintenant parachevée. J'ai en effet décidé d'agréer la Sofia pour assurer la gestion collective obligatoire de ces livres indisponibles. J'ai également précisé par arrêté le fonctionnement du comité scientifique chargé de constituer la liste enrichie annuellement.

La question fondamentale, à l’origine de ce projet était la suivante : comment publier au format numérique les livres du XX

 

 siècle devenus indisponibles dans le commerce, alors même que les éditeurs d’origine ne disposent pas des droits numériques de ces œuvres ? Fallait-il rouvrir chaque contrat d’édition, un par un ? Cela aurait représenté un travail de renégociation titanesque, à l’issue bien improbable.

La loi de mars 2012, votée, je le rappelle, à l’unanimité, a permis de relever ce défi en instaurant un dispositif de gestion collective, seul à même de dispenser de renégocier tous les contrats un par un. Ce système de gestion collective, compte tenu du nombre et de la variété des possibilités d'opposition ou de sortie du dispositif qu'elle offre aux auteurs, à leurs ayants-droit ou aux éditeurs d’origine – j’insiste sur ce point car c’est important, les auteurs peuvent s’opposer au système de gestion collective ou sortir du dispositif s’ils le souhaitent, de manière je le crois assez facile, nous y sommes vigilants - garantit le respect des grands principes du droit d’auteur auxquels nous sommes attachés.

Grâce à ce système de gestion collective des droits, et grâce à un soutien substantiel de l’Etat, du ministère de la Culture et de la Communication mais également du Commissariat général à l’Investissement - dont je tiens à saluer aujourd’hui l’implication sans faille à mes côtés - grâce auquel le projet ReLire pourra bénéficier d’un prêt participatif au titre du programme des investissements d’avenir, ce sont à terme près de 235 000 livres indisponibles, sur les 500 000 que l’on dénombre aujourd’hui, qui pourront trouver une nouvelle vie numérique.

Cette initiative permettra de faire converger le droit d'auteur vers la demande de nos concitoyens pour un accès généralisé aux œuvres. Elle favorisera l'essor du livre numérique, filière économique en devenir dans notre pays, en contribuant à un fort accroissement de l'offre légale. Enfin, elle donnera à nouveau l’accès du public à ce patrimoine de plus de 235 000 titres dans un avenir proche.

Je sais, pour ces raisons, que notre initiative est observée avec un grand intérêt en Europe et outre-Atlantique et je suis persuadée qu'elle aura su intéresser Pierre Lescure dans le cadre de sa mission et de son rapport qui est attendu dans quelques semaines.

  •  L'avenir de la librairie

Enfin, je souhaiterais aujourd’hui vous parler de l'avenir de la librairie dont vous savez qu'il me tient particulièrement à cœur, comme à tous ceux qui aiment le livre.

La librairie indépendante, par sa capacité à promouvoir la création et la diversité éditoriale, par le maillage dense qu'elle imprime sur le territoire, constitue un acteur fondamental de l'économie du livre et de l’animation de nos territoires et de nos quartiers. Nous avons tenu à le reconnaître pleinement en redonnant au livre le statut de bien de « première nécessité » qu'il avait au regard de la TVA et qu'on lui avait dénié. Le taux a été ramené à 5,5% dès l'été 2012. C’était l’engagement du candidat François Hollande ; il a été tenu. Et ce taux passera même à 5% au 1er janvier 2014 ; c’est l'engagement du Gouvernement.

Comme la plupart des commerces indépendants de nos centres-villes, les librairies sont aujourd'hui fragilisées. Certes, le commerce électronique séduit nos concitoyens, il offre de nouveaux horizons aux pratiques de consommation et il faut en prendre acte sans céder à la fatalité et au laisser-faire de pratiques qui touchent aux règles de la concurrence. Mais ces évolutions ne sont pas sans risque pour les commerces traditionnels, d’autant plus que la concurrence du commerce électronique n'est pas toujours loyale. Le Président de la République a rappelé la semaine dernière la nécessité d’avoir une équité fiscale ; l'optimisation est au centre des stratégies de certains grands acteurs de l'Internet et nous avons devant nous, comme beaucoup d'autres États car certains paient déjà les conséquences de l’inaction en la matière, un vaste chantier pour créer des règles en la matière qui établissent un cadre de concurrence équilibrée.

Si le réseau des librairies se délite, demain, c'est l'ensemble de l'économie de l'édition qui sera profondément affectée. En outre, le lien social, le rôle d’animation des centres-villes et de prescription que jouent les libraires sont essentiels et indispensables.

C’est pourquoi, depuis le mois de mai dernier, j’ai demandé aux préfets, ainsi qu’au réseau des services déconcentrés de mon ministère, les DRAC, de mener une veille économique sensible et précise sur la situation de chaque librairie du territoire national. Le Gouvernement, dans cette période de grande fragilité, doit être en mesure de réagir le plus vite et le mieux possible aux situations de crise. Cela a pu être fait dans certains cas et la veille doit se poursuivre, même si certaines fermetures récentes, on l’a vu, sont intervenues et sont préjudiciables à l’ensemble de la chaîne.

Aujourd’hui, la rentabilité moyenne des commerces de librairie est en effet parmi la plus faible des commerces de centre-ville. Il convient bien sûr d'améliorer leur compétitivité, sur le moyen terme, la responsabilité en incombe au secteur tout entier. Il convient aussi d’accompagner les libraires dans la transition numérique, car l’avenir, me semble-t-il, est là : chaque libraire doit pouvoir vendre, dans sa librairie ou sur un site internet individuel ou collectif, les livres papier et numériques. C’est un défi qu’il faut relever ensemble. Des solutions existent. Des projets, comme leslibraires.fr ou lalibrairie.com fonctionnent déjà. Il s‘agit aussi de mieux les faire connaître, tant auprès des libraires eux-mêmes que du public. Il s’agit de faire la promotion de ces sites qui n’ont d’autre défaut que d’avoir moins de moyens que d’autres acteurs mondialisés pour assurer leur communication et de rendre public leur rôle de prescription et la qualité de ces services.

Ces objectifs ont été ceux qui ont animé la large consultation qui s'est tenue à ma demande durant tout l'hiver, autour de groupes de travail qui ont réuni les différents acteurs de la librairie, de l’édition, des représentants des collectivités territoriales et des administrations.

De multiples propositions ont émergé de ces travaux, certaines peuvent être mises en œuvre, d'autres nécessitent des réflexions plus poussées qui seront poursuivies pour être finalisées.

J'ai d'ores et déjà proposé au Président de la République et au Premier Ministre de mettre en œuvre dès maintenant quatre mesures opérationnelles.

Nous savons que les librairies rencontrent des difficultés de plus en plus grandes pour accéder aux crédits en trésorerie, pourtant nécessaires au bon fonctionnement de leur activité. Ceci est dû à la fois au resserrement général de l’accès au crédit par un secteur bancaire trop frileux dans le contexte de crise que nous connaissons et, peut-être également, à une prudence encore accrue envers les librairies, dont chacun connaît la situation fragilisée.

Pour répondre à ce besoin urgent, je souhaite instaurer au plus vite un fonds d'avance de trésorerie dédié aux librairies. Je souhaite que ce fonds dédié aux librairies, doté de 5M d’euros de fonds publics, puisse être placé sous la responsabilité de l'Institut pour le financement des industries culturelles, l’IFCIC, qui a démontré sa compétence en matière de soutien similaire au secteur culturel. Ce seul fond aura ainsi des capacités d’action triplées par rapport aux aides apportées jusque là par l’Etat, via son opérateur le Centre National du Livre. J’aurai à cœur que l’IFCIC, pour mener à bien sa mission, s’entoure de l’ensemble des expertises détaillées dans le secteur de la librairie et puisse proposer des réponses réactives aux demandes des libraires.

Par ailleurs, au moment où plusieurs groupes de commerces culturels sont amenés à redéfinir leur modèle et leur stratégie et, au moment où, pour beaucoup de propriétaires des librairies des grandes et moyennes villes de France, le temps du passage de relais est arrivé, il convient de renforcer significativement les dispositifs existants pour l'aide à la transmission des fonds de librairies.

Il y a quelques années, cette mission essentielle à été confiée par le ministère de la Culture à l'Association pour le développement de la librairie de création, l’ADELC, dans laquelle sont regroupés de nombreux éditeurs. Le fonds que gère l’ADELC depuis cette date remplit pleinement son objectif : il a facilité la transmission de dizaines de librairies, leurs repreneurs bénéficiant de l'accompagnement attentif des équipes de l'ADELC dans leurs montages financiers et dans les débuts de leur gestion. Je souhaite ici dire toute ma reconnaissance pour cette association dont l'action est discrète mais déterminante. L'ADELC représente à mes yeux la conscience vive de l'édition vis-à-vis de la librairie. Elle est l'expression la plus accomplie de la nécessaire solidarité qui doit animer la « chaîne du livre ». Forte de ce succès, je mobiliserai 4M d’euros complémentaires en faveur de l’ADELC : c’est ainsi plus d’un doublement des capacités de l’accompagnement à la reprise des librairies qui sera mis en œuvre.

Je souhaite aussi vous annoncer ma décision de mettre en place un médiateur du livre. C'est une demande ancienne qui n'avait jamais pu aboutir et à laquelle je compte donner corps.

Aujourd'hui, les pratiques observées, notamment sur certains sites de vente en ligne, suscitent des interrogations quant à leur régularité au regard de la loi de 1981. Cependant, engager des procédures judiciaires reste une solution lourde et incertaine pour beaucoup de libraires indépendants ou d’éditeurs. Par ailleurs, la loi de 2011 sur le prix unique du livre numérique doit maintenant trouver ses marques. Là encore, il convient pour le secteur de favoriser de manière souple le développement de bonnes pratiques plutôt que d’avoir recours systématiquement au juge. Plus que jamais apparaît l'utilité d'une autorité intermédiaire pouvant être saisie facilement et faciliter la conciliation des litiges.

Ce médiateur du livre sera institué en tant qu'autorité administrative indépendante par la loi, afin de le doter de l'autorité nécessaire à l'accomplissement de ses missions. Il aura à connaître des litiges portant sur l'application des lois de 1981 et 2011 relatives au prix du livre papier et numérique et la conciliation des litiges portant sur l'activité éditoriale des éditeurs publics, qui est actuellement confiée à la médiatrice de l'édition publique, sera donc intégrée dans le champ de ses compétences. Son rôle consistera à organiser la conciliation et à inciter les parties à trouver un accord dans des termes qui sont conformes à la loi. En cas d'échec de la conciliation, il aura la capacité de saisir les juridictions compétentes.

Je conçois le rôle du médiateur comme celui d'une entité structurante qui permettra de faire émerger et généraliser des bonnes pratiques pour le secteur. Je veillerai à ce que la personnalité que j'investirai de cette mission puisse la mener à bien.

Dans le même esprit de renforcement de l’effectivité des lois de 1981 et 2011 relatives au prix unique, je souhaite, enfin, pouvoir doter des agents de mes services, dûment habilités, du pouvoir de constater les infractions aux lois de 1981 et 2011 sur le prix unique afin d’y remédier le plus rapidement possible. Ces agents pourront ainsi, de manière complémentaire, fournir au médiateur les informations dont il aura besoin.

Avec ces premières mesures importantes, l’Etat montre son engagement à soutenir efficacement les librairies. Les autres propositions, et je sais que la perspective, qui me tient à cœur, de constitution d’un fonds complémentaire dédié aux librairies à été longuement évoquée, nécessitent que le travail commun se poursuive. Le Président de la République, qui s'est exprimé la semaine passée, a fixé les lignes et l'esprit de ce travail. Avec votre mobilisation à tous, je suis convaincue qu’il peut être mené dans les prochaines semaines, et pourrait déboucher sur de nouvelles décisions d’ici l’été, si vous tous, éditeurs, diffuseurs, distributeurs, libraires, témoignez du sens de la responsabilité qui ne vous a jamais fait défaut jusqu’à présent et de votre implication dans un projet partagé concernant l'ensemble de la chaîne du livre. Les acteurs de la filière seront ainsi au cœur des réflexions, mais aussi de la mise en œuvre des mesures à venir.

La question de la répartition de la valeur entre acteurs de l’ensemble de la filière, y compris acteurs majeurs de la vente en ligne doit pouvoir servir de fil conducteur aux futures réflexions. L’efficacité de l’ensemble des instruments doit pouvoir être interrogée ; ce sera ainsi le cas, s’agissant de l’Etat, des aides en faveur de la librairie du Centre National du Livre. C’est le sens de la lettre de mission que j’adresse à tous les responsables d’établissement public et que j’adresserai cette semaine au président du CNL, avec notamment un objectif de soutien accru à la librairie.

C’est en tout cas dans cette perspective que je souhaite poursuivre avec détermination le travail. Préserver la diversité éditoriale, la bibliodiversité, c'est aussi préserver un tissu dense et équilibré de librairies de qualité sur tout le territoire, pour qu'il ne nous arrive pas ce qui est arrivé aux Etats-Unis, l’effondrement des chaînes de librairies et la difficulté de nombreux éditeurs. Je pense donc qu'un nouveau mécanisme de soutien aux librairies doit être imaginé à cet effet, pour donner à ce maillon indispensable de la chaîne du livre et de la vie citoyenne de nos territoires toutes ses chances de préserver toute sa diversité, avec toute la pertinence et l’amour que nous portons à nos librairies, à l'image par exemple de ce que nous avons su faire pour la diversité du réseau de distribution du cinéma en France, qui va des salles Art et Essai aux multiplexes, dans une cohabitation qui permet à un public nombreux de fréquenter les salles tout en étant garante de la diversité de notre cinéma.

Je voudrais évoquer la situation politique et sa responsabilité particulière à l’égard du secteur du livre. Le livre et la lecture sont essentiels, ce n’est pas un secteur culturel comme un autre car il nourrit les réflexions qui nous constituent en tant que citoyen, en tant qu’individu ; il nous éclaire et nous permet de remettre en cause nos certitudes, il est le support de nos doutes, de nos forces, de notre énergie et de nos envies. Il permet un partage plus juste de nos valeurs humanistes. Une société qui abandonnerait cette mission, surtout la France, pays des droits d’auteur et des droits de l’homme, serait livrée aux plus bas instincts.

L’objectif de notre action commune est bien de soutenir la rentabilité des librairies et d’en préserver le réseau, car la bonne santé de celui-ci participe de l’attractivité de nos territoires et demeure indispensable aux équilibres de l’ensemble de la filière du livre. Préserver la chaîne du livre, c’est préserver un maillon indispensable pour la créativité de notre pays.

Je vous remercie