Messieurs et Mesdames les préfets,
Je suis heureuse de vous rencontrer aujourd’hui –en cette fin d’année, 6 mois après ma prise de fonction- pour vous exprimer mes remerciements et mes attentes.
Mes remerciements tout d’abord.
Je connais votre engagement personnel, celui de vos services, Sgar, secrétaires généraux, sous préfets, délégués à la ville, sur les enjeux culturels si nombreux, parfois complexes et toujours importants, dans vos territoires. Vous êtes bien placés pour savoir que la culture n’est pas du tout un enjeu secondaire, la cerise sur le gâteau, mais une politique publique vis-à-vis de laquelle les attentes sont très fortes, que ce soit celles des élus, des professionnels et des populations.
En cette période de forts ajustements budgétaires, ces attentes se mêlent d’inquiétudes et de tensions dont vous êtes les premiers témoins ou destinataires. Compte tenu des effets induits des politiques de soutien à l’art et à la culture (effets économiques, sociaux, éducatifs) il nous faut apporter à ces questionnements une attention et des réponses en replaçant ces enjeux dans des perspectives qui relient la culture à l’ensemble des politiques publiques dans une dimension interministérielle, sans oublier de les inscrire dans le cadre des priorités requises pour la mobilisation de fonds structurels européens.
Avant d’aborder différents sujets de politiques culturelles à propos desquels j’aimerais ensuite échanger avec vous, permettez-moi de souligner en introduction le cadre dans lequel je souhaite placer la mise en œuvre des politiques publiques de la Culture.
Ma vision est celle de la Culture comme un espace public, un espace de partage, d’échange, aussi bien physique que virtuel et symbolique. Aller voir un film dans une salle, une représentation dans un théâtre, un concert dans un festival ou lire dans une bibliothèque c’est aller à la rencontre d’autres mondes, d’autres gens, se risquer à vivre ensemble la rencontre avec l’art et le patrimoine. Le numérique est dores et déjà un espace qui démultiplie ces interactions et que nous devons mieux identifier comme un espace créatif et culturel.
La Culture, c’est aussi un enjeu revendiqué par les collectivités car on ne peut pas redynamiser un territoire sans y inscrire ou y accueillir des initiatives culturelles fortes qui contribuent à l’attractivité et suscitent l’activité économique de surcroit.
C’est pourquoi la culture peut avoir un effet déterminant face à la crise économique et sociale, voire morale que traverse notre pays : contribuer à la préservation du lien social. Plus le lien social risque d’être remis en question, plus la culture a un rôle à jouer. La précarisation et la pauvreté écartent encore plus certaines parties de la population de l’offre culturelle. Ce constat doit nous inciter à plus de volontarisme encore pour préserver un égal accès de tous à la Culture. C’est dans cet esprit que j’ai fait des propositions pour que la Culture contribue au plan de lutte contre l’exclusion. Car la Culture ouvre un espace public, contribue à apaiser les tensions, à rendre confiance dans le lien social. Dans ce contexte, nous devons porter une attention spécifique à la jeunesse, particulièrement touchée par la crise, et parce qu’elle est l’avenir de notre pays. C’est le sens des propositions que je porte pour le Conseil Interministériel de la Jeunesse que le Président de la République réunira en mars.
Je souhaite sur ce point insister sur le nécessaire engagement du secteur culturel dans le combat du gouvernement pour l’emploi et particulièrement pour l’emploi des jeunes.
L'ensemble des secteurs sont sollicités pour contribuer à la lutte contre le chômage des jeunes, et le secteur culturel ne s'y dérobera pas. J’ai décidé d'ouvrir la possibilité de recruter des jeunes en emplois d'avenir dans les établissements nationaux sous tutelle du ministère de la Culture et de la Communication. Je vous remercie pour votre mobilisation.
Le patrimoine comme repère, les infrastructures culturelles, les festivals, expositions, sont autant de leviers qui contribuent à la qualité de vie et à l’attractivité des bassins d’emploi. La qualité du tissu culturel que ce soit dans le secteur de la création ou des patrimoines ainsi que les Industries Culturelles passe par un certain nombre de normes, contraignantes mais indispensables et qui à long terme ne sont pas contradictoires avec le développement économique. Les préfets des régions de Provence-Alpes-Côte-D’azur et du Nord-Pas de Calais le savent bien, eux qui ont été comme moi frappés par le foisonnement des manifestations programmées pour Marseille Provence 2013 ou plus récemment encore par la force du message d’espoir que constitue la présentation des collections nationales du Louvre à Lens.
Lors du comité ministériel réuni à propos de Marseille, l’un des espoirs a été la qualité des manifestations de Marseille Provence 2013, et leur capacité à recréer du lien avec les quartiers. A l’image des capitales européennes de la culture Lille, de Marseille mais aussi de Lens, aucun territoire ne doit être pour la culture terra incognita, le succès des 3 premiers jours d’ouverture du musée du Louvre/Lens, 36.000 visiteurs est un beau signal.
Cet enjeu de l’aménagement culturel du territoire –prenant le contrepied d’une vison centralisatrice de la culture qui a pu être encore dominante 50 ans après la création du ministère- doit être au cœur de la nouvelle étape de la décentralisation et de la rénovation des relations entre l’Etat et les collectivités territoriales, point sur lequel je souhaite insister.
Je ne souhaite pas de nouveau transfert de compétences ou de charges vers les collectivités qui d’ailleurs ne sont pas demandeuses. La Culture est un domaine où l’intervention de l’Etat a du sens, car le patrimoine, c’est l’histoire, celle de la nation, celle qui lorsque on peut la comprendre et continuer de suivre les traces permet de se projeter dans l’avenir. Ma conviction est qu’il est nécessaire de sortir d’une sorte de méfiance réciproque entre l’Etat et les collectivités territoriales.
C’est pourquoi je souhaite que le MCC soit en mesure d’anticiper sur les orientations portées par Marylise Lebranchu, que l’Etat-culture soit précurseur et expérimentateur, qu’il contribue à consolider le dialogue et les modalités de partage de la compétence générale culturelle. C’est pourquoi j’ai réuni dès le 2 juillet dernier le CCTDC, à qui j’ai demandé de me faire des propositions pour faire évoluer son rôle et ses modalités d’action. Un projet de charte a été rédigé avec les 11 associations représentatives des CT et sera discuté ce 19 décembre lors de la deuxième séance du CCTDC.
L’une des décisions que je souhaite valider concerne la création dans chaque territoire régional d’une conférence territoriale pour la Culture en veillant à organiser le chef de file de façon pragmatique. Je sais que vous êtes déjà très sollicités par les départements ministériels qui ont des démarches de territorialisation des instances de dialogue. Pour la culture, la poursuite et la rénovation de ce dialogue ancien mais trop parcellisé sera essentielle : les conférences régionales du Spectacle Vivant ont montré leur limites, c’est l’ensemble du champ culturel qui doit maintenant faire l’objet d’une concertation territoriale. Ceci peut être construit de façon cohérente avec la dynamique nationale et avec la gouvernance locale envisagée dans le projet de loi Décentralisation qui va permettre des marges d’initiative et de rénovation. Ce mouvement doit être mené de façon souple et je vous propose de faire de l’année 2013 une année test, en demandant aux directeurs régionaux des affaires culturelles de nous faire de propositions afin d’organiser ces conférences territoriales de façon pragmatique autour des grandes priorités du mandat. Les directeurs régionaux des affaires culturelles, sous votre autorité, pourront ainsi mieux jouer leur rôle de tiers garant et tiers médian.
C’est dans cet esprit que j’ai souhaité que le Conseil des Collectivités Territoriales pour le Développement Culturel soit, en amont du futur Haut Conseil des CT, une instance devant laquelle seront présentés tous les textes ayant une incidence sur les relations entre l’Etat et les territoires, c’est notamment le cas des textes d’ordre législatif en préparation
Privilégier le dialogue, cela ne signifie pas pour autant l’effacement de l’Etat bien au contraire.
Je suis convaincue de l’importance de la présence de l’Etat sur les territoires, un Etat accompagnateur, expert mais non prescripteur, un Etat garant du dialogue et de la co-construction des politiques publiques. Ceci permettra aussi d’éviter le doublon, de rationaliser l’utilisation de fonds publics, de refuser le saupoudrage. Je souhaite aussi que l’Etat soit garant de l’exigence qui n’en pas contradictoire avec les démarches d’aménagement du territoire.
C’est pourquoi l’engagement des directeurs régionaux des affaires culturelles est essentiel, plus que jamais, je le dis aux agents lorsque je vais à leur rencontre lors de mes déplacements : ils sont le visage, la parole et la main de mon Ministère en région. Vous devez pouvoir, préfets de département et préfets de région vous appuyer sur eux. Je sais que les équipes ont réussi à s’adapter à de nombreux et difficiles changements de mode de gestion notamment sur les processus comptables malgré les transferts d’emplois et des tensions sur les effectifs.
C’est pourquoi, et là aussi c’est un signal fort que je souhaite donner, j’ai fait le choix de préserver globalement les emplois en Drac. Ceci ne veut pas dire bien sûr qu’il n’y aura pas des réajustements à effectuer. Mais, il s’agit autant que possible :
- de veiller à diminuer la vacance des postes dans les régions jugées peu attractives, et où pourtant les enjeux de démocratisation culturelle sont bien présents ;
- de travailler conjointement avec vous au remplacement des directeurs régionaux des affaires culturelles, qui seront nombreux à prendre leurs retraites dans les prochains mois. A ce titre, nous nous efforçons d’anticiper, d’accompagner ces mouvements, et de vous associer aux choix comme le prévoient les textes. Sur ces postes, j’ai demandé à mon secrétaire général de favoriser la mobilité de fonctionnaires de l’administration centrale du ministère de la Culture et de la Communication car je veux valoriser la capacité à occuper des postes territoriaux, mais aussi, de pouvoir accueillir par exemple des directeurs d’affaires culturelles des grandes collectivités.
S’agissant du rôle que je souhaite donner à mes services déconcentrés, je suis convaincue que la modernisation de l’action publique doit être l’occasion de mieux les valoriser, de les inscrire dans une dimension interministérielle, et de mieux les articuler aux services centraux et aux EPN. Je souhaite saisir l’occasion des travaux en cours dans le cadre de la modernisation de l’action publique pour aller plus avant dans la déconcentration des crédits mais aussi en matière de gouvernance territoriale, selon les conclusions des travaux du groupe de travail sur les services territoriaux auquel certains d’entre vous contribuent.
Nous proposerons en début d’année prochaine des mesures fondées sur la volonté d’améliorer l’action de l’administration culturelle territoriale (mutualisation, mobilité, réactivité) et des pistes permettant de mieux utiliser les outils de pilotage (Directive Nationale d’Orientation, Plan d’Action Stratégique de l’Etat, Contrat de Plan Etat Régions)
Ce pilotage et la qualité du dialogue local seront indispensables pour affronter une période difficile qui appelle des choix clairs :
- Dès 2013 mes choix budgétaires sont clairs : j’ai choisi de maintenir globalement une capacité d’intervention sur les territoires. Pour autant, j’ai été contrainte de faire des choix parfois difficiles, des choix guidés par les principes suivants :
Tous les investissements non financés ont été annulés ou, pour ceux dont la logique territoriale était avérée, reportés.
On ne peut plus en effet s’en tenir aujourd’hui à une reconduction à l’identique d’année en année… Certaines de ces décisions nécessitent encore des ajustements et des discussions que vous aurez à conduire ou à valider en tant qu’ordonnateurs, je vous en remercie par avance.
- Sur le plan budgétaire toujours, les conférences de dialogue de gestion qui se sont tenues de mi-octobre à mi-novembre -avec dans un certain nombre de cas la présence des Sgar témoignant de la mobilisation de vos services et de crédits hors culture sur ces enjeux- ont permis de notifier les crédits 2013 la semaine dernière, A ce titre, je vous demande dés le début de l’année de veiller à une extrême vigilance dans l’engagement et la gestion de la dépense afin de consolider la crédibilité de nos positions dans la discussion budgétaire pour 2014 et les années suivantes.
Ce sera notamment indispensable pour la programmation des crédits de travaux sur les MH car pour sauver nos capacités d’engagement malgré le surgel intervenu en fin d’année, j’ai proposé de différer et de reporter à 2014 50 M€, ce qui oblige à une grande attention à la consommation de ces crédits dès l'ouverture de la gestion.
Je souhaite attirer votre attention plus particulièrement sur les chantiers suivants:
- sur les patrimoines : Nous allons mettre en discussion une grande loi sur les patrimoines.
Fortement mis à contribution dans le cadre du nécessaire rétablissement des finances publiques, le patrimoine n’en demeure pas moins une priorité de mon action. Après l’inauguration du Louvre Lens il y a quelques jours, les deux années à venir marqueront l’achèvement et l’ouverture au public de grandes réalisations telles que le centre des Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine, le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée à Marseille qui sera un des fleurons de Marseille Provence 2013. Je souhaite que ces belles réalisations connaissent le plus grand succès, mais j’ai la conviction que la politique publique en matière de patrimoine ne pourra plus, à l’avenir, se limiter à un catalogue de «grands projets».
Il existe, dans le domaine du patrimoine, une attente forte de nos concitoyens, parce qu’il s’agit de la pratique culturelle la plus accessible et la plus démocratique : les 12 millions de visiteurs annuels des journées du patrimoine en attestent. L’Etat doit être présent pour répondre à cette attente. Il dispose pour ce faire, vous le savez, de législations protectrices sur le patrimoine bâti, sur les musées ou encore sur l’archéologie préventive, même si ces textes ont subi depuis quelques années quelques modifications tendant à affaiblir leur portée. Je vous demande de veiller tout particulièrement à leur bonne application et de faire un effort pédagogique constant vis-à-vis des élus pour expliquer la nécessité de ces protections.
Le projet de loi sur le patrimoine en cours d’élaboration au sein de mes services vise, en réalité, à donner à ce domaine la visibilité politique qu’il mérite et qui correspond à l’attente des Françaises et des Français. Le patrimoine représente, pour notre pays, un secteur d’avenir : bon nombre de collectivités, vous le savez, l’ont déjà compris. Le projet de loi modernisera les dispositifs de protection –qui sont des garanties et pas des entraves- et veillera à leur meilleure articulation avec ces domaines voisins que sont le droit de l’urbanisme et le droit de l’environnement. C’est indispensable de prendre des dispositions pour lever le couperet de la date de 2015 pour les AVAP faut de quoi il y aura un vide juridique, on y travaillera bien entendu avec les autres départements ministériels concernés. C’est donc dans un chantier de fond, porteur de sens, que je souhaite à présent engager mon ministère en matière de patrimoine.
Sur la création, le Premier ministre a annoncé également qu’une loi d’orientation sur la création artistique serait présentée au parlement dans le courant de l’année 2013.
Outre la consolidation des fondements et instruments de la politique nationale en matière de création artistique, la loi abordera les questions relatives aux grandes responsabilités de l’Etat :
- garantir la liberté de création (responsabilité artistique de soutien à la création et à la diffusion),
- veiller à ce qu’aucun établissement national ou soutenu au titre d’un label puisse s’exonérer de ses obligations en matière d’éducation artistique et culturelles (responsabilité territoriale d'aménagement culturel du territoire et d’accès de tous les publics aux activités culturelles) ;
Dans le contexte de l’ouverture des négociations des annexes 8 et 10 avant fin 2013, une responsabilité professionnelle de formation et de structuration professionnelle et économique du secteur.
Le travail de concertation avec les collectivités territoriales comme avec les professionnels du secteur sera véritablement engagé à l’occasion de la réunion du 19 décembre avec les collectivités territoriales et le 20 décembre lors de la réunion du Conseil Supérieur du spectacle vivant qui sera suivi également de réunions dans le domaine des arts plastiques ; ces questions devront évidemment être relayées au niveau des conférences territoriales comme elles le seront au niveau interministériel.
Vous le savez les instruments de l’action publique doivent également s’inscrire davantage dans les enjeux de notre société pour mieux refléter la diversité culturelle et sociale comme en matière de parité, de nos territoires en Europe.
Nous aurons l’occasion de préciser ces questions dans les prochains mois et notamment dans le cadre de la préparation de la loi d’orientation mais j’attire d’ores et déjà votre attention sur un point relatif à la diversité culturelle. Nous sommes en effet les garants de cette diversité quand nous permettons à des artistes étrangers de se produire sur nos scènes et dans nos festivals et nous le savons c’est toute la chaine administrative qui souvent le permet.
Sur les Industries culturelles, comme vous le savez, j’ai confié à Pierre Lescure une mission de redéfinition des instruments de l’exception culturelle à l’ère numérique. La culture, même –ou surtout– à l’ère numérique, reste un bien qui n’est pas comme les autres. J’ai souhaité que la mission tienne compte, bien entendu, du contexte européen et international, mais aussi de l’échelle territoriale. Le numérique n’est pas désincarné, il s’inscrit dans une réalité, notamment dans une réalité locale. C’est pourquoi plusieurs déplacements en région ont été organisés –à Rennes, à Marseille, à Aix et à Bordeaux- afin que la mission puisse faire vivre le débat en région, dialoguer avec des interlocuteurs hors de Paris, qu’il s’agisse d’acteurs des industries culturelles mais aussi de professeurs, d’étudiants, du grand public.
Parallèlement à cette mission qui doit s’achever en mars 2013, beaucoup de chantiers sont en cours. Je souhaite notamment ouvrir la réflexion sur la question de l’offre culturelle institutionnelle sur internet. L’espace numérique est aussi un espace public, dans lequel l’action de l’Etat doit mieux se déployer. Je mobilise mon Ministère et les institutions culturelles afin qu’ils s’engagent dans cette voie, toujours dans une dimension interministérielle et territoriale.
Ces chantiers sont d’autant plus importantes à mener qu’actuellement la chaine du livre et notamment les librairies sont menacées ou perturbées, dans une économie où leur marge sont considérablement réduites. J’ai lancé en juin des groupes de travail avec les professionnels et demandé des rapports qui viennent d’être remis, mon objectif est de favoriser les mutations nécessaires au maintien de librairies de qualité en centre ville. Je remercie ceux d’entre vous qui se sont engagés pour le sauvetage ou la reprise de librairies –l’exemple de la librairie Grangier à Dijon doit nous motiver- dont l’offre aurait sinon été reprise par le commerce en ligne, au détriment de la proximité et des emplois.
Aussi symboliques soient ils, ces chantiers seraient incomplets sans l’ambition que le président de la république a érigée en grand chantier du mandat, je veux parler de l’éducation artistique et culturelle.
C’est un enjeu simple à définir et difficile à réussir : aujourd’hui seuls 20% des élèves bénéficient de parcours d’éducation artistique. Or il ne suffit pas de construire, de rénover des institutions culturelles aussi belles soient elles si on ne se préoccupe pas de construire le chemin d’accès à ces richesses, dès la rentrée 2013 Vincent Peillon et moi allons ensemble mobiliser nos deux ministères pour aller vers la généralisation de l’EAC. Pour les jeunes de notre pays quelque soit leur lieu de vie, leur milieu social, leur niveau d’études, la culture est un droit, et l’art un bien commun, dont il leur faut les clés d’accès. Il y a là une exigence démocratique majeure que je porte conjointement avec Vincent Peillon, car la refondation de l’école a assigné sa place, dans le socle, à l’éducation à l’art, avec l’annonce d’un parcours d’éducation artistique et culturelle pour tous les jeunes, de la maternelle à l’université. Autant dire qu’il s’agit là d’une ambition interministérielle majeure –que je partage avec plusieurs des collègues que vous avez entendus ce matin, je pense en particulier à Valérie Fourneyron mais aussi aux ministres de l’Enseignement supérieur et de la recherche, au ministre de l’Agriculture- mais aussi d’une responsabilité partagée avec les Collectivités Territoriales qui d’ores et déjà sont très souvent impliquées au premier chef dans des dispositifs sur leurs territoires.
C’est pourquoi j’ai installé une consultation nationale présidée par un écrivain, Marie Desplechin, qui vient d’achever ses travaux afin de compléter et d’approfondir les questions posées dans le cadre de la concertation préalable à la refondation. Avec l’ensemble des ministères concernés dont les services déconcentrés sont aussi sous votre autorité, j’ai voulu que des élus y participent et j’ai demandé que cette consultation, tenue dans des délais rapides afin de rester en phase avec le calendrier de rédaction de la loi sur l’école, me fasse de propositions d’action susceptible d’être mises en œuvre dès la rentrée scolaire 2013, en partant de ce qui existe sur les territoires et en procédant par extension progressive.
Avec Vincent Peillon, nous réunirons les Recteurs et les directeurs régionaux des affaires culturelles début février pour leur présenter les orientations issues de cette concertation en leur demandant de réunir rapidement l’instance territoriale de dialogue et de suivi de l’EAC. Nous voulons signer au printemps des contrats territoriaux. En effet de nombreuses initiatives souvent exemplaires existent en la matière, elles ne sont pas assez visibles, ni cohérentes et ces initiatives ne garantissent pas que sur un même territoire les pièces du puzzle se joignent. Or le territoire et les temps de vie des jeunes ne peuvent être morcelés. Il nous faut de la cohérence et du volontarisme pour que cette ambition soit aussi celle de l’équité territoriale.
Dans chacun de mes déplacements, j’essaie d’ores et déjà, comme le savent un certain nombre d’entre vous ; et j’essaierai de m’attacher encore plus en 2013 à prévoir une séquence spécifiquement consacrée aux bonnes pratiques en matière d’EAC. J’ai demandé aux directions régionales des affaires culturelles d’y travailler et de me transmettre leurs suggestions. Je sais pouvoir compter sur votre appui pour réussir ce tour de France de l’Education artistique et culturelle.
N'oublions pas enfin et pour conclure le rôle, à mon sens déterminant, que joue -pour l'accès à la culture et pour la cohésion sociale de notre pays- notre langue commune qui doit être aussi un espace partagé, le français, "notre bien commun", pour reprendre l'expression du Premier ministre dans la préface du Rapport au Parlement sur l'emploi de la langue française. J’ai proposé la mise en place d’une commission qui va préparer les conditions de la ratification de la Charte européenne des langues régionales. Puis-je vous suggérer de consacrer chaque année un moment à la présentation, à vos différents services, des enseignements qui peuvent être tirés de ce rapport annuel ? Vous y constaterez que c'est dans une perspective ouverte, et respectueuse de la pluralité des langues parlées en France, que nous défendons son usage. Mais qu'il convient de le faire avec résolution, pour préserver la diversité des regards sur le monde.
Sur l’ensemble de ces questions, Messieurs et Mesdames les préfets, je vous remercie de votre implication et serai ravie de pouvoir échanger avec vous.
Permettez-moi enfin de profiter de l’occasion qui m’est aujourd’hui ici donnée chez vous Place Beauvau de vous remercier pour la qualité du travail de préparation et la qualité de votre accueil lors de mes déplacements.