Monsieur le Préfet, cher Michel Lalande,
Monsieur le Maire, cher Philippe Augier,
Monsieur le Président de la FNCF, cher Jean Labé,
Monsieur le Président du CNC, cher Eric Garandeau,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureuse de vous retrouver ce soir pour le 67ème Congrès de la Fédération Nationale des Cinémas Français. De surcroît à Deauville, ville amoureuse du cinéma !
Vous voilà, nous voilà tous réunis lors de ces quatre jours dans un objectif commun : discuter, échanger, anticiper pour continuer de créer les meilleures conditions possibles à l’exposition des films en salles ainsi qu’à l’accueil des spectateurs.
Après une année 2011 exceptionnelle avec plus de 216 millions d’entrées, et une hausse continue de la fréquentation depuis 2003, les sept premiers mois de l’année 2012 révèlent une légère augmentation des entrées avec plus de 118 millions de spectateurs.
Pour autant, le mois d’août est en repli et ces statistiques peuvent masquer des situations très contrastées d’un établissement à un autre.
J’observe néanmoins que ces résultats sont tendanciellement à la hausse depuis 2002, avec +13% d’entrées moyennes par écran. Ces chiffres sont en soi très encourageants.
Avec une part de marché des films français de l’ordre de 35 à 45% selon les années depuis 2003 soit entre 60 et 88 millions d’entrées, ces données soulignent même la vitalité de ces films et l’intérêt du public pour le cinéma français, là où beaucoup de nos voisins européens constatent une décroissance voire une disparition progressive de leur cinématographie…
Les bons résultats du cinéma français sont le fruit de la conjonction de tous les professionnels qui interviennent dans la fabrication d’un film : auteurs, réalisateurs, producteurs, distributeurs, techniciens, télévisions, Sofica, établissements financiers, exploitants, ADRC, etc.
Avec dans cet ensemble un exploitant qui est au contact direct du public, qui est à l’écoute de ses attentes et qui y répond au quotidien.
Je souhaite ce soir, saluer l’investissement plus particulier de chaque exploitant qui quotidiennement est animé par le souci de rendre les salles accueillantes et confortables, d’exposer au mieux les œuvres que les distributeurs leur confient, et de créer du lien avec les spectateurs.
Vous vous êtes en effet engagés dans la numérisation de vos équipements, à un rythme plus rapide que nous ne le prévoyions, et, je tiens à le souligner avec le concours actif des distributeurs, des collectivités et du CNC : ainsi, à fin août, 84% des écrans français sont numérisés.
C’est parce que je mesure les efforts qui sont les vôtres, et votre rôle en faveur du cinéma mais aussi dans l’animation de nos campagnes et de nos villes, que je souhaite vous annoncer les choses suivantes :
- premièrement, j’ai demandé au CNC de préparer un arrêté accroissant les taux de retour du soutien automatique de 6% en moyenne pour 2013.
J’ai souhaité cette avancée alors même que nous sommes à un moment de fortes incertitudes sur certaines de nos recettes. Comme vous le savez, la TSTD est actuellement débattue avec Bruxelles.
Ces incertitudes ne permettent pas d’aller plus loin, mais je vous le dis ici fermement ; la question pourra être, devra être réexaminée à des moments plus sereins pour le compte de soutien ;
- deuxièmement, parce que c’est un engagement citoyen et parce que d’autres changements s’annoncent avec l’accès des établissements aux personnes handicapées au 1er janvier 2015 - vous en avez d’ailleurs discuté lors de ce Congrès - je confie le soin au CNC d’organiser un groupe de travail sur la mise en place d’un fonds d’aide destiné à financer une partie des travaux d’adaptation nécessaire des cinémas.
Afin d’imaginer ensemble des solutions pour progresser dans cette accessibilité, ce groupe, je le souhaite composé de professionnels, des associations handicap et des collectivités, pour que soient évalués les besoins, les critères, les modalités d’intervention et le coût d’une telle aide.
J’y attacherai une attention toute particulière.
J’ajoute que cette mesure vient en parallèle des annonces réalisées par le CNC en matière d’accès aux œuvres cinématographiques ;
- troisièmement, et parce qu’il s’agit de ne renoncer en aucune manière à certaines actions de la politique de l’Etat favorables au plus grand nombre, auxquelles la réserve en faveur du plan de numérisation étaient dédiées, je veillerai avec le Président du CNC, à la bonne poursuite et finalisation du plan de numérisation des salles…A titre d’exemple, il convient d’ouvrir l’aide Cinenum aux salles saisonnières, rurales et aux circuits itinérants, mais aussi à ce que l’ADRC puisse intervenir en numérique dès ce dernier trimestre de l’année ou encore à ce que l’IFCIC puisse faire bénéficier, d’un taux de garantie majoré, ce qui facilitera l’octroi du crédit d’équipement de l’acquisition de leur matériel numérique, certaines salles indépendantes non encore équipées et non éligibles à l’aide sélective du CNC.
Je souhaite réaffirmer que, malgré des arbitrages budgétaires contraints, l’Etat continuera de rechercher à favoriser la numérisation des œuvres. Ces œuvres du passé sont notre mémoire, elles sont notre culture ; il est de notre devoir de les transmettre à la jeunesse pour qu’elle-même s’en nourrisse.
J’ai donc demandé au CNC qu’il examine dans quelles conditions pouvoir poursuivre cette mission.
De même, dans cette optique qui est la nôtre de la transmission - et je mesure l’engagement qu’a été celui de la FNCF lors de la création du dispositif « Collège au cinéma » - nous poursuivrons en 2013, la numérisation des copies en direction des scolaires.
Cet engagement ne constitue qu’une action alors que j’engage dès l’automne, une réflexion sur l’éducation artistique et culturelle et plus spécifiquement sur l’éducation au cinéma. Je vous invite tous, acteurs dans les territoires, pouvoirs publics, associations, exploitants, artistes, à vous associer avec le ministère de la culture et de la communication et le CNC, à ce formidable projet !
A ce titre, je préciserai mon propos, dans les semaines à venir.
Le compte de soutien est en appui de vos performances, et sa logique à la fois de connexion au marché et de redistribution doit être confortée car elle est un facteur clé de la réussite du cinéma français.
Lors de la préparation de la loi de finances pour 2013, j’ai souhaité protéger le plus résolument possible, le compte de soutien, qui, par la logique des taxes affectées et de leur redistribution, favorise la création, la diversité de nos œuvres et l’émergence de succès publics, qu’il s’agisse du domaine du cinéma ou des autres arts et industries de l’image animée.
J’ai tenu –car c’était essentiel – à ce que le mécanisme du compte de soutien confié dans sa gestion au CNC soit respecté et à ce qu’à partir de 2013, le projet de loi de finances prévoit le désécrêtement de la taxe sur les services de télévision « distributeurs » (TST-D). Le Gouvernement l’a décidé. C'est un signe de l'attachement du Premier Ministre et du Président de la République à un système efficace, vertueux que j'ai tenu avec force à défendre contre toutes les tentations.
De même, il était important de préserver le mécanisme des Sofica créé en 1985 et de reconduire les crédits déconcentrés des DRAC en faveur notamment de l’éducation au cinéma.
Néanmoins, dans un climat de contrainte budgétaire forte et de nécessité de réduire le niveau d’endettement public, et comme tous les grands opérateurs dans le secteur culturel et de la communication de l’Etat et de mon ministère, donc dans un souci de responsabilité, le CNC et par voie de conséquence le secteur cinématographique et de l’image animée, a été appelé lui aussi, à participer à cet effort collectif national : cet effort, vous le savez, prendra la forme d’un ponctionnement exceptionnel, sur les réserves du CNC, à hauteur de 150 M€.
Cette force de conviction, je la mets également au service du Gouvernement pour qu’avec le Premier Ministre, nous puissions continuer de convaincre le Président de la Commission européenne de la vertu de nos systèmes d’aides ouverts aux œuvres européennes. Il ne peut être question de se résoudre, sans combat à l'abandon d'un système vertueux. Il ne peut être question de se cantonner à une vision de court terme sans
se projeter sur ce que sera, ce qui est déjà la diffusion des oeuvres à l'ère numérique. Il s'agit d'inventer aujourd'hui, dans les semaines qui viennent, avec tous les acteurs de la filières, le dispositif qui permette d'associer les diffuseurs à cette mécanique vertueuse, comme l'Etat et le CNC on su le faire avec vous, exploitants de salles.
Enfin, permettez-moi de réaffirmer, plus particulièrement à vous cher Nicolas Seydoux en votre qualité de Président de l’ALPA mais à tous ceux présents ce soir, que la lutte contre le téléchargement illégal reste un objectif fondamental.
Je souhaite que nous l’abordions non pas en termes d’opposition entre les uns et les autres : le cinéma versus le livre et la musique, les internautes versus les créateurs…, mais dans une approche de concertation et d’intérêt général.
Dans l’échange électronique comme dans l’échange matériel, la liberté doit être conciliée avec le droit d’auteur. Et la mission intitulée « culture-acte2 » que j’ai confiée à Pierre Lescure devra produire des conclusions fin mars 2013, qui porteront aussi sur les termes d’une lutte efficace contre les pratiques illégales, établie avec nos partenaires européens et qui tienne compte des attentes et des pratiques sociales.
En conclusion, je ne résiste pas à la tentation d’un petit clin d’œil historique sur les interactions entre la tentation de la réglementation et les initiatives des professionnels.
Eugène Meignen, docteur en droit et conseil du Syndicat français des directeurs de cinémas écrivait en 1919 :
« La question des chapeaux est aujourd’hui solutionnée dans les grands théâtres de Paris : injonction est faite aux dames d’avoir à laisser leurs chapeaux au vestiaire (…) et l’ordonnance de police du 10 août 1908 est (…) explicite : « toute personne dont le chapeau est un obstacle, dit-elle, est tenue de le retirer à la première réquisition.
Pour les cinématographes, des mesures générales de ce genre (…) sont moins nécessaires, les fauteuils étant bien disposés et l’écran étant assez haut placé pour que les spectateurs ne soient pas gênés par les chapeaux des dames ou même des messieurs – car ceux-ci les gardent quelquefois sur leur tête – placés devant eux. »
Au-delà de cette boutade, il y a le rêve cinématographique que vous offrez si bien au public et que Stanley Kubrick décrit parfaitement lorsqu’il déclarait :
« L’écran est un support magique. Il a une force de transmission des émotions et des humeurs avec laquelle aucune autre forme d’art ne peut rivaliser. »