Visites, ateliers, expositions, activités pour le jeune public… le premier Mois de l’Architecture en Île-de-France (1er- 30 juin) a passé haut la main son baptême du feu et sensibilisé tous les publics à l’architecture. Premiers éléments de bilan avec Sibylle Samoyault, architecte et urbaniste de l’État, responsable de l’architecture à la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) d’Île-de-France.

Le Mois de l’Architecture en Île-de-France vient de s’achever. Le contrat est-il rempli au regard des objectifs que la DRAC et ses partenaires ont assignés à l’opération?

Il l’est dans le sens où il s’agissait d’une première édition dont l’objectif était de parler d’architecture et cela a été possible pendant un mois ! Certaines choses pourront bien sûr être améliorées et nous ne pouvons pas encore établir un bilan précis et chiffré, mais nous sommes ravis que les structures aient été si nombreuses à participer à cette opération, plus d’une centaine d’événements ont été programmés. Site internet, partenariat avec le quotidien Métronews, logo... l’ensemble du dispositif a très bien répondu à notre souhait d’organiser une manifestation grand public dont la plupart des événements étaient gratuits.

L’architecture, c’est aussi percevoir comment l’homme capte sa façon d’être dans l’espace, c’est un « ressenti »

Une petite idée néanmoins des événements plébiscités par le public ?

Les visites ont connu un très grand succès. A l’ouverture du site internet, certaines étaient déjà complètes. Je pense aussi aux opérations mises en place par nos partenaires, la Maison de l’architecture en Île-de-France, l’ordre régional des architectes, et l’union des Conseils d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement d’Île-de-France (CAUE) : les CAUE ont ainsi travaillé sur une opération au fil de l’eau pendant tout le mois, L’architecture à la lettre, qui s’est clôturée par une intervention à la Cité de l’architecture et du patrimoine sur des lectures de textes de Le Corbusier et des interventions d’architectes. De son côté, l’ordre des architectes avait monté une opération Un café, un architecte offrant la possibilité à tout un chacun d’obtenir gratuitement un conseil architectural. Une très belle idée. Parallèlement, nous avons organisé de nombreux ateliers pour les enfants.

Il existe en effet une entrée dédiée au jeune public sur le site.

Dès le départ, nous souhaitions travailler sur les champs du jeune public ; c’est un axe fort de notre stratégie. Si un individu a une bonne appréhension de son espace lorsqu’il est enfant, il s’en souviendra une fois adulte. C’est pour cette raison que les connaissances en architecture dès l’école primaire sont essentielles. Dans le cadre des journées du patrimoine, nous soutenons une opération montée par l’union des CAUE, les Enfants du Patrimoine.Les villes labellisées Villes et Pays d’art et d’histoire travaillent aussi sur ce champ de la diffusion auprès du jeune public. Enfin, l’opération Les architectes dans les classes initiée conjointement par la Maison de l’architecture, l’ordre des architectes et les CAUE connaît également un beau succès. La diffusion de l’architecture est d’ailleurs un axe fort de la stratégie pour l’architecture mise en place par Fleur Pellerin.

Un point important de cette stratégie – un processus dont la première étape est arrivée à son terme le 25 juin – est de montrer que l’architecture dialogue avec d’autres secteurs.

Absolument. Cette réflexion a été proposée par la ministre l’année dernière à l’issue des Universités d’été du Conseil national de l’ordre des architectes ; elle faisait suite à un rapport parlementaire spécifique, lequel abordait également la question de la qualité architecturale de manière plus générale. Elle comporte trois axes : sensibiliser (le Mois de l’Architecture en Île-de-France en est une belle illustration) ; mettre la compétence de l’architecte au cœur du dispositif ; enfin innover. La transversalité imprègne ces trois axes, c’est autant celle du champ artistique que celles de la ville, du logement ou du développement durable.

La diffusion de l’architecture est un axe fort de la stratégie pour l’architecture mise en place par Fleur Pellerin

Ce mois de l’architecture est très en phase avec l’actualité, le Conseil de Paris vient de donner son feu vert au projet de tour Triangle, le Conseil d’Etat a rendu une décision qui devrait permettre la reprise des travaux du chantier de la Samaritaine…

En réalité, nous ne voulions pas tant revenir sur cette actualité que parler d’architecture. Or on n’en parle que lorsque celle-ci pose des questions de sociétés. Pourtant, l’architecture est omniprésente dans notre quotidien, nous vivons et travaillons en son sein… est-ce précisément parce qu’elle appartient à notre quotidien que l’on a du mal à l’exprimer ? Les expositions d’architecture sont de ce point de vue très symptomatiques : l’architecture, c’est d’abord des plans, or ceux-ci ne peuvent pas forcément être compris au premier coup d’œil ; du coup, on propose des images de synthèse souvent extrêmement retravaillées, qui ne correspondent pas forcément à la réalité. Résultat : il y un décalage entre l’image et la réalité. Enfin, l’architecture, c’est aussi percevoir comment l’homme capte sa façon d’être dans l’espace, c’est un « ressenti ». Les maquettes parviennent plus facilement à toucher le public. Mais finalement rien de tel que les visites comme l’a démontré ce Mois de l’architecture en Île-de-France.

On ne peut pas dissocier le Mois de l’Architecture de la dynamique propre à l’Île-de-France dans ce domaine.

Il faut d’abord préciser que les mois de l’architecture sont des opérations qui, au niveau national, existent dans d’autres régions avec leur calendrier propre, comme en Languedoc-Roussillon ou dans les Pays de Loire par exemple. Mais c’est la première fois qu’elle avait lieu en Île-de-France. Les architectes d’Île-de-France représentent un tiers de la profession, c’est un poids considérable. Nous avons choisi le mois de juin car c’est à cette époque de l’année qu’ont traditionnellement lieu des manifestations importantes : Les architectes ouvrent leurs portes initiée par l’ordre des architectes, Les Journées d’architecture à vivre qui permettent de visiter des maisons d’architectes avec des architectes. Par ailleurs, beaucoup d’événements ont été spécialement insérés dans le mois : la Maison de l’architecture qui organise un festival du film d’architectes mais aussi un salon du livre d’architecture a ainsi décalé ces événements afin qu’ils puissent se tenir pendant l’opération, certaines structures qui avaient pris en amont connaissance de notre projet, à l’image du MAC/VAL, se sont adaptées, le Centre Pompidou qui n’avait pas besoin d’une publicité particulière sur son exposition Le Corbusier était ravi de nous rejoindre, enfin, la Philharmonie, qui souhaitait absolument participer, a réussi à organiser des visites spécifiques dans des délais très courts. Nous avons vraiment eu de jolies surprises sans parler de l’ouverture au spectacle vivant, avec notamment l’inauguration du Centre des arts et des cultures émergentes, le «  plus petit cirque du monde » à Bagneux ou la participation de la Maréchalerie, le centre d’art contemporain de Sceaux. Nous avons été heureux de pouvoir pleinement associer tous les services de la DRAC à cette dynamique.