Promulguée le 7 juillet 2016, la loi relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP) renforce et pérennise le modèle culturel français. Les principales mesures ont été précisées dans des textes d’application. Décryptage des décrets les plus emblématiques.

Musique : missions du médiateur de la musique

L’article 14 de la loi du 7 juillet 2016 institue un médiateur de la musique. Outre la mise en place d’un code des usages, ce dernier devra favoriser les solutions de conciliation dans les litiges opposant les différents acteurs de la filière musicale.

Le texte d’application : le décret n°2017-338 du 15 mars 2017 relatif au médiateur de la musique précise les modalités de désignation du médiateur de la musique et définit les modalités d’organisation de la procédure de conciliation. Il revient au médiateur de la musique de favoriser toute solution de conciliation, ainsi que la mise en place d’un code des usages. Il peut émettre une recommandation proposant des mesures tendant à mettre fin au litige. Il peut être saisi de toute question ou litige ayant trait à la mise en œuvre de l’un des engagements du protocole d’accord « Pour un développement équitable de la musique en ligne » du 2 octobre 2015. Le médiateur peut également formuler au ministre chargé de la culture toute proposition que lui paraît appeler l’accomplissement de ses missions. Il lui adresse chaque année un rapport, rendu public, sur ses activités. Le médiateur de la musique est nommé pour une durée de trois ans renouvelables. Par décret du 31 mars 2017, Denis Berthomier, conseiller maître à la Cour des comptes, a été nommé médiateur de la musique à compter du 1er avril 2017.

Architecture : label "architecture contemporaine remarquable", réforme du conseil des architectes et dérogations aux règles de construction

L'article 78 de la loi du 7 juillet 2016 lance un nouveau label "architecture contemporaine remarquable".

Le texte d'application : le décret n° 2017-433 du 28 mars 2017 prévoit que le label "Architecture contemporaine remarquable" est attribué aux immeubles, ensembles architecturaux, ouvrages d'art et aménagements faisant antérieurement l'objet du label "Patrimoine du XXe siècle" qui ne sont pas classés ou inscrits au titre des monuments historiques et qui ont moins de cent ans à la date d'entrée en vigueur du présent décret.

Les articles 85 à 87 de la loi du 7 juillet 2016 prévoient une modernisation du conseil  de l’ordre des architectes.

Le texte d’application : le décret n°2017-495 du 6 avril 2017 modernise les règles électorales du conseil de l’ordre des architectes aux niveaux régional et national en introduisant de nouveaux paramètres favorisant la parité et la représentativité des territoires. Ce texte renforce également la lutte contre les fraudes et les signatures illicites en matière de permis de construire et d’aménager, en prévoyant l’obligation pour les architectes de les déclarer auprès du conseil régional dont ils dépendent. Le décret précise également que le silence gardé par l'administration sur les demandes d'inscription au tableau régional déposées auprès des conseils régionaux vaut décision implicite de rejet.

L’article 88 de la loi du 7 juillet 2016 instaure une politique d’expérimentation, communément appelée "permis de faire".

Le texte d’application : le décret n°2017-1044 du 10 mai 2017 prévoit une expérimentation permettant, pour la réalisation d’équipements publics et de logements sociaux, de déroger à certaines règles en vigueur en matière de construction. Le décret fixe les conditions de l’expérimentation et la procédure d’examen des demandes de dérogation. Il porte sur deux premiers champs de dérogation possibles : l’accessibilité et la sécurité incendie. Le Conseil d’Etat a été  saisi d’un autre décret portant sur plusieurs champs de dérogation supplémentaires – réemploi de matériaux, performance énergétique, caractéristiques acoustiques –, au terme de la procédure de consultation du public prévue par la Charte de l’Environnement qui s'est achevée le 9 mai 2017.

Patrimoine : modification des dispositions relatives au patrimoine mondial, aux monuments historiques et aux sites patrimoniaux remarquables et création des six premiers "domaines nationaux"

La loi du 7 juillet 2016 modifie plusieurs dispositions dans le domaine du patrimoine.

Le texte d'application :  le décret n°2017-456 du 29 mars 2017 relatif au patrimoine mondial, aux monuments historiques et aux sites patrimoniaux remarquables définit l'organisation de la Commission nationale du patrimoine et de l'architecture qui intègre et remplace la Commission nationale des monuments historiques, la Commission nationale des secteurs sauvegardés et le Conseil national des parcs et jardins et l'organisation de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture qui remplace les commissions régionales du patrimoine et des sites et les commissions départementales des objets mobiliers ; il modifie la composition du conseil des sites de Corse dans sa formation dite « du patrimoine » ; il précise les outils mis en œuvre par l'Etat et les collectivités territoriales en vue d'assurer la préservation des biens reconnus en tant que biens du patrimoine mondial ; il définit la procédure de création d'un périmètre délimité des abords de monuments historiques et le régime de travaux applicable aux immeubles situés dans ce périmètre ; il précise les modalités d'exercice du droit de préemption de l'Etat en cas d'aliénation d'un immeuble situé dans le périmètre d'un domaine national et définit les modalités de fixation des conditions tarifaires relatives à l'utilisation de l'image des biens appartenant à l'Etat qui constituent de tels domaines. Il détermine la procédure de classement au titre des sites patrimoniaux remarquables, ainsi que le régime de travaux applicable aux immeubles situés dans leur périmètre. Il précise les procédures de classement des ensembles historiques mobiliers et de création des servitudes de maintien dans les lieux. Il procède aux mesures de coordination dans les différents codes concernés par ces matières. 

L’article 75-8° de la loi du 7 juillet 2016 instaure les « domaines nationaux », des sites remarquables présentant « un lien exceptionnel avec l’histoire de la Nation ».

Le texte d’application : le décret n°2017-720 du 2 mai 2017 fixe la liste des six premiers « domaines nationaux » ainsi que des périmètres qui leur sont associés. Cette première liste comprend le domaine de Chambord, le château d’Angers, le Palais du Rhin à Strasbourg, le domaine de Pau, le domaine du Louvre et des Tuileries à Paris, et le Palais de l’Élysée à Paris. Les « domaines nationaux » seront inaliénables, imprescriptibles, et inconstructibles à l’exception des bâtiments et structures nécessaires à leur entretien ou à leur visite, ou s’inscrivant dans un projet de restitution architecturale, de création artistique ou de mise en valeur. Leur conservation et leur restauration devront s’effectuer dans le respect de leur caractère historique, artistique et  paysager.

Cinéma : transparence des comptes, conditions d’exploitation, régime du contrôle et missions d’observation

Les articles 21 et 26 de la loi du 7 juillet 2016 instaurent la transparence dans les comptes de production et d'exploitation des œuvres cinématographiques de longue durée.  

Les textes d’application : dans le prolongement du décret n°2017-40 du 16 janvier 2017, deux accords professionnels, qui établissent, pour la première fois, un format standard de rendu des comptes de production et des comptes d’exploitation, ont été signés le 6 juin 2017 sous l’égide de la ministre de la Culture. Celle-ci les a étendu par arrêté à l’ensemble de la filière. Grâce à ces accords, les ayants droit vont désormais bénéficier d’une restitution, détaillée et régulière, des recettes et des coûts engendrés par la fabrication et la diffusion des films. Ces restitutions vont également être transmises aux partenaires financiers du film, ainsi qu’aux artistes interprètes et aux techniciens. « C’est tout le processus de remontée de recettes qui devient plus sûr, et plus transparent, au bénéfice des créateurs et de tous ceux qui ont participé au financement ou à la fabrication d’un film », a souligné Françoise Nyssen. La loi du 7 juillet 2016 prévoit que le CNC réalisera des audits des comptes de production et d’exploitation, afin d’assurer l’application effective de ces accords.

L’article 93 de la loi du 7 juillet 2016 vise à simplifier les conditions d’exploitation de salles de cinéma, à réformer le régime de contrôle dans le domaine du cinéma et à préciser les missions d’observation du CNC.

Le texte d’application : l’ordonnance n° 2017-762 du 4 mai 2017 modifie la partie législative du code du cinéma et de l’image animée.

- elle simplifie le régime encadrant l’activité des exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques et clarifie en particulier les mécanismes de garantie financière dont bénéficient certains exploitants associés aux formules dites des « cartes illimitées » ;

- elle réforme le régime du contrôle et de sanction des obligations légales et réglementaires dans les domaines du cinéma et de l’image animée. Ainsi, afin de lutter contre la fraude aux aides publiques, les agents de contrôle pourront notamment rechercher des informations auprès de personnes qui ne sont pas soumises à ces obligations ;

- elle précise certaines missions du Centre national du cinéma et de l’image animée notamment en matière d’observation du secteur et de prospective.

Enseignement supérieur : un conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels

L’article 52 de la loi du 7 juillet 2016 institue le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels (CNESERAC). Il s’agit d’une instance de dialogue, de débat et de représentation des établissements d’enseignement supérieur et des structures de recherche relevant du ministère de la Culture.

Le texte d’application : le décret n° 2017-778 du 4 mai 2017 relatif au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels précise les attributions, la composition et le fonctionnement du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels (CNESERAC). L’installation du Conseil sera effective fin 2017-début 2018, au terme des élections des représentants des enseignants, des chercheurs et des étudiants, et après avoir dressé la liste des membres nommés. Il est prévu la tenue de deux conseils pléniers par an, ainsi que des réunions complémentaires, selon les besoins, d’une « section permanente » et de « commissions d’étude spécialisées », à l’instar du CNESER du ministère chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche. Elle permettra de combler l’absence d’instance consultative spécifique pour l’enseignement supérieur et la recherche relevant du ministère de la Culture.

Livre : mesures en faveur des publics handicapés

L’article 33,II de la loi du 7 juillet 2016 concerne la reproduction et représentation par des personnes morales et les établissements ouverts au public en vue d'une consultation par des personnes atteintes d’un ou plusieurs handicaps : déficiences des fonctions motrices, physiques, sensorielles, mentales cognitives ou psychique : liste des personnes morales, agrément de ces personnes, caractéristiques, sélection et condition d'accès aux œuvres.

Bibliothèque

Le texte d'application: Le décret n° 2017-253 du 27 février 2017 est relatif à l'exception au droit d'auteur, aux droits voisins et au droit des producteurs de bases de données en faveur de personnes atteintes d'un handicap. Dans cet esprit, il abroge ou modifie certains articles du code de la propriété intellectuelle, notamment en ce qui concerne les dispositions relatives au contrôle exercé par l'autorité administrative ; les dispositions relatives aux personnes morales et aux établissements ouverts au public mettant en œuvre l'exception ; les dispositions relatives à la Bibliothèque nationale de France, et les dispositions relatives à l'organisme dépositaire des fichiers numériques ayant servi à l'édition d'œuvres imprimées. 

L’Île-de-France, première région à réunir sa commission régionale du patrimoine et de l'architecture

Dans un communiqué du 4 juillet 2017, la direction régionale des affaires culturelles d’Ile-de-France a annoncé que la commission régionale du patrimoine et de l’architecture (CRPA) d’Ile-de-France – la première à être installée en France – s’est réunie le 4 juillet, sous la présidence de Philippe Laurent, maire de Sceaux et président du conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE) des Hauts-de-Seine, en présence de Yannick Imbert, préfet, secrétaire général pour les affaires régionales, et de Nicole Da Costa, directrice régionale des affaires culturelles d’Île-de-France. Créée par la loi « Liberté de création, architecture et patrimoine » du 7 juillet 2016, la CRPA donne notamment des avis sur les demandes et procédures de classement de sites, de monuments historiques et d’objets. Elle vient se substituer aux anciennes CRPS (patrimoine et sites) et CDOM (objets mobiliers). « La politique du patrimoine est l’affaire de tous », a déclaré son président.