Lors de la visite d'Aurélie Filippetti à Toulouse et du lancement de l'opération « un établissement, une œuvre » pour sensibiliser les jeunes à l'art contemporain, rencontre avec un professeur de l’École d’application Bénezet. Avec la danse et des projets pédagogiques pluridisciplinaires, Stéphane Sinner, apprend aux enfants la maîtrise du corps, un nouveau langage. Et le goût du défi. Interview.

Territoires : Extraits de la vidéo

Dans le projet que vous avez réalisé et filmé l'année dernière avec deux classes, l'une de CM1 et l'autre de CLIN (classe d'initiation pour non francophones), vous apprenez aux enfants la démarche artistique du chorégraphe Merce Cunningham, un des pionniers de la danse contemporaine.

Pour faire connaître un artiste comme Cunningham, on fait des liens avec d'autres univers artistiques, la sculpture avec L'Homme qui marche de Giacometti, le dessin avec L'Homme de Vitruve de Léonard de Vinci. On cherche à définir ce que traduit une silhouette, une posture. Puis, l'on poursuit la démarche avec l'intervenant extérieur, en l’occurrence Dylan Crossman, un des danseurs qui a crée et travaillé à New York avec Cunningham pendant les quatre années qui ont précédées sa mort. Nous nous inspirons de l'œuvre du danseur et chorégraphe en reprenant 5 ou 6 passages seulement d'une de ses chorégraphies (Pièces en trois parties), pour créer ensuite une adaptation originale. Nous jouons avec des dés pour bouger dans l'espace au gré du hasard, une notion à la source du travail de Cunningham. La musique intervient seulement après, au tournage. Il faut d'abord apprendre à se mouvoir, trouver une coordination avec son corps, le rapport à l'autre. Nous travaillons six semaines sur les volets pédagogique et artistique. La dernière semaine, Dylan commence les répétitions avec les enfants. Le tournage s'est fait en un jour.

Vous abordez également la notion de territoires ?

Les deux classes, dont l'une avec des enfants arrivant en France et ne maîtrisant pas bien le Français, ont travaillé ensemble. L'intégration s'est très bien passée pour les élèves de la classe CLIN. Les prénoms que nous égrenons en début de film, reflètent cette diversité. Au final, il en résulte ce que l'on nomme "une culture commune". Chaque enfant a pu s'exprimer, ressentir, développer ses propres capacités, tenir le regard, porter son engagement, au final, s'approprier un nouveau vocabulaire spécifique à la danse, compréhensible par tous.

Qu'est-ce que selon vous, les enfants retiennent de cette expérience, à laquelle vous donnez une suite avec le projet Kid Birds, toujours inspirée de Cunningham, et de sa pièce Beach Birds ? 

Les enfants notent les chorégraphies et leurs souvenirs dans un «carnet de danse» qui devient aussi un objet plastique que nous exposerons. Ils rencontrent la démarche d'un artiste, se constituent d'autres repères artistiques et culturels. Et une certaine audace communicative. À la fin du film, et au bout de cette chorégraphie millimétrée, les enfants se sont spontanément mis à courir les uns envers les autres, dans un grand moment de réunion et de joyeux désordre.