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Réponse n° 188
Domaine

ivoirerie ; médiéval ; archéologie

Dénomination

plaque

Titre

Le Christ et les apôtres

Auteur/exécutant

anonyme (auteur)

Lieu création / utilisation

Italie, Rome (lieu de création)

Période création/exécution

5e siècle

Historique

Le Christ enseigne à ses onze apôtres et à saint Paul à l'intérieur d'une pièce dont les rideaux ont été relevés ; ils sont assis en demi-cercle sur des chaises pliantes à dossier arrondi ; les pieds des disciples reposent sur un suppedaneum commun (une sorte de boudin en forme de fer à cheval), le Christ seul a un petit banc. La figure du Maître, de face et au centre de la composition, domine toute la scène. L'ivoirier ne sait pas représenter l'espace en perspective fuyante, il situe quatre des douze disciples au premier plan (les pieds de leurs sièges sont strictement sculptés sur une même ligne) ainsi que le socle supportant la caspa, boîte contenant les phylactères roulés des huit livres de l'écriture (quatre livres des prophètes et quatre évangiles) ; le socle est gravé de la lettre grecque ro. Les figures des apôtres et du Christ se déploient selon des rayons, qui partent du bas de la composition et s'échelonnent en hauteur, ce qui donne l'impression qu'ils sont l'un derrière l'autre (un disciple est assis devant le rideau qui pend à l'entrée de la pièce) mais l'inclinaison du sol est artificielle. L'ouverture ronde de la caspa, le suppedaneum et le petit banc sont vus du dessus. La taille des personnages croît de bas en haut, la perspective est renversée non en fonction de leur situation dans l'espace, mais de leur importance : les apôtres, qui sont très proches du Maître, sont beaucoup plus grands que ceux qui se tiennent en bas de la plaque, quant au Christ lui-même, il est deux fois plus grand que ses disciples. A l'intérieur de ce schéma très fermé, la majesté du Christ, qui trône de face, contraste face à l'excitation des apôtres : ils sont assis, penchés en avant, la tête souvent figée, mais les gestes et la position des pieds sont très variés ; ils semblent discuter avec virulence les paroles du Maître. Le Christ, seul, regarde le spectateur, le buste bien droit, les pieds l'un à côté de l'autre sur le petit banc, la main droite est levée dans un geste de discours, la gauche, tenant un rouleau, repose sur la cuisse. Il est le seul à porter une chevelure longue, aux mèches épaisses, sa tête est auréolée d'un nimbe crucifère. Les vêtements sont identiques pour tous les personnages : une tunique aux manches larges, et un manteau (pallium) très enveloppant, qui dans un drapé simple voile l'épaule gauche et laisse libre le bras droit pour le mouvement. Les plis sont serrés et plats, ceux de la tunique de toile sont un peu différents de ceux du pallium de laine, qui "coulent" en courbes rapides le long du bras gauche et entre les genoux, ils sont serrés et raides lorsqu'ils tombent sur les pieds. Les silhouettes se détachent parfaitement du fond grâce à une délicate rainure, qui était peinte en noire. Pierre est assis à la gauche du Christ et tient sa main droite devant sa poitrine : il semble dialoguer avec son voisin ; son visage a le type classique, pourtant les cheveux sont devenus lisses et plus longs sur la nuque, il porte une barbe courte et des moustaches. Son vis-à-vis, Paul, réagit vivement : il rejette la tête en arrière et lève, d'un geste qui acquiesce, sa main droite. Son visage est un portrait usuel, avec une grande tête chauve, un nez recourbé, une barbe taillée en pointe. Les autres apôtres ne sont pas représentés avec certitude et leurs visages lisses et rasés sont presque identiques ; les mèches de leurs cheveux abondants sont plates devant et s'arrondissent légèrement vers l'arrière, comme une casquette ; l'iris est souligné et la pupille est creusée ; les coins de la bouche sont légèrement tirés vers le bas et les plis partant du nez donnent aux visages une expression sérieuse et impassible. Le Christ-Docteur, enseignant comme un sage au milieu de ses disciples dans une salle, est un thème hérité des sarcophages des philosophes des IIIe et IVe siècles. Il disparaît après 400. L'époque théodosienne place alors le Christ dans un cadre surnaturel. La Cité céleste, la mosaïque absidiale de S. Pudenziana à Rome illustre bien ce changement. La pyxide en ivoire de Berlin présente sur une de ses faces, le même sujet ; le Christ, dans l'attitude solennelle du discours, est assis sur un trône, Pierre et Paul ont des sièges pliants, mais sans dossier. W. Reusch la situe autour de 400, son origine serait allemande (de la région de Coblence), et la rapproche de la plaque de la collection Trimolet, qui en serait issue. Le type de siège pliant à dossier arrondi (rendu très maladroitement dans la pièce dijonnaise) se rencontre dans des ivoires de la fin du IVe siècle, dans le diptyque Carrand (Florence, Bargello, vers 380-400), saint Paul enseigne assis sur ce siège, son visage est également très proche du saint Paul de Dijon ; le couvercle de lipsanothèque du Museo Civico de Brescia (370 ?) présente dans son registre inférieur, à gauche, la scène de la comparution de Jésus devant Caïphe. Ici encore, le siège est semblable, les personnages ont les mêmes manches très larges. Une des faces du reliquaire est occupée au centre par la scène du Christ enseignant dans un édifice public : les rideaux sont relevés et accrochés derrière des colonnes de la même façon que ceux de la plaque dijonnaise (chute en zigzag des extrémités). Richard Delbrueck rapproche la composition ovale de celle d'une miniature du Codex d'Agrimensores (conservé au Vatican ; 11e siècle), qui représente Théodore II (mort en 450) et qui semble une copie fidèle d'un document plus ancien. Il propose également une influence syro-palestinienne, dans les petites têtes rondes et jeunes, et les gestes d'extase de certains apôtres, qui se rencontrent dans l'argenterie du VIe siècle, en particulier dans la patène de Riha. Volbach suppose qu'il s'agit d'une copie (5e - 6e siècles, est de la Gaule) d'un modèle ayant existé au IVe siècle. Cette hypothèse est vraisemblable car nous avons relevé des éléments empruntés à ce siècle (siège, rideaux...) et ceci expliquerait certaines maladresses, en particulier celles des pieds des sièges. La vivacité et la variété des gestes des apôtres, le désir de l'ivoirier d'établir un dialogue sont très nets et semblent une caractéristique du tout début du 6e siècle : les sept Médecins du dioscoride de Vienne (daté vers 512-513) sont assis en demi-cercle et la miniature est faite de portraits individuels, mais la véhémence des attitudes est très proche. La mosaïque murale de S. Aquilin de Milan (vers 494 ?) présente la même composition que la plaque de la collection Trimolet, ainsi que le même sujet : le Christ jeune et imberbe est auréolé du nimbe crucifère. Les branches de la croix copte sont identiques, ce qui confirme une datation tardive dans le 5e siècle, peut-être du tout début du 6e siècle, mais l'origine reste incertaine ; Au revers, gravure d'une croix et d'une silhouette de personnage vêtu d'une longue robe.

Matériaux/techniques

ivoire

Description

Ivoire d'éléphant

Dimensions

Dimensions Hauteur : 18.3 cm ; Largeur : 12.8 cm ; Epaisseur : 1.2 cm

Sujet représenté

figures bibliques (Christ, Les Apôtres, rideau, fauteuil, rouleau)

Précision sujet représenté

Scène d'intérieur, des rideaux nous introduisent dans l'espace où le Christ et les apôtres sont assis en cercle, sur des fauteuils aux dossiers arrondis et aux accoudoirs en forme de dauphins. Au centre, un socle porte une boîte cylindrique dans laquelle on aperçoit des rouleaux. La courbe des rideaux, comme accrochés à un chambranle de porte et noués sur les côtés, offre un contrepoint à la composition en cercles concentriques autour de l'ouverture de la boîte : la marche sur laquelle les personnages posent leurs pieds, les lignes formées par leurs mains et par leurs visages. La perspective est inversée : le Christ, personnage le plus éloigné, mais aussi le plus important, est le plus grand. La pièce présente des affinités avec des ivoires chrétiens et profanes attribués à un atelier actif en Italie du Nord ou à Rome dans la première moitié du 5e siècle. Le visage imberbe du Christ est d'ailleurs bien dans la tradition paléochrétienne. La rainure pratiquée tout autour de l'ivoire indique qu'il s'agissait de la partie centrale d'un feuillet en cinq parties. La plaquette a certainement été réemployée dans une reliure au cours du Moyen Age. (Notice de Sophie Jugie extraite de "Le musée des Beaux-Arts de Dijon", RMN, musée des beaux-arts de Dijon, Paris, 2002)

Lieu de conservation

Dijon ; musée des beaux-arts

Musée de France
au sens de la loi n°2002-5 du 4 janvier

Statut juridique

propriété de la commune ; legs ; Dijon ; musée des beaux-arts

Date acquisition

1878

Anciennes appartenances

Collection privée, Trimolet Anthelme et Edma

Numéro d'inventaire

CA T 326 ; 1 (Cat. ivoires 1983) ; 326 (Cat. Trimolet)

Exposition

Byzance et la France médiévale, Paris : Bibliothèque nationale, 1958-1959 (n° 150 (Gaule, Ve-VIe siècle). Style cf diptyque de Saint-Lupicien, et, moins, de l'ambon d'Aix-la-Chapelle)
L'art paléochrétien, Trèves, 1965 (n° 107)
Origines du Royaume Franc, Mayence, Saint-Germain-en-Laye, 1980
A l'aube de la France, La Gaule de Constantin à Childéric, Paris : Musée du Luxembourg, 1981 (n° 129, fig. 65 (Ve siècle))
Byzance, L'art byzantin dans les collections publiques françaises, Paris : Musée du Louvre, 1992-1993 (n° 11 (notice Danielle Gaborit-Chopin) (Italie du Nord ou Rome, 2ème quart ou milieu du Ve siècle))

Bibliographie

Gleize (Emile), Catalogue descriptif des objets d'art formant le musée Anthelme et Edma Trimolet, Dijon, 1883 (n° 326 (Travail byzantin du VIIIe siècle))
Cabrol (F. ) et Leclercq (H.), Dictionnaire d'archéologie chétienne et de liturgie, Paris, 1924, t. XIV, 2 (p. 2422, fig. 10626.)
Peirce (H) et Tyler (R), L'Art byzantin, 1932 (t. I, p. 83, pl. 125)
Grabar (André), "Plotin et les origines de l'esthétique médiévale", Cahiers archéologiques, 1945, I (p. 38, pl. II, fig. 4)
Loos-Dietz (E.P. de), Vroegchistelijke ivoren, Assen, 1947 (p. 153, 163, 165, pl. 25.)
Van der Meer (Frédéric), Atlas de la Civilisation occidentale, Paris, 1951 (p. 41, fig. 163)
Volbach (Wolfgang Fritz), Elfenbeiarbeiten der Spätantike un des frühen Mittelalters, Mayence, 1952 (rééd. 1976) (t. I, p. 44 et suiv. n° 148. (Est de la Gaule, Ve-VIe s.))
Volbach (W. Fr.) "Frühmittelalterliche Elfenbeinarbeiten aus Gallien", Festschrift des römich germanischen Zentralmuseum in Mainz zur Feier seines hundertjährigen Bestehens, t. I, 1952 (Tafel 49, fig. 148)
Delbrueck (Richard), Zwei christliche Elfenbeine des 5. Jahrhunderts, Neue Beiträge zur Kunstgeschichte des 1. Jahrhunderts, 1. Halband, Baden-Baden, 1952 (p. 166-175, pl. 44)
Van der Meer (Frédéric) et Mohrmann (Christine), Atlas de l'Antiquité chrétienne, Paris, 1960 (p. 157)
Reusch (Wilhelm), Frühchrisliche Zeugnisse im Einzugsgebied von Rhein und Mosel, Trier, 1965 (p. 119-120, pl. 107)
Tardy, Les Ivoires, Paris, 1966 (p. 7)
Hagskog (Bo), Pictures of the devoted, 1977
Garmier (Jean-François), "Le Goût du Moyen-Age chez les collectionneurs lyonnais du XIXe siècle", Revue de l'art, n°47, 1980 (p.57)
Maurice (Brigitte), Quelques recherches sur les ivoires du musée des Beaux-Arts de Dijon, Mémoire de maîtrise de l'Université de Dijon, 1983 (n° 1 (Est de la Gaule, fin Ve - VIe siècle))
Marlé (René), La Foi et la prière des chrétiens. Instructions sur le symbole des Apôtres et sur le Notre Père, Le Sarment, Fayard, 1984 (reprod. en couv.)
Georgel (Pierre), Le Musée des Beaux-Arts de Dijon, Dijon, 1985 (reprod. p. 222)
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Leesti (Elizabeth), "The Pentecost Illustration in the Drogo Sacramentary", Gesta, XXVIII/2, pp.205-216 (p.213, fig.13 (Ve-VIe siècle))
Caillet (Jean-Pierre), "L'ivoire et l'os", Arts chrétiens. Atlas des monuments paléochrétiens de la France, Paris, 1991 (p. 326 (Sud de la Gaule))
Grabar (André), Les origines de l'esthétique médiévale, Paris, 1992 (n° 11 (exemple de perspective renversée, Ve siècle))
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Schnapp (Alain)(sous la dir.de), Préhistoire et Antiquité, Flammarion, Paris, 1997 (reprod. p. 536)
Mazal (Otto), Griechisch-Römische Antike, Graz, 1999 (fig. 4. p. 89)
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Pugsley (Paola), Roman domestic wood : Analysis of the morphology, manufacture and use of selected categories of domestic wooden artefacts with particular reference to the material from Roman Britain, Oxford, 2003 (reprod. p. 95 (Antiquité tardive))

Rédacteur

Creuzet Laurent ; Férot Elise ; Bardin Dominique ; Jugie Sophie

Copyright notice

© Dijon, musée des beaux-arts, © Service des musées de France, 2017

Crédits photographiques

© François Jay, © Dijon, musée des beaux-arts

 

Renseignements sur le musée

 

01370018099

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