Historique
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Le tombeau de Jean sans Peur a connu les mêmes vicissitudes que celui de Philippe le Hardi. Les sources permettent de préciser que les deux couples d'anges, le casque de Jean sans Peur et les armoiries de Marguerite de Bavière sont authentiques. Les deux gisants ont été refaits, en intégrant les masques originaux de Jean sans Peur et de Marguerite de Bavière, qui avaient été prélevés en 1793 et conservés dans le dépôt de Saint-Bénigne, et les deux paires de mains, restituées par Baudot. En ce qui concerne les arcatures, en albâtre à l'origine et restaurées en albâtre, il n'existe aucun moyen scientifique de distinguer les originales de celles qui sont refaites. Les comptes de la restauration, malgré une certaine confusion entre les architectures des deux tombeaux, invitent à penser que le tombeau de Jean sans Peur a été moins endommagé que celui de Philippe le Hardi : selon nos estimations, 7 dais sur 24 et 4 colonnettes sur 64 ont été refaits. C'est dans les arcatures, dont l'invention appartient à Jean de La Huerta, que le tombeau de Jean sans Peur s'écarte le plus de celui de Philippe le Hardi. Le décor est nettement plus complexe, plus "flamboyant". A la partie supérieure court un bandeau où sont sculptés les emblèmes du duc : le rabot et la feuille de houblon. Ces arcatures semblent ne jamais avoir été dorées. (Notice de Sophie Jugie extraite du catalogue de l'exposition " L'Art à la cour de Bourgogne : Le mécénat de Philippe le Hardi et de Jean sans Peur (1364-1419) ", Dijon : musée des beaux-arts, 28 mai - 15 septembre 2004, Cleveland : The Cleveland Museum of Art, 24 octobre 2004 - 9 janvier 2005) ; Si les tombeaux des ducs Philippe le Hardi et Jean sans Peur sont justement cités parmi les plus prestigieux de l'art funéraire de la fin du Moyen Age, il ne faut pas oublier que ces monuments ont connu une histoire mouvementée et ne nous sont pas entièrement parvenus dans leur état d'origine. Le tombeau de Philippe le Hardi (1342-1404), commandé dès 1381, fut mis en place en 1410. Celui de Jean sans Peur, commandé en 1410, fut réalisé entre 1443 et 1470. Les deux monuments se trouvaient dans le choeur de l'église où ils demeurèrent jusqu'à la Révolution. Lors de la suppression de la chartreuse et de sa vente comme bien national, les tombeaux furent réservés comme monuments des arts. De mai à juillet 1792, ils furent soigneusement démontés puis remontés dans l'ancienne abbatiale Saint-Bénigne, devenue cathédrale ; mais, pour obéir à l'ordre de destruction des insignes de la féodalité pour le 10 août 1793, les tombeaux furent à nouveau démontés : les gisants des ducs furent détruits. Les autres sculptures, les arcatures et les pleurants devaient être conservés, et 70 pleurants sont bien présentés au musée de Dijon en 1799. Mais la confusion qui régna au cours de ces journées explique que quelques pleurants, et quelques fragments d'architecture disparurent alors : on les retrouve au début du XIXe siècle, ainsi que quelques menus éléments des gisants, mentionnés chez les collectionneurs dijonnais, en particulier Louis-Bénigne Baudot. Cet érudit, qui nous a laissé sur cette période des notes extrêmement précieuses, semble bien être l'auteur de l'inscription qui figure au revers du pendentif du tombeau de Philippe le Hardi. A l'initiative de l'architecte dijonnais Claude Saint-Père, qui a rassemblé, avec l'aide du conservateur du musée Févret de Saint-Mémin, les morceaux alors dispersés entre le musée, le dépôt de Saint-Bénigne et les collectionneurs, les deux tombeaux furent restaurés à partir de 1819 aux frais du Conseil général de la Côte d'Or. Ils furent ensuite installés dans la salle des Gardes du palais des ducs elle-même restaurée : l'ensemble fut inaugurée en 1827. Une étude en cours permet d'évaluer à environ un tiers les éléments d'architecture qui ont été alors refaits à l'identique. Cette histoire mouvementée explique donc qu'un certain nombre de fragments authentiques de leurs arcatures se trouvent conser vés dans divers musées (à Paris, au musée du Louvre, au musée national du Moyen Age et au musée des Arts décoratifs ; à l'étranger, à Anvers, Boston et New York), et apparaissent parfois dans le commerce de l'art. C'est ainsi que le musée avait pu acheter un dais du tombeau de Philippe le Hardi en 1991, et que deux nouveaux fragments ont réapparu dernièrement. Leur acquisition s'imposait, pour rejoindre les tombeaux et les éléments déjà conservés par le musée, ainsi que les deux fragments que le musée des Arts décoratifs a généreusement consentis à déposer en octobre 2001. Voir aussi : Tombeau de Jean sans Peur et Marguerite de Bavière (CA 1417), Fragment de dais du tombeau de Jean sans Peur (1096/3), Fragment de dais du tombeau de Jean sans Peur (D 2001-3-2), Clé pendante du tombeau de Philippe le Hardi (2001-7-1)
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Bibliographie
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Baron (Françoise), Jugie (Sophie), Lafay (Benoît), Les Tombeaux des Ducs de Bourgogne. Création, destruction, restauration, Somogy Editions d'art, Paris, musée des beaux-arts de Dijon, Dijon, 2009 (p. 138, reprod.)
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