Historique
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Deux sortes de tabernacles en ivoire prévalaient à la fin du XIIIe siècle et au début du XIVe siècle : la forme la plus simple était celle du triptyque comprenant une Vierge à l'Enfant entourée de deux anges ; la plus complexe était celle du polyptyque dont les volets racontaient la petite Enfance du Christ. L'ivoire CA T 343 appartient à cette seconde catégorie. Dans cette oeuvre, la Vierge couronnée, assise bien droite, tient l'Enfant, qui est debout sur son genou gauche et lui passe un bras autour du cou ; de la main droite elle lui présente une fleur. Son manteau s'ouvre, un pan tombant de chaque côté, et laisse apercevoir les plis de la robe, serrée à la taille par une ceinture. Elle est coiffée d'un voile court, et un ange, descendant du ciel, la couronne. Le dais soutenu par des colonnettes qu'il abritait, a disparu : ce groupe central est sculpté en quasi ronde-bosse, tandis que les volets sont d'un relief peu accentué, illustrant les scènes suivantes : à gauche, Visitation et Annonciation (sujets intervertis), Adoration des Mages ; à droite, Nativité, Présentation au Temple. Les attitudes de la Vierge et de l'Enfant sont analogues à celles du polyptyque de J. Pierpont Morgan (n°17. 190, 270) au Metropolitan Museum, et c'est encore dans la filiation du triptyque de Saint-Sulpice que se situent les volets de ce tabernacle. Il faut noter la disproportion entre la Vierge et les petits personnages des volets, et les différences de relief, mais ainsi l'ivoirier rompt la monotonie des compositions habituelles et introduit des jeux variés d'ombre et de lumière. Il tire parti de l'étroitesse des feuillets en adaptant le sujet au cadre architectural, la scène de la Visitation a pris la place réservée habituellement à l'Annonciation, Elizabeth, très heureuse, a d'ailleurs beaucoup de mal à s'agenouiller devant la Vierge, et dispose ainsi d'un champ plus large. Chacun des deux personnages de la Nativité ou de la Présentation au Temple, est isolé sous son arcature trilobée, et ce sont les gestes des personnages, très vivants, qui lient les deux espaces (par exemple saint Joseph tend l'Enfant emmailloté à la Vierge, qui se dresse sur son lit). Le sculpteur s'est permis une fantaisie en délimitant un troisième registre, sous les gables, et en y installant des anges en buste, priant ou portant des couronnes : détail fréquent que nous trouvons dans la sculpture sur pierre ou sur bois (par exemple les portails occidentaux de la cathédrale d'Auxerre et les stalles de la cathédrale de Poitiers). Les visages légèrement arrondis, aux traits fins, parfois graves et les vêtements aux plis souples et réguliers, non sans élégance suggèrent une date vers 1340-1350. (Notice de Brigitte Maurice extraite de "Quelques recherches sur les ivoires du musée des Beaux-Arts de Dijon", Mémoire de maîtrise de l'Université de Dijon, 1983) ; Le polyptyque est construit autour d'un groupe sculpté en ronde-bosse, dont l'avant est en ronde-bosse mais reste attaché à la plaque d'ivoire à sommet triangulaire. La Vierge assise porte son fils debout sur un genou, un ange sortant des nuées à mi-corps la couronne. Les personnages sont un ou deux par registre, les figures et les chevelures sont soignées, les postures variées, les personnes bien différenciées, les corps saillants sous les drapés. La vierge est présentée très cambrée, ventre en avant dans les scènes latérales, sa présentation semble avoir fait l'objet d'un travail plus minutieux que les autres sujets. Brigitte Maurice situe ce travail dans les années 1340-1350 par l'aspect de visages et le traitement des statuettes du XIVe siècle, tout en prenant pour modèle les compositions centrée sur le couronnement de la Vierge en haut relief ou en ronde-bosse qui sont présents dans les ateliers parisiens dès la fin du XIIIe siècle. En rapport avec : Anonyme parisien, Triptyque de St Sulpice du Tarn, Anonyme français, Vierge à l'Enfant, Nantes
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Bibliographie
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Gleize (Emile), Catalogue descriptif des objets d'art formant le musée Anthelme et Edma Trimolet, Dijon, 1883 (n° 343 (Fin XIVe siècle)) Koechlin (Raymond), Les ivoires gothiques français, 3 tomes, Paris, 1924 (I, pp.235, 242, 246 ou I, pp. 125, 126, 128; II, p.64, n°146) Tardy, Les Ivoires, Paris, 1966 (p. 33 (Paris, milieu du XIVe siècle)) Maurice (Brigitte), Quelques recherches sur les ivoires du musée des Beaux-Arts de Dijon, Mémoire de maîtrise de l'Université de Dijon, 1983 (n° 17 p. 37 (vers 1340-1350))
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