Discours et communiqués de presse

Remise des insignes de Chevalier dans l'ordre des
Arts et des Lettres à Stephen Melchiori

lundi 19 décembre 2005

Remise de décoration à Liliane Valsecchi, à Antoine Picard d’Estelan et Stephen Melchiori
photos : © Farida Bréchemier/MCC

Cher Stephen Melchiori, Il a fallu les Rencontres pour l'Europe de la culture pour que nous rencontrions et que votre remarquable parcours, votre créativité, votre professionnalisme, et votre passion pour le cinéma soient enfin reconnus par la République.

C'est que vous ne cherchez pas les honneurs. Vous avez la modestie de ceux qui travaillent dur, qui mesurent les enjeux et les défis de notre temps et décident de les relever. Je crois aussi que votre modestie est celle des hommes qui, patiemment, dans l'ombre plutôt que dans la lumière, construisent de grands projets.

Vous aimez les acteurs, les réalisateurs et tous les techniciens du cinéma, photographes, monteurs, musiciens. Et vous avez consacré votre vie à les faire connaître dans le monde. Vous avez leur reconnaissance, puisqu'ils sont nombreux aujourd'hui à vous entourer, vous et votre famille. Deborah Kerr en personne vous a manifesté sa gratitude, lors d'un festival, en vous prenant dans ses bras !

Vous aimez vous définir comme un " fan " de cinéma parmi d'autres, et votre vocation fut de mener les plus grandes étoiles du cinéma à la rencontre de leur public, pour le plus grand bonheur des spectateurs et des acteurs eux-mêmes. Ce public aussi vous est reconnaissant, qui se déplace nombreux aux festivals et aux rencontres que vous organisez.

Vous qui, depuis de nombreuses années, travaillez dans l'ombre au rayonnement mondial du cinéma français, vous méritez bien, aujourd'hui, ici, d'être, si je puis dire, sous les feux de la rampe !

Oui, le cinéma français, la culture française, vous doivent beaucoup. C'est vous qui avez fait de la montée des marches du Palais des festivals à Cannes l'un de ces moments magiques qui rythment la vie du septième art. Je rappelle qu'à Unifrance, auprès de Daniel Toscan du Plantier, dont je tiens à saluer ici la mémoire, vous avez lancé le festival du film français de Yokohama, le festival du film franco-mexicain d'Acapulco, et le Festival international du film de Marrakech. Je sais l'importance de votre compagnonnage. Je sais combien vous lui êtes redevable et l'affection que vous lui portez et qu'il n'a cessé de vous témoigner.

Enfin, c'est vous qui avez grandement contribué à organiser les 2 et 3 mai derniers, les Rencontres pour l'Europe de la culture, qui, au fil des ans, contribueront, j'en suis convaincu, au renouveau et à l'approfondissement de la culture européenne.

Derrière ces événements, dont les images font rêver les hommes aux quatre coins du monde, et les unissent dans une même passion, c'est bien vous qui étiez là, patient artisan de la magie qui entoure la rencontre des artistes et de leurs publics. Dans des pays lointains, auprès de publics dont on aurait pu craindre qu'ils soient plus attirés par Hollywood que par les studios français, vous avez prouvé que notre cinéma reste un cinéma universel.

Au fil de ces rencontres, vous avez pu mesurer combien la diversité culturelle a un avenir, non pas en tant que fermeture des cultures sur elles-mêmes, mais en tant qu'échange, respect et curiosité entre cultures différentes. Vous avez touché du doigt ce fond d'humanité commun que les grands artistes représentent dans leurs œuvres, que les étoiles du cinéma incarnent à l'écran, et qui se manifeste concrètement lors des festivals internationaux.

Je voudrais souligner enfin votre courage. A Marrakech, où vous étiez le 11 septembre 2001, vous avez œuvré au maintien du festival du film international que vous organisiez pour la première fois quelques jours plus tard et que certains voulaient annuler.

Finalement décidé par le roi Mohammed VI, le maintien du festival restera comme un symbole du lien et du dialogue entre les cultures, un lien qui est plus fort que tous les actes de terreur qui cherchent à le rompre. Et sans doute avez-vous été justement récompensé de ce courage par les lumières de joie qui ont brillé ces jours-là dans le regard des jeunes Marocains ayant pu approcher, grâce à vous, leurs acteurs préférés.

Merci, donc, cher Stephen, pour ces moments de rêve imaginés pour faire rayonner notre culture. Jean Cocteau disait, à propos de l'une des premières éditions du festival de Cannes, qu'il est comme un " microcosme de ce que serait le monde si les hommes pouvaient […] parler la même langue ". Puisse ce microcosme s'agrandir et franchir toujours plus de frontières !

Cher Stephen Melchiori, au nom de la République, nous vous faisons Chevalier dans l'ordre des Arts et des Lettres.



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