Discours et communiqués de presse
Discours de Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication, prononcé à l’occasion de la conférence de presse avec Simone Veil, ancien Ministre, Présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, présentant L’hommage que le Président de la République rendra au nom de la Nation aux Justes de France le 18 janvier 2007, en présence d’Agnès Varda, cinéaste et créatrice de l’installation

jeudi 21 décembre 2006

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Discours de Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication, prononcé à l’occasion de la conférence de presse avec Simone Veil, ancien Ministre, Présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, présentant L’hommage que le Président de la République rendra au nom de la Nation aux Justes de France le 18 janvier 2007, en présence d’Agnès Varda, cinéaste et créatrice de l’installationMadame le Ministre d’État, Madame la Présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, chère Simone Veil,
Chère Agnès Varda,
Mesdames, Messieurs,

C’est la mémoire qui nous rassemble aujourd’hui, dans ce ministère en charge du patrimoine et des commémorations nationales, où je suis heureux de vous accueillir, pour vous présenter, aux côtés de Mme Simone Veil, et au nom du Président de la République, un événement tout à fait exceptionnel : l’hommage que le Président de la République rendra au nom de la Nation aux Justes de France, au Panthéon, le jeudi 18 janvier 2007, à 18 heures.

Cet hommage a été proposé au Président de la République par la Fondation pour la Mémoire de la Shoah. Avant de céder la parole à Mme Simone Veil, qui, le 18 janvier, accueillera les participants à la cérémonie, et se recueillera, aux côtés du Président de la République, devant l’inscription qui sera apposée dans la crypte, afin que la mémoire des Justes de France puisse y être célébrée, au même titre que celle des grands hommes dont les cendres y sont inhumées, permettez-moi de rappeler la genèse et l’esprit de cet événement.

Notre histoire nationale est celle des heures sombres et des heures glorieuses. La mémoire ne se divise pas. Elle forme un tout, avec ses zones d’ombres et de lumières. Elle est donc plus qu’un devoir qui s’impose ; elle est un travail qu’il nous revient de mener à bien, de façon continue, pour la perpétuer et la transmettre. C’est ce qu’a rappelé le Président de la République, en reconnaissant officiellement, dès le 16 juillet 1995, le rôle de l’État français, dans l’horreur de ces heures noires qui « souillent à jamais notre histoire ».

Souvenons-nous de la voix de Malraux, lors du trentième anniversaire de la Libération des camps, devant les rescapées : « là, pour la première fois, l’homme a donné des leçons à l’enfer ».

Entendons aussi votre voix, Madame, lors du soixantième anniversaire, dans le froid mordant d’Auschwitz : « ce que je sais, c’est que je pleure encore chaque fois que je pense à tous ces enfants et que je ne pourrai jamais les oublier ». Nous n’oublierons jamais qu’un quart des Juifs de France ont péri dans les trains et dans les camps. Et je pense à ces documents que m’a remis solennellement la maison d’Izieu, l’an dernier, pour les conserver dans les collections nationales. Le combat quotidien contre l’oubli, c’est, bien sûr, celui des archives pour la transmission de la mémoire, qui donne tout leur sens aux travaux de conservation et de commémoration dont la puissance publique et le ministère de la Culture et de la Communication sont investis. C’est une œuvre dont nous percevons chaque jour la nécessité pour l’éducation des générations présentes et futures. Mais, si les archives sont tout, elles ne sont rien sans les hommes et les femmes, sans leurs récits, sans leurs témoignages.


Et l’hommage du 18 janvier prochain est d’abord le témoignage de la France. Comme l’avait déclaré le Président de la République, dès le 16 juillet 1995, lors des cérémonies commémorant la grande rafle des 16 et 17 juillet 1942 au Vélodrome d’hiver : « Certes, il y a les erreurs commises, il y a les fautes, il y a une faute collective. Mais il y a aussi la France, une certaine idée de la France, droite, généreuse, fidèle à ses traditions, à son génie. Cette France n'a jamais été à Vichy. Elle n'est plus, et depuis longtemps, à Paris. Elle est dans les sables libyens et partout où se battent des Français libres. Elle est à Londres, incarnée par le Général de Gaulle. Elle est présente, une et indivisible, dans le cœur de ces Français, ces "Justes parmi les nations" qui, au plus noir de la tourmente, en sauvant au péril de leur vie, comme l'écrit Serge Klarsfeld, les trois-quarts de la communauté juive résidant en France, ont donné vie à ce qu'elle a de meilleur ».

A Thonon-les-Bains, en Haute-Savoie, le 2 novembre 1997, puis le 8 juillet 2004, au Chambon-sur-Lignon, en Haute-Loire, - cas exceptionnel de remise à titre collectif d’une médaille des Justes - en ces lieux emblématiques de l’action de celles et ceux qui, conformément à la maxime inscrite sur la médaille des Justes, « en sauvant une vie, ont sauvé l’Univers tout entier », le Président de la République a honoré ces hommes et ces femmes de France qui « ont fait le choix de la tolérance, de la solidarité et de la fraternité ».

2725Justes, de toutes régions, de tous milieux, de toutes convictions, ont été identifiés en France, à ce jour, grâce aux témoignages de ceux qui leur doivent la vie, et reconnus par le Mémorial de Yad Vashem. Comme l’a déclaré le Premier Ministre, en inaugurant le « Mur des Justes » au Mémorial de la Shoah, le 14 juin dernier, « leur souvenir constitue pour nous une consolation mais aussi une exigence ».

La loi du 10 juillet 2000, votée à l’unanimité par le Parlement, a officialisé le terme de Justes dans notre législation, en instituant une « journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux Justes de France qui ont recueilli, protégé ou défendu, au péril de leur propre vie et sans aucune contrepartie, une ou plusieurs personnes menacées de génocide ».

Au Panthéon, haut lieu de mémoire de la Nation et de la République, dans la grande nef qui sera à nouveau ouverte gratuitement au public dans les jours qui suivront, grâce aux importants travaux qui y ont été réalisés, en présence de nombreux Justes et des personnes que ces femmes et ces hommes de cœur et de courage ont contribué à sauver, le Président de la République rendra l’hommage solennel de la France.

Cet hommage éclairera ainsi la part de lumière qui brille en chacun de nous et qui est tout simplement notre part d’humanité.

La cérémonie sera diffusée en direct sur France 2. Elle sera marquée par une création d’Agnès Varda, commande publique du ministère de la Culture, dont vous nous direz un mot tout à l’heure, Madame ; mais aussi par l’interprétation, par le chœur de chambre Accentus, sous la direction de Laurence Equilbey, de la cantate a capella « Figure humaine », composée en 1943 par Francis Poulenc sur des poèmes de Paul Eluard, qui se termine sur le fameux « Liberté ».

Cet événement sera accompagné d’une programmation exceptionnelle sur les antennes de France Télévisions et de France Culture.

La scénographie et les écrans diffusant l’œuvre d’Agnès Varda resteront en place du vendredi 19 au dimanche 21 janvier pendant l’ouverture gratuite au public du Panthéon.

Je suis ému et fier de passer à présent la parole à Mme Simone Veil.

photo : Didier Plowy/MCC


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