Discours et communiqués de presse
Discours de Renaud Donnedieu de Vabres

Inauguration du musée des Arts décoratifs

mercredi 13 septembre 200


Madame la Présidente, chère Hélène David-Weill,
Madame la Directrice générale, chère Sophie Durrleman,
Madame la Directrice, chère Béatrice Salmon,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,

C’est avec beaucoup d’émotion et de plaisir, que j’inaugure aujourd’hui, cent un ans après leur installation dans cette aile du Palais du Louvre, les nouveaux Arts décoratifs.

Emotion et plaisir, d’abord, à la vue de ce bâtiment qui a retrouvé toute sa splendeur, de cette nef à qui l’on a rendu son volume initial, de cette mosaïque, au sol, que les volutes florales ornent à nouveau de tout leur éclat.

Emotion et plaisir de retrouver ces collections extraordinaires, et d’emprunter ensemble les nouveaux parcours qui les mettent magnifiquement en valeur, en laissant toute leur place à la découverte, à la connaissance, mais aussi à la surprise et à la curiosité.

Emotion et plaisir, enfin, de constater que la réussite des travaux est éclatante, que nos efforts sont couronnés de succès, et que cette belle Institution retrouve toute sa singularité et toute la force de son message.

Lieu unique de rayonnement de tous les courants artistiques, tels qu’ils se sont incarnés au cours des siècles dans les objets les plus extraordinaires comme dans ceux de tous les jours, ce nouveau musée efface, dépasse, surpasse la frontière artificielle entre les Beaux-Arts et les Arts décoratifs, entre le Beau et l’utile, entre l’exceptionnel et le quotidien.

Parce que la virtuosité des savoir-faire, les prouesses techniques, l’imagination et l’excellence sont sans aucun doute les plus belles expressions du génie et de l’art de vivre français, les Arts décoratifs méritaient de retrouver, dans ce nouvel écrin baigné de lumière, la place qui leur revient, au premier rang des arts français.

Secrétaire en pente en vernis Martin bleu, table-parasol de Biennais, bras de lumière en bronze, bonheur du jour de Lemarchand, chiffonnier anthropomorphe en galuchat, canapé Boule, fauteuil Œuf ou lit colonne, autant d’appellations curieuses, d’œuvres singulières, que les Arts décoratifs nous invitent à rencontrer, à découvrir, à aimer.

Oui, c’est à une véritable rencontre, bien plus qu’à une simple visite, que vous conviez le public, avec, pour la première fois, un billet unique, donnant accès en simultané aux collections d’arts décoratifs, de mode et de publicité, avec un audio-guide mis à la disposition de tous, y compris de nos amis étrangers, avec une salle de conférences, un programme éditorial conséquent, une programmation d’expositions dense, une bibliothèque ouverte à tous, une école d’enseignement supérieur d’architecture intérieure et de design – l’école Camondo – des ateliers pédagogiques qui accueillent chaque année 1800 élèves, et une galerie des jouets qui présente douze mille trésors de l’enfance.

Ce sont de véritables passerelles que le musée jette, vers le public, tout d’abord, grâce à des parcours qui concilient qualité du propos et pédagogie, et offrent un éclairage unique, non seulement sur la forme et l’esthétique des objets, mais aussi sur leurs dimensions historiques, culturelles et sociales ; passerelles entre les disciplines, ensuite, dans un souci de transversalité ; et, enfin, passerelles entre les siècles, en offrant, sur plus de 6.000 mètres carrés, ce vaste panorama du goût, de l’art de vivre, et des savoir-faire, jusqu’à l’actualité la plus immédiate, qui fera, je m’en réjouis, l’objet de trois ou quatre expositions temporaires par an.

Je suis très heureux que des artisans d’art contemporains, tisseurs, brodeurs, passementiers, peintres, décorateurs, tapissiers, menuisiers, aient été associés aux travaux et aient ainsi contribué, par l’excellence de leur savoir-faire, à faire renaître l’atmosphère d’intérieurs d’époques différentes.

En un seul espace, au volume exceptionnel, le public embrassera donc des siècles de savoir-vivre, du Moyen-Âge jusqu’au design le plus contemporain. Et parce que le Beau et l’Utile ne font ici qu’un, je me réjouis que la Galerie d’étude mêle contemplation et compréhension, avec pour premier thème la question essentielle « À quoi ça sert ? ». Se nourrir et se reposer, telles sont les deux fonctions qui ont été choisies pour y répondre, avec une sélection d’objets usuels qui traduisent les modes, les usages et même les morphologies de toutes les époques.

Je sais que ce projet, colossal, a été long à mener à bien. Le chantier de rénovation a débuté à la fin de l’année 2000 et il a mobilisé plus de cent restaurateurs. Je sais gré aux différentes équipes d’avoir travaillé de concert pour permettre cette superbe réalisation. Je tiens à saluer la Directrice des musées de France, Francine Mariani-Ducray, et à féliciter l’équipe des Arts décoratifs, sa Présidente, Hélène David-Weill, sa Directrice générale Sophie Durrleman, et sa Directrice Béatrice Salmon, mais aussi les conservateurs ; merci aux architectes, Oscar Tusquets, Bruno Moinard, et Sylvain Dubuisson pour le réaménagement du musée, assistés de Sylvie Jodar, Antoine Plazanet, et Françoise Guichon pour la conception muséographique, Bernard Desmoulin, assisté de Christian Dagand, pour les trois galeries, Daniel Kahane, avec Diego Rodriguez, pour le clos et couvert, les circulations verticales, les réseaux primaires et les espaces destinés aux expositions temporaires, et François-Joseph Graf pour les mises en scène des intérieurs des différentes époques ; merci enfin à l’EMOC, dont je salue le Président, Jean-Claude Dumont.

Je sais que ce temps de gestation a permis d’assumer quelques paris audacieux et d’assister à quelques très belles découvertes.

Ainsi, je le disais tout à l’heure, cette merveilleuse Nef conçue par Hector Le Fuel a retrouvé sa hauteur spectaculaire, grâce au choix très heureux de supprimer le plancher métallique intermédiaire - parenthèse architecturale qui aura duré vingt ans.

Quelques très belles découvertes ont également ponctué ce chantier, et je sais que c’est toujours un immense plaisir pour l’équipe scientifique de faire progresser la connaissance des collections. Ainsi, le salon Talairac, présent dans cette maison dès 1919, dissimulait un décor merveilleux et inconnu de faux-bois, qu’un éclat a mis à jour, quand les restaurateurs ont sondé la peinture des doubles portes.

Tout cela, chers amis, a été rendu possible grâce au travail et aux savoir-faire les plus délicats des restaurateurs et des artisans d’art, mais aussi, et c’est là, je crois, une dimension essentielle de l’événement qui nous réunit aujourd’hui, grâce au soutien et à la générosité de nombreux mécènes, particuliers, fondations, entreprises, que les Arts Décoratifs ont su mobiliser autour de ce beau projet, en complément des financements apportés par l’Etat, qui s’élèvent à près de 14 millions d’euros. Beaucoup sont parmi nous aujourd’hui et je tiens à les remercier très chaleureusement.

Je tiens tout particulièrement à rendre hommage à l’action exemplaire que vous avez menée, chère Hélène, à la tête du Comité international que vous avez créé en faveur de cette réouverture.

Ce sont des collectionneurs, des mécènes et des industriels qui sont à l’origine de la création de cette noble institution. Vous en perpétuez aujourd’hui l’œuvre et la mémoire.

Les Arts décoratifs ouvriront leurs portes au public dès vendredi, et gratuitement pendant les trois premiers jours, en liaison avec les Journées du Patrimoine. Je ne doute pas qu’il connaîtra le même émerveillement, le même enthousiasme, la même curiosité que nous avons eu la chance de ressentir aujourd’hui.

Je vous remercie.

photos : © Erika Da Silva-Sommé


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