Intervention de Catherine Tasca, Ministre de la Culture et de la Communication - Point de presse - Avignon
7 juillet 2000

J'ai choisi ce matin de vous parler du théâtre et spécialement du théâtre public. Je n'évoquerai pas la danse, mais nous aurons d'autres rendez-vous pour la danse, je le dis tout de suite parce que bien sûr Avignon ce n'est pas que le théâtre, mais c'est de lui que je souhaite parler ce matin. Pourquoi le théâtre public aujourd'hui et ici ? D'abord c'est toute l'histoire de ce lieu extraordinaire d'Avignon qui nous invite à parler de théâtre. C'est aussi l'occasion de l'ouverture toute fraîche du festival d'Avignon et c'est enfin l'avenir du théâtre qui nous interpelle.

Je ne vous présente pas ceux qui m'entourent et que vous connaissez tous. Je voudrais d'ailleurs commencer par saluer la qualité et la richesse de la programmation de cette 54ème édition du festival d'Avignon, une édition qui est exceptionnelle puisqu'elle s'inscrit dans le cadre des manifestations de l'an 2000, organisées avec l'aide notable de la Mission 2000, que je remercie aussi, et cette édition nous offre une belle sélection de talents, jeunes ou confirmés, aussi un mélange de grands textes du répertoire et d'écritures contemporaines, et enfin des artistes venant de nombreux pays européens de la Baltique aux Balkans, et, à mes yeux, c'est important puisque vous le savez, la France vient de prendre pour six mois la présidence de l'Union européenne, une Europe à 15 mais qui va vers l'élargissement. C'est donc tout à fait important que le festival d'Avignon donne ce signe fort en direction de l'autre Europe.

Et je veux vraiment féliciter Bernard Faivre d'Arcier et son équipe pour le travail accompli. Je souhaite que toute cette équipe mais aussi les artistes et tous les festivaliers vivent cette fois encore des moments très rares, très forts comme ceux que nous offre le théâtre, grâce aussi, il faut le dire, au foisonnement du Festival Off qui, année après année, a pris une place extrêmement vivante dans le festival.

Avant de parler spécifiquement du théâtre, je veux redire ce qui, au fond, me guide dans mon travail : c'est la place centrale qu'occupe à mes yeux et que doit occuper la création, la création, je dirais, sous toutes ses formes et pas seulement dans la mission de mon ministère, mais aussi, je le crois profondément, dans notre devenir collectif. Ma conviction, en effet, est ferme et claire : la création, je le répète, sous toutes ses formes, dans toutes ses disciplines est une nécessité vitale. C'est un désir enfoui au plus profond, je crois, de nos sociétés, davantage encore aujourd'hui qu'hier face aux risques croissants de standardisation, de la globalisation et toute cette organisation d'un commerce mondial du loisir dit " culturel " qui met en jeu des forces extrêmement puissantes et apparemment infiniment plus puissantes que celles que déploie la communauté artistique.

Pour moi, la place de l'artiste, et singulièrement d'ailleurs du spectacle vivant tient à ce qu'il nous donne à lire le monde, non pas d'ailleurs avec une réponse imposée mais, je dirais, essentiellement par de vraies interrogations, parce qu'il exprime ce monde, il le bouscule, il le dépasse, il l'interroge et ce qui est, à mon avis essentiel, il le fait dans des espaces qui ne sont pas des espaces virtuels mais des espaces physiques de rassemblement, au contact direct des publics. Et cette relation, eh bien, elle naît du libre choix de l'artiste et du libre choix du spectateur. On est bien las des démarches de ventes à distance, des démarches de marketing qui accompagnent le développement par ailleurs parfois positif de toute une économie du culturel.

Dans ce contexte, la responsabilité de l'Etat et, en particulier, celle du ministère de la Culture, est d'affirmer cette présence de la création au cœur de la cité, de rendre possible et accessible au plus grand nombre, les œuvres dans toute leur diversité et, je dirais aussi, dans leurs nouvelles inspirations. Nous savons bien que chaque idée neuve, chaque création, avant de s'imposer est avant tout par essence " solitaire " et qu'il convient de lui donner l'espace et le temps de s'affirmer, de s'imposer ou tout simplement d'être reçus par d'autres.

Et c'est pour moi le sens premier du soutien de l'Etat, c'est ce qui fonde la légitimité de son intervention dans ce champ et c'est en cela que cette intervention reste aujourd'hui reconnue comme pertinente, et non seulement par les professionnels, mais aussi toutes les collectivités publiques qui depuis des décennies se sont considérablement mobilisées dans ce champ, et plus largement par l'ensemble de nos concitoyens. Il y a un besoin d'Etat dans le champ qui est le vôtre, le nôtre.

Après ces considérations qui vous semblent peut-être trop générales sur la création, mais qui sont ma façon de répondre à d'autres évolutions du monde, la première question que je veux évoquer devant vous est celle de la nécessaire relève du théâtre public.

C'est dans la démarche que je viens d'indiquer de la place de l'artiste dans la cité que s'est bâti le théâtre public avec toutes ses spécificités, un théâtre public qui affronte aujourd'hui, je le crois, vraiment un moment singulier de son histoire.

Le théâtre public et la relève

Le théâtre dans notre pays est heureusement bien vivant. Il comptait en 1998 dix millions d'entrées, je crois que le sport en fait douze à peu près, le sport dans les stades, le sport spectacle, et on estime le bassin de spectateurs de théâtre dans notre pays à 7 millions. Ce qui veut dire que certains vont fort heureusement plusieurs fois au théâtre.

Je crois essentiel à ce moment où beaucoup d'entre vous veulent repenser le sens du théâtre dans la cité, de rappeler, de garder en mémoire que la politique culturelle de la France s'est construite, pour l'essentiel, à partir du mouvement de la décentralisation dramatique. C'est sur le projet de Copeau, de Jean Vilar, Jean Dasté, René Lesage, Hubert Gignoux, et de tant d'autres que cette décentralisation théâtrale s'est développée. Nous la devons aussi beaucoup à l'action de fonctionnaires, et je pense tout particulièrement à Jeanne Laurent, je sais que cela peut faire sourire les jeunes générations de m'accrocher ainsi à cette référence, mais je crois qu'elle est très symbolique de l'engagement de l'Etat, dans un champ qui était plutôt resté de l'ordre de l'action du Mécène et sur le plan public de l'action du Prince. Et j'aime rappeler que, depuis les princes il y a eu la Révolution, et qu'il s'agissait d'engager la République sur ce champ de responsabilité.

Avec ces gens là, c'est toute une série d'aventures très personnelles, quand je dis personnelles, très singulières et en même temps très déterminées qui ont consisté à se porter à la rencontre du public à travers tout le territoire, et des aventures qui étaient toutes inscrites dans un mouvement de pensée fortement imprégné justement, je dirais, à la fois des leçons de la Résistance et des idéaux républicains, en particulier des idéaux de liberté et d'égalité. C'est ce qui fut formulé par André Malraux à sa manière, "donner à chacun accès à l'héritage de la noblesse du monde". Chacun peut discuter de ces termes mais en tout cas, ça situait l'ambition de l'engagement de l'Etat dans ce domaine. Et dès sa création, le Ministère de la Culture a pu s'appuyer sur toutes ces équipes pionnières et il les a accompagnées et soutenues.

Il faut redire avec force à l'ensemble de ceux qui composent la famille du théâtre le rôle fondateur de ces pionniers. Je crois qu'on ne peut pas bien bâtir l'avenir sans bien rappeler, sans bien entendre cette réalité historique. Et dans ce moment essentiel du passage, sans doute de la transformation, ce que l'Etat doit réussir avec les hommes et les femmes de théâtre ne se limite pas à la prise en compte des nouvelles générations, des nouvelles esthétiques, il s'agit pour moi de transmettre aussi ces valeurs fondatrices du théâtre public.

Et c'est pourquoi, pour en venir à des propos plus concrets, j'ai porté une attention toute particulière, à mon arrivée au ministère, à la succession par exemple de Roger PLANCHON au TNP de Villeurbanne. J'ai décidé d'y nommer, à Villeurbanne, à compter de Septembre 2001 Christian SCHIARETTI, parce que celui-ci, homme de théâtre, mène depuis dix ans à la Comédie de Reims un travail exemplaire et qui me semble fortement inscrit dans cette histoire. L'un et l'autre, Roger PLANCHON, Christian SCHIARETTI, dans leurs théâtres, auront ainsi le temps de quitter là où ils sont et de recommencer.

Je me réjouis beaucoup, et je dois dire que je leur suis même reconnaissante, du dialogue qui s'est instauré entre les deux hommes et de ce passage de relais au sens spirituel et sportif du terme qui sera j'en suis sûre très propice à la poursuite de la belle histoire du TNP à Villeurbanne. Et je voudrais à chaque changement de direction nous soyons capables de veiller, lorsque c'est possible, il y faut évidemment la volonté de ceux qui en sont les premiers partenaires, donc de veiller, compte tenu de la particularité de chaque parcours artistique et humain à ce que ces transmissions soient autant d'occasions de renforcer la place des artistes et du théâtre dans la cité. Dans la cité d'aujourd'hui, on a sans doute besoin d'un nouveau mode de dialogue et d'explicitation des objectifs que les uns et les autres nous poursuivons dans ce travail.

De la même façon, je dirais, au-delà du renouvellement des équipes, les projets artistiques qui sont menés d'une direction à une autre impliquent également un temps suffisamment long de conversion des publics, de la relation au public, une relation que nous devons préparer avec nos partenaires, en particulier avec les collectivités territoriales dont je rappelais que depuis deux bonnes décennies, elles sont devenues des acteurs et des acteurs souvent majeurs de ce que nous pouvons installer dans la cité.

La façon dont Christian SCHIARETTI et Roger PLANCHON ont travaillé cette question de la transition est à mes yeux exemplaire. Nommé aujourd'hui comme successeur de Roger PLANCHON à Villeurbanne.

Christian SCHIARETTI pourra terminer son aventure rémoise de façon respectueuse à l'égard de son équipe, à l'égard de ses interlocuteurs, il pourra accueillir son successeur tout en préparant son arrivée à Villeurbanne en dialogue étroit avec Roger PLANCHON, que je suis heureuse de voir ici ce matin avec nous. Et il pourra participer à ce trentième anniversaire du TNP à Villeurbanne, qui, j'en suis sûre, sera pour nous tous un rendez-vous important du théâtre public. Il leur appartiendra évidemment de le concevoir cet anniversaire.

Roger PLANCHON créera dans le même temps sa compagnie pour poursuivre son action théâtrale et il poursuivra également son activité cinématographique en Rhône Alpes, et Christian SCHIARETTI à la tête du centre co-produira et présentera dans sa programmation chaque année un spectacle de la compagnie de Roger PLANCHON jusqu'à la saison 2003/2004.

Je crois que dans un monde où tout va de plus en plus vite, ou tout est toujours à faire dans l'instant, le théâtre par tout ce qu'il "embarque", je dirais, de réflexion, de relations en profondeur, avec des gens, avec un territoire, nous appelle à de nouveaux réflexes et à de nouveaux comportements. Et c'est dans le même esprit que j'ai abordé l'ensemble du mouvement très important en nombre, initié par Catherine Trautmann il y a quelques mois, mouvement indispensable au renouvellement des directions dans nos établissements, et à l'émergence de nouvelles générations. Celles-ci sont souvent, il faut bien le dire, assez peu enclines à endosser les institutions telles que nous les avons créées voici trente parfois quarante ans. Et pourtant ces nouvelles générations ont su pour une bonne part inventer de nouveau modes de travail, de nouveaux lieux, mais elles n'ont pas été suffisamment préparées à assumer la responsabilité des institutions, parce que, objectivement, elles en ont été en partie en tout cas éloignées, trop éloignées, donc elles ne s'en sentent pas pleinement partie prenante et je crois qu'il y a là une lacune de notre système, de notre politique du théâtre public, puisque je demeure convaincue que cette politique ne peut pas se résumer ou se diluer dans une infinité de présence informelle ou sur le territoire, elles doivent s'ancrer dans un certain nombre de lieux repères et dans un certain nombre de lieux dotés des moyens correspondants à des vraies missions de service public.

Donc mon sentiment est que nous aurons à prendre en compte dans les années qui viennent une transformation profonde du paysage théâtral français et qu'il est du devoir de l'Etat d'en être l'accompagnateur de façon responsable et sensible.

L'institution théâtrale

Parlons si vous le voulez bien un moment de l'institution théâtrale. Le constat que l'on peut faire en toute clarté aujourd'hui est que dans leur grande majorité, malgré des efforts de gestion qu'il faut reconnaître, le poids du fonctionnement, ce que nous appelons le théâtre en ordre de marche n'a cessé de s'alourdir au détriment des crédits dévolus à la création. Et je crois qu'il convient de trouver le moyen de recentrer leur action autour du plateau de l'acteur, de l'auteur et du renouvellement des écritures. A ce titre, le débat qui s'est installé autour du partage des outils, le souhait de pouvoir pour certains travailler en collectif, la remise en question parfois de la prééminence du metteur en scène, la recherche de l'association d'auteurs (ce que par exemple compte développer Robert CANTARELLA, que je viens de nommer à Dijon, ce qu'il veut développer avec Philippe MINYANA) tout cela contribue à affirmer davantage le rôle de la création dans l'institution théâtrale.

Je peux citer également à titre d'exemple le projet qu'ont bâti autour du CDN de Valence, Philippe DELAIGUE et Christophe PERTON qui nous ont proposé un centre dramatique Sud Rhône-Alpes en partenariat avec la ville de Valence, le département de la Drôme et de l'Ardèche ainsi que la Région. Ce projet me semble juste et nous souhaitons qu'il soit opérationnel dès la fin de cette année, il est assez emblématique de cette recherche du partage de l'outil par des artistes aux itinéraires forts au plan local, national, voire international, et au service d'un territoire.

Mais tout en citant ces aventures particulières qui sont des recherches de l'avenir du théâtre public, je veux dire aussi que pour moi il n'y a pas un seul modèle, il n'y a pas une forme institutionnelle unique qui s'impose.La formule dans chacun des lieux doit être à la croisée, à la rencontre, du projet de l'artiste ou des artistes et de l'attente de la cité. Et la réponse des artistes peut être très variée. Je peux même imaginer que des artistes dans notre République trouvent leur place dans cette action publique sans être pour autant dans cette quête d'une relation étroite avec la cité. C'est un sujet difficile, mais je crois qu'il est essentiel de préserver aussi cette hypothèse. Et c'est à l'Etat et aux collectivités locales concernées de savoir s'ils se saisissent de ces propositions.

Alors on le sait bien, la charte des missions de service public qui a été élaborée par mon prédécesseur a redéfini, et c'était tout à fait nécessaire, un certain nombre de principes, mais c'est dans la pratique des uns et des autres, dans les actes artistiques que s'ébaucheront, j'oserais dire, les vraies solutions à la condition, et je le dis aussi, que chacun dès lors qu'il assume la direction d'une institution assume aussi de la façon la plus rigoureuse les obligations de gestion. D'une façon générale, il faut que ce confirme, je l'espère rapidement, dans un grand nombre de théâtres et quels que soient leurs statuts, la capacité des équipes en place d'associer d'autres créateurs. Et il me semble que ce souhait est aujourd'hui partagé largement par les créateurs, par les collectivités territoriales, et l'Etat. La restauration de la marge artistique des établissements, à laquelle je travaille, prendra tout son sens si elle permet une réelle avancée dans ce domaine. Et je compte vraiment sur la volonté, sur l'imagination des équipes pour y travailler.

L'aide aux compagnies

J'en viens, et c'est le troisième sujet que je voulais évoquer devant vous, à l'aide aux compagnies parce qu'elle est aussi au delà des institutions, une des pierres fondatrices de la vie théâtrale dans notre pays. Il est clair que la création théâtrale ne saurait se limiter au cadre institutionnel, et au-delà de tout le dispositif incitatif que l'Etat met en place pour conforter la place des artistes dans notre pays, l'aide aux compagnies est le garant de la vitalité, de la diversité du secteur, c'est le vivier de la création théâtrale.

Sur 1500 compagnies une sélection rigoureuse est opérée, basée sur l'avis de comité d'experts indépendants et elle permet de repérer les équipes les plus créatives, les plus exigeantes. 580 compagnies reçoivent à ce titre une aide de l'Etat. Si l'on compare avec les pays voisins je crois que nous pouvons en être fiers. En tout cas, c'est un acquis important de la politique culturelle en France, et la réforme qui a été mise en place en 1999 permet de maintenir ce chiffre en intervenant à l'intérieur de cet ensemble de façon plus efficace et plus importante aussi au plan financier, tout en alimentant un mouvement là aussi nécessaire à l'émergence de nouveaux talents et de nouvelles équipes. Et ainsi en 2000, 173 compagnies sont entrées pour la première fois dans notre dispositif d'aide. Celui-ci vous le savez distingue deux modes d'intervention. Il y a le conventionnement qui permet sur la durée, d'accompagner significativement donc l'activité d'une équipe dont le rayonnement, la régularitde la production, les capacités de recherche sont avérées. Et l'aide ainsi apportée est d'1 MF sur trois ans au minimum.

Et puis il y a un second mode d'intervention qui est l'aide à la production dramatique et qui vise à donner de vrais moyens à des projets de création ambitieux, des moyens qui à chaque fois doivent être ajustés le mieux possible à la réalité de chaque compagnie.

Cette réforme, je le sais, c'est pourquoi je voulais l'évoquer ici, a suscité de nombreux débats et a même été contestée. Le remplacement progressif des aides annuelles a évidemment inquiété nombre de créateurs.

Je veux noter deux choses : d'abord nous aidons le même nombre de compagnies, 582 en 2000 qu'en 99, pour un montant moyen qui a progressé chaque année pour atteindre en 2000 : 238 000 F. Ca veut dire qu'il n'y a pas eu régression sur le plan de ces aides. Et le nombre des aides à la production est passé de 254 à 282 et le nombre des compagnies subventionnées de 217 à 250.

L'Etat a donc continué à soutenir ce vivier avec une progression sensible des crédits de la production théâtrale, dans sa forme essentielle.

Toutefois et compte tenu des débats qui ont eu lieu autour de cette réforme, nous sommes avec Sylvie Hubac très attentifs à trois points. Le premier concerne l'accompagnement de la suppression de l'aide annuelle. Et il convient que cette réforme soit l'occasion d'un vrai dialogue avec l'ensemble des partenaires, en particulier avec les collectivités locales, afin que toutes ces équipes de théâtre de proximité, dont le rôle d'animation, parfois de premier contact avec l'acte théâtral, avec la vie théâtrale, est tout à fait essentiel et que ce théâtre de proximité puisse continuer de trouver sa place.

Le deuxième point concerne l'aide à la production qui ne devrait pas, c'est la règle qui a été posée, être accordée deux années de suite à une même équipe pour deux projets différents. Eh bien, il faut le reconnaître, une application pure et dure de ce texte conduit de toute évidence à des effets pervers. Pourquoi ? Simplement parce que les projets compte tenu de leur nombre, des difficultés absolument inhérentes au montage d'une production, en particulier au montage des tournées dont nous savons ô combien elles sont artistiquement et économiquement absolument indispensables, eh bien ces difficultés font que les projets ne peuvent pas toujours se vivre sur une seule année.

J'ai donc demandé, en accord avec Sylvie Hubac bien sûr, même sur sa proposition, aux DRAC, aux directions régionales, de considérer comme possible, compte tenu de la nature de chaque projet de répartir sur deux ans l'aide de l'Etat à une même compagnie et de ne pas s'interdire d'aider la même compagnie sur deux projets différents et successifs. Simplement ceci doit être vécu comme un assouplissement de la règle et pas la règle se substituant à l'évolution qui a été voulue. Mais je crois que c'est un assouplissement nécessaire dans certains cas. Enfin, le conventionnement doit se faire réellement sur la base d'1 MF sur trois ans qui encore une fois est un chiffre plancher.

Alors, je le souligne, cette réforme n'a pas été lancée sans moyens. En deux exercices (99 et 2000) les crédits déconcentrés dévolus aux compagnies ont augmenté de 14 % passant de 116 MF à 132,8 MF.

Depuis lors le Premier ministre a fait voter, vous le savez sans doute, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2000, un supplément de crédit, pour mon ministère, de 50 MF et nous avons avec lui décidé d'affecter ce crédit entièrement au spectacle vivant. Et sa répartition est déconcentrée aux deux tiers, c'est à dire que nous nous inscrivons bien là dans le mouvement engagé, surtout depuis 91 de la décentralisation. Mais pour la répartition de ces crédits j'ai fixé par une circulaire aux DRAC le 23 juin dernier quatre grands axes d'orientation selon l'ordre de priorité suivant. Pourquoi le 23 juin dernier, c'est important de le dire parce que je connais à la fois l'inquiétude et parfois l'impatience de ceux qui attendent ces crédits, tout simplement parce qu'il fallait que ce collectif ne soit pas seulement décidé par le gouvernement, mais voté par le Parlement. C'est notre loi démocratique, donc il a fallu attendre la fin du mois de juin.


Les priorités sont :

1/ la restauration des marges artistiques des institutions.

2/ L'augmentation des interventions en faveur des compagnies.

3/ Un soutien aux équipes développant des projets innovants ou expérimentaux dans des lieux parfois un petit peu tout à fait nouveau aussi.

4/ Enfin, c'est là où les équipes sont engagées dans cette démarche, un appui à leurs activités d'enseignement et de formation.

Voilà ce que je souhaitais vous dire au sujet de ma politique à l'égard du théâtre public, au moment où s'ouvre un de ses rendez-vous majeur : le Festival d'Avignon. Je souhaite pour ma part, tout au long de ma mission au ministère de la culture, avoir des occasions multiples dans des enceintes diverses de débattre avec vous, avec vous la presse qui avez droit à ce dialogue et bien sûr avec l'ensemble des créateurs aussi avec ceux des responsables publics qui sont engagés dans cette politique. Nous aurons d'autres rendez-vous mais je ne voulais pas rater celui du festival d'Avignon. Je vous remercie de votre patience.


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