Discours et communiqués de presse
Jean-Jacques Aillagon a réuni les membres du groupe de travail présidé par Éric Baptiste afin de signer le code de projet commun entre radiodiffuseurs, producteurs de phonogrammes et éditeurs

16 mai 2003

Jean-Jacques Aillagon, Ministre de la culture et de la communication, a présidé, ce lundi 5 mai, à la signature d'un accord interprofessionnel entre les radiodiffuseurs, représentés par la CNRL, le CNRA, la Férarock, IASTAR, Radio France, le groupe NRJ, le groupe Lagardère, FUN radio et RTL 2, les producteurs de phonogrammes représentés par le SNEP et l'UPFI, et les éditeurs de musique de la CSDEM et de la CEMF. La signature s'est effectuée en présence de Laurent Bayle, Président de la Cité de la musique et de Jacqueline de Guillenchmidt, membre du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel.

Cet accord résulte des conclusions d'un groupe de travail constitué au début de l'année 2002 sous l'égide d'Eric Baptiste, secrétaire général de la CISAC. Il pose des règles de " bonne conduite " entre producteurs, éditeurs et radio-diffuseurs, de façon à promouvoir la diversité des opérateurs et des œuvres et encadrer le développement des pratiques commerciales qui se doivent d'être équitables et transparentes, et interdire tout comportement visant à " payer pour être diffusé " (" pay per play "). Ce code permet d'établir un consensus sur la direction commune dans laquelle il convient d'aller, la diversité musicale constituant un objectif d'intérêt commun pour l'ensemble des acteurs de la filière musicale.

Le Ministre s'est félicité de l'aboutissement, à l'issue d'un travail conduit sous l'égide du Ministère de la culture, d'une initiative privilégiant le dialogue interprofessionnel plutôt que le recours à des mesures législatives ou réglementaires. Il a enfin rappelé l'importance de l'établissement du dispositif de suivi via l'Observatoire de la musique de la Cité de la musique, qui permettra la poursuite du dialogue entre les parties puisque des rendez-vous réguliers sont prévus pour vérifier l'application de l'accord, avec les pouvoirs publics et l'autorité de régulation, et pour prendre des mesures supplémentaires s'il était constaté une dégradation de la diversité musicale.

Enfin, comme le Ministre s'y était engagé lors du précédent MIDEM à Cannes, de nouveaux travaux seront conduits pour traiter des relations entre les producteurs de phonogrammes et les diffuseurs télévisuels.

Ci-dessous le texte de l'accord

ACCORD INTERPROFESSIONNEL
ENTRE LES RADIODIFFUSEURS, LES PRODUCTEURS DE PHONOGRAMMES, ET LES ÉDITEURS DE MUSIQUE

PREAMBULE :

- la programmation est libre, et doit rester du seul ressort des services de communication radiophonique,

- la diversité des formats radiophoniques doit être non seulement préservée, mais également encouragée,

- l'exposition de la production musicale française, en particulier les nouveaux talents, constitue un enjeu commun aux auteurs, artistes, producteurs et éditeurs de musique d'un côté, et aux radios, de l'autre. La loi sur les quotas d'œuvres d'expression française a constitué une première modalité de prise en compte de cet enjeu. - les parties reconnaissent que l'enjeu de la diversité musicale dépasse le champ du présent accord et qu'il s'attache à la diffusion musicale par tout autre moyen et sur tout autre support. A cet égard, il est expressément convenu que si un accord du même type devait être ultérieurement conclu, selon un processus similaire , entre les représentants des auteurs, artistes, producteurs et éditeurs de musique d'une part et les diffuseurs télévisuels d'autre part, les stipulations du présent accord seraient immédiatement révisées afin d'éviter tout traitement discriminatoire de l'une ou l'autre des professions dans le cadre des deux accords .

- les parties rappellent que les radios de service public, parties au présent accord, dans le respect de leur spécificité et de leurs missions et charges, ont dans le cadre de leurs missions de service public une fonction d'exemplarité en faveur de la diversité musicale - les parties rappellent leur attachement à ce que, conformément aux conclusions du rapport de Eric Baptiste sur les relations entre les radios et la filière musicale remis au Ministre de la culture le 27 février 2002, une large consultation soit organisée régulièrement par le C.S.A sur les enjeux de la filière musicale.

- la conclusion du présent accord ne fait pas obstacle à la négociation d'autres accords bilatéraux entre les signataires dans la mesure où ils ne lui sont pas contraires et s'ils sont portés à la connaissance des parties à cet accord.

Il a été convenu ce qui suit :

I. Clause de diversité musicale

Les parties au présent code reconnaissent que l'ensemble des partenaires de la filière musicale et radiophonique partagent des enjeux communs et en tout premier lieu l'enjeu de la diversité musicale ainsi que la contribution à l'émergence de nouveaux talents. La reconnaissance partagée de ces enjeux s'établit dans le respect des métiers de chacun et de leurs spécificités et contraintes.

Dans le présent accord, la diversité musicale s'entend tout à la fois comme diversité :
- des productions,
- des diffusions,
- des producteurs
- des diffuseurs.

I.1. En conséquence les producteurs de phonogrammes s'engagent à faire leurs meilleurs efforts pour :
- maintenir et accroître leurs investissements en faveur du développement et de la promotion des artistes de la musique, en particulier en ce qui concerne les artistes d'expression française. Ils s'engagent par ailleurs à communiquer, semestriellement, des informations détaillées et complètes en ce qui concerne les principaux indicateurs chiffrés permettant de mesurer les efforts qu'ils ont accomplis dans le développement et la promotion des artistes et notamment ceux d'expression française.
- faciliter la mise à disposition aux radios des nouvelles publications d'albums et de singles, notamment à l'égard des radios associatives et des radios commerciales n'appartenant pas à des réseaux nationaux. Ils s'engagent à étudier tous les moyens, notamment la transmission par Internet des fichiers musicaux sécurisés, propres à améliorer l'accès aux nouveautés.
A cet égard, un groupe de travail spécifique est constitué dont la première réunion s'est tenue le 25 février 2003.

I.2 Les radiodiffuseurs s'engagent à faire leurs meilleurs efforts, dans le respect de leur format musical, pour :
- préserver et encourager la diversité des œuvres et des interprètes diffusés
- garantir une diffusion des titres et un accès à l'antenne des différents producteurs phonographiques dans des conditions objectives, transparentes, équitables et non discriminatoires et notamment de ne pas privilégier sur leurs antennes les œuvres produites, co-produites ou co-éditées par eux-mêmes, une de leurs filiales ou une structure appartenant au même groupe, ou les œuvres susceptibles de faire l'objet d'autres exploitations que la diffusion sur leur propre antenne

I.3. Les parties s'entendent pour suivre ces différents engagements selon les modalités définies au point 3 du présent accord sur la base des indicateurs suivants, observés sur la tranche horaire 24h-24h :
- Part du top 40 des titres les plus diffusés dans l'ensemble de la diffusion
- Rotation moyenne hebdomadaire (en moyennes mensuelles ou trimestrielles) d'un titre francophone et d'un titre de production française non francophone et nombre brut de rotations par radio
- Rotation moyenne hebdomadaire (en moyennes mensuelles ou trimestrielles) d'un titre international
- Nombre d'artistes différents diffusés
- Nombre de titres différents diffusés et nombre de semaines de présence à partir du moment où une référence entre en programmation
- Part des nouveautés dans l'ensemble de la diffusion (à partir de 3 et/ou de 12 diffusions hebdomadaires
) - Nombre mensuel moyen de nouvelles entrées par station et sur l'ensemble des stations de l'échantillon
- Classement des radios les plus " starters " par formats (jeunes, jeunes-adultes et adultes)
- Répartition par genres musicaux - Taux d'exclusivité de diffusion de titres de chaque radio
- Répartition des titres par labels
- Répartition des titres diffusés par structures de production (majors, indépendants distribués par des majors, indépendants distribués par des indépendants)

Cette liste peut-être modifiée par accord des parties signataires du présent texte.

Si l'observation révélait la nécessité de renforcer les efforts en faveur de la diversité musicale, les parties s'engagent à se concerter à nouveau. Un rapport sur ces constats et ces actions sera transmis au Ministre de la culture et de la communication et au Président du CSA.

II. Relations entre production et diffusion.

II.1. Les parties estiment que la séparation opérationnelle entre les fonctions d'édition et de production musicale d'une part, et de programmation et de diffusion d'autre part, contribue de manière déterminante à la diversité musicale. Ce principe d'indépendance stricte des fonctions doit s'exprimer dans le cadre de la liberté du commerce et du droit de la concurrence.

II.2. Les radiodiffuseurs s'engagent à faire leurs meilleurs efforts pour assurer à la diversité des producteurs de phonogrammes un accès aux accords commerciaux, quel qu'en soit le type dans des conditions objectives, transparentes, équitables et non discriminatoires.

A cet égard, les parties conviennent que les accords au rendement, notamment parce qu'ils associent les radiodiffuseurs au risque pris par les producteurs de phonogrammes, constituent, dans leur principe, des pratiques acceptables et utiles à l'ensemble des parties. On entend par accord au rendement un accord, limité dans le temps, par lequel un producteur de phonogrammes bénéficie de l'espace publicitaire sur l'antenne d'une radio afin de promouvoir un enregistrement phonographique dans le cadre de messages publicitaires en rémunérant totalement ou partiellement cet achat par le biais d'un intéressement sous forme de reversement commercial fondé sur l'exploitation de cet enregistrement.
Ainsi, les parties à l'accord s'entendent sur le fait que les accords au rendement servent la diversité musicale particulièrement lorsqu'ils s'appliquent aux " nouveaux talents " au sens de la loi sur les quotas radiophoniques et aux " relances de carrière ".

II.3. La pratique du " pay per play " est prohibée. On entend par " pay per play ", un accord contractuel entre une entreprise de radiodiffusion et un producteur et/ou éditeur et/ou licencié et/ou distributeur phonographique, aux termes duquel ce dernier s'engage à rémunérer l'entreprise de radiodiffusion, par une rémunération fixe ou variable assise sur les recettes de l'exploitation commerciales d'un phonogramme ou de l'œuvre qui y est reproduite, en contrepartie du seul engagement souscrit par cette dernière, de diffuser ledit phonogramme dans le cadre de son programme radiophonique.

II.4. Les parties rappellent plus généralement que les choix éditoriaux et artistiques doivent toujours primer sur les considérations économiques et commerciales. En conséquence, ni la programmation d'un titre ni ses modalités de programmation ne doivent être conditionnées par la conclusion préalable d'un accord commercial quel qu'il soit entre diffuseur et producteur.

II.5. Les parties s'entendent pour suivre ces différents engagements selon les modalités définies au point 3 du présent accord sur la base des indicateurs suivants, observés sur la tranche horaire 24h-24h :
- comparatif des piges publicitaires par producteur avec les indicateurs de diversité musicale définis au point 1 et les parts de marché des producteurs sur les différentes antennes d'une part, sur le marché discographique d'autre part.
- Répartition des titres par labels
- Répartition des titres diffusés par structures de production (majors, indépendants distribués par des majors, indépendants distribués par des indépendants)

III. Observation

III.1. Les signataires rappellent que la disponibilité de données et d'analyses fiables et reposant sur des méthodes mutuellement acceptées est essentielle.

III.2. Les signataires reconnaissent l'Observatoire de la musique de la Cité de la musique comme l'instance de référence en matière de confection et d'analyse des indicateurs mentionnés dans le présent accord permettant son suivi.

III.3. Les signataires s'engagent à participer à la direction/supervision des études pilotées par l'Observatoire de la musique. En tant que de besoin, les parties conviennent qu'il pourrait être utile qu'elles contribuent à la réalisation de ces études, soit en participant à leur financement, soit en communiquant à l'Observatoire de la musique les études ou données dont elles disposent.

III.4. Les études seront fournies sur une base trimestrielle. Elles seront sous traitées à un ou plusieurs organismes de référence, choisis sur la base d'un cahier des charges reprenant les indicateurs présents au présent accord ou le cas échéant d'autres indicateurs définis d'un commun accord.

IV. Suivi

IV.1. Les parties conviennent de se réunir, deux fois par an, sous l'égide du Ministère de la culture et de la communication, pour analyser les données collectées par l'Observatoire et d'un premier rendez-vous au plus tard au mois septembre 2003, pour analyser au vu des études statistiques fournies par l'Observatoire, les efforts accomplis en matière de diversité musicale.

IV.2. Les parties souhaitent que l'observation de ces données fasse l'objet d'un rapport annuel remis au Ministre de la culture et de la communication et au Président du CSA

IV.3. La liste des membres du groupe de suivi est annexée au présent accord

Paris, le 05 mai 2003

Signataires :
Pour les radiodiffuseurs :

Radio France, Le CNRA, La CNRL, IASTAR, La FERAROCK, Groupe NRJ, Groupe Lagardère, FUN Radio, RTL 2

Pour les éditeurs de musique

La CSDEM, La CEMF

Pour les producteurs de phonogrammes

Le SNEP, L'UPFI

En présence de :

La Cité de la Musique, Le CSA

Liste des membres du groupe de suivi :

CNRA, CNRL, Férarock, IASTAR France, SRN, SIRTI, Radio France, SNEP, UPFI, CEMF, CSDEM, ADAMI, SACEM, CSA, DDM, DMDTS


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