Victor
Hugo |
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Départ de Victor Hugo pour l'Angleterre, Anvers, le 1er août 1852. À la droite de V. Hugo, Alexandre Dumas, réfugié à Anvers pour fuir ses créanciers Dessin de Frédéric Théodore Lix Paris, Musée Victor Hugo © AKG Paris |
Victor Hugo et son fils François-Victor (né en 1828) Peinture d'Auguste de Chatillon, 1836 Paris, Musée Victor Hugo © AKG ParisVictor Hugo et son fils François-Victor (né en 1828) Peinture d'Auguste de Chatillon, 1836 Paris, Musée Victor Hugo © AKG Paris |
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Victor Hugo est bien le seul qui
ait fixé aussi efficacement son année de naissance dans la mémoire de
la postérité… " Aujourd'hui, il est vrai, songeant
aux récentes controverses qui ont accompagné l'an 2000, nous dirions
que le XIXe siècle, commencé en toute rigueur au 1er janvier de 1801,
n'avait qu'un an. Mais peu importe, la phrase est consacrée. Le " sang lorrain ", c'est l'héritage
jamais renié du père, le général Hugo, soldat de la Révolution et de
l'Empire, symbole de gloire militaire et nationale. Le
" sang breton " c'est l'héritage maternel, christianisme, tradition,
goût de la vieille France, et aussi de la liberté (comment nier que
l'on fut plus libre sous Louis XVIII que sous l'Empereur ?), c'est Chateaubriand,
c'est tout le romantisme. Hugo s'est bien reconnu et bien défini dans
ce " naquit… à la fois ". Coïncidence de la bataille d'Hernani et de la Révolution libérale et tricolore de 1830, Victor Hugo va apparaître pendant près de vingt ans comme un fidèle et même comme un ami de la nouvelle dynastie orléaniste. Sa pensée sociale s'approfondit cependant, sans être amortie par la gloire ni la fortune. Il fait rééditer le Dernier jour d'un condamné en 1832, non sans préciser dans la préface : " [l'auteur] avoue hautement que le Dernier jour d'un condamné n'est autre chose qu'un plaidoyer, direct ou indirect, comme on voudra, pour l'abolition de la peine de mort ". Il évolue peu à peu du combat contre la peine de mort au combat pour les misérables. La lutte pour la reconnaissance de la dignité humaine sera l'un des éléments les plus constants de sa pensée. Il entreprend Les Misérables dès 1846. La liberté politique reste décisive
pour lui à cette date encore. Comme le Polignac de 1829, le Guizot de
1847 se fixe résolument à droite, poussant ainsi involontairement les
libéraux vers l'opposition de gauche. Victor Hugo acceptera la Révolution
de 1848 comme il avait accepté celle de Juillet 1830, sans combattre
ni insulter les vaincus. Là encore, il s'est bien résumé lui-même,
à sa manière. Lucide, il écrit en 1851 dans Carnets,
albums, journaux (2) :
" depuis vingt-cinq ans, je suis simplement un homme de liberté… La
liberté me paraissait compatible avec la monarchie et je ne voyais pas
la nécessité absolue de la République. Lorsqu'il écrit ces lignes, dont le romantisme peut prêter à sourire en 2002, Victor Hugo, comme quelque soixante-dix représentants républicains, est un exilé, un proscrit. Pendant dix-neuf ans, sur le rocher d'une île anglo-normande, il sera " l'homme qui dit NON ". Il le demeurera toute sa vie. Il vivra le siège de Paris au côté des Parisiens mais il quittera très vite l'Assemblée de Bordeaux, où il avait été élu en février 71, et ne prendra pas part non plus à la révolte de la Commune. Il ne l'aimera que vaincue et calomniée, à contre courant encore une fois. Une affiche de l'élection partielle, dans la Seine, du 7 janvier 1872, la dernière à laquelle il se présentera et où il sera battu, donne ce programme dont les électeurs n'ont pas voulu mais qui résume magnifiquement les convictions de l'homme : " Amnistie ; abolition de la peine de mort ; dissolution de l'assemblée ; rentrée du gouvernement à Paris ; levée immédiate de l'état de siège. " Républicain à la fois emblématique et critique, parfois déçu ou déchiré, il ne sera pleinement l'homme du régime (de Jules Grévy, de Jules Ferry, de Gambetta surtout) qu'après que celui-ci aura accordé, le 14 juillet 1880, l'Amnistie totale aux Communards. S'ouvrent alors les cinq années d'apothéose officielle, culminant au début de juin 1885 avec l'ensevelissement au Panthéon, définitivement récupéré par la République à cette occasion. L'humanité aura bien été l'ordre
principal de sa vie. C'est que Victor Hugo croyait passionnément
à la valeur des grandes réalisations auxquelles le fameux siècle avait
abouti. Ce rejet, perceptible déjà sans doute
en 1985, est aujourd'hui de l'ordre de l'évidence. Quant au Hugo patriote français, comme tout le monde ou presque en son temps, et d'abord tous les français républicains, n'avait-il pas, de Guernesey, désigné pour Avenir " la République Universelle ", dont la première étape serait " les États-Unis d'Europe " ? Peut-on dire aujourd'hui que cette autre contradiction est surmontée ? Victor Hugo n'a pas tout dit, mais il en a dit assez pour qu'il reste peut-être utile de se souvenir encore de lui. Maurice Agulhon
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