Avocat républicain, préfet, député
de la Marne, ministre dès son entrée en politique, président
du Conseil en 1895-1896, co-président du congrès de fondation
du parti radical en 1901, Léon Bourgeois est l'archétype
de ces radicaux de gouvernement de la fin du XIX e siècle qui
vont tenter de mettre en uvre et de théoriser un réformisme
graduel permettant de transformer la société sans la bouleverser
et d'étendre la civilisation aux comportements sociaux et internationaux.
Léon Bourgeois a donné au radicalisme sa doctrine sociale
en publiant, en 1896, Solidarité, dans lequel il propose
une voie médiane entre le collectivisme et l'individualisme,
le " solidarisme ". Il y expose l'idée selon laquelle,
chaque individu, totalement libre, est cependant lié à
la chaîne des générations qui le précèdent
comme à la société dans laquelle il vit, qui lui
ont apporté le progrès accumulé au cours des siècles
et lui permettent de bénéficier du travail de ses contemporains.
En contre-partie, il doit acquitter sa part de ce " quasi-contrat
" en acceptant de remplir le " devoir social " que l'État
est en droit d'exiger de lui, au nom de la société, par
exemple sous la forme du paiement de l'impôt, qui permettra d'aider
les plus démunis.
Au début du XXe siècle, Léon Bourgeois se consacre
à la défense de la paix par l'arbitrage et l'entente entre
nations. Délégué aux conférences internationales
de La Haye, il y défend l'idée d'un droit international,
appliqué par un tribunal souverain et préconise dans un
ouvrage de 1906 (Pour une société des nations),
la formation d'une organisation des nations civilisées du globe.
À ce titre, il deviendra le premier président de la SDN,
en dépit des doutes qu'il exprime sur la faiblesse de ses moyens
d'action, alors qu'il aurait souhaité qu'elle soit dotée
d'une véritable force armée.
Oublié par l'histoire, souvent plus sensible aux porteurs d'un
grand dessein, fût-il utopique, Léon Bourgeois reste un
des honnêtes artisans de l'effort des Républicains de gouvernement
pour faire passer dans la pratique les promesses de progrès de
la culture républicaine.
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