Mesdames et messieurs les élus,

Mesdames et messieurs,

Chers tous,

Chers amis,

 

Très cher Bernard…

Merci de me donner la parole mais je voudrais commencer par rendre hommage au directeur hors-du-commun que tu auras été pour ce festival d’Aix, ces dix dernières années. Bravo, et merci, pour le travail exceptionnel accompli. Exceptionnel sur le plan de la programmation, qui aura toujours fait la part belle à la diversité, au dialogue des cultures, et à l’audace. Cette 70e édition, la dernière que tu signes, en est encore l’illustration. Je voudrais aussi rendre hommage à l’engagement inépuisable que tu as déployé pour ouvrir les portes de ce festival au plus grand nombre, notamment aux jeunes générations. Et enfin, pour terminer sur un sujet qui m’est également cher et qui nous réunit aujourd’hui ici, je tiens à saluer ton militantisme constant en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes.

La femme est à l’honneur de cette 70e édition, placée notamment sous le signe d’Ariane, de Didon, de Renata, de la Reine de la nuit.

Plusieurs d’entre elles sont incarnées par des interprètes issues de l’Académie du festival, dont nous fêtons cette année les 20 ans..

Tu as soutenu aussi de nombreuses créatrices : librettistes, compositrices, metteuses en scène… J’ai encore découvert avec bonheur hier soir la mise-en-scène d’Ariane par Katie MITCHELL, qui est en résidence ici depuis 2012. Nous avons besoin – notre pays, notre culture ont besoin de volontarismes comme les tiens, cher Bernard, car nous sommes encore loin de l’égalité en actes.

C’est un combat que vous êtes nombreux à partager, ici, et il est au cœur de vos « Rencontres nationales » aujourd’hui …

Je veux remercier Accord Majeur pour l’organisation de ces débats et le choix de ce thème, le « défi des diversités », qui doit tous nous mobiliser : pouvoirs publics, professionnels, société civile.

Il reste du chemin, et le champ de la musique ne fait pas exception…

-       Les femmes restent sous-représentées dans différents métiers :

  • 9% des compositeurs de la SACEM ;
  • 3% des chefs d’orchestre, faut-il le rappeler ;

-       Elles sont moins nombreuses aux postes à responsabilité :

  • Seulement 12% de femmes à la tête des Scènes de musique actuelle ;
  • Moins d’un tiers au sein des instances du Centre national des variétés ;
  • Et si je salue chaleureusement la nomination de Frédéric MAURIN à la tête de l’Orchestre national du jazz, je ne peux que regretter l’absence de femmes dans la short-list finale qui comptait sept sélectionnés ;

-       Les femmes sont en moyenne moins soutenues :

  • Elles bénéficient de seulement 16% des aides à l'écriture des œuvres musicales ;

-       Elles sont aussi moins visibles sur nos scènes :

  • Cette saison, moins de 3% des représentations d'orchestres ont été dirigées par des femmes en France ;
  • Seuls 5% des œuvres contemporaines et 2% du répertoire classique joués étaient signées par des compositrices.

-       Et mécaniquement, les femmes sont moins valorisées, moins récompensées :

  • Sur la période 2010-2017, seules 8% des lauréats des Victoires de la Musique étaient des femmes dans la catégorie "meilleur album".

Ces chiffres nous obligent. Je sais que vos associations sont engagées de longue dans le combat contre les discriminations de toute nature.

J’ai moi-même pris des engagements pour le ministère, qui a un double devoir d’exemplarité : comme administration publique, et comme acteur de la sphère culturelle, qui devrait être à l’avant-garde dans tous les grands combats de société.

 

 

J’ai décidé d’agir sur tous les fronts :

-       L’égalité de rémunération, d’abord : nous allons consacrer un demi-milliards d’euros au rattrapage des inégalités salariales au sein du ministère d’ici 2022.

  • Je compte sur les acteurs culturels pour prendre le même chemin.

-       L’accès aux postes à responsabilité, ensuite :

  • Je vais établir la parité dans les nominations à la tête des établissements publics du ministère, à l’issue du quinquennat, contre un tiers de femmes aujourd’hui.

Là encore, je compte sur les acteurs culturels pour prendre le même chemin :

-       Je rappelle que pour les labels, j’ai pris la décision de fixer des objectifs de progression : +10% par an là où les femmes représentent moins d’un quart des dirigeants ; +5% là où elles représentent entre 25 et 40% des dirigeants.

-       Les mêmes objectifs de progression seront mis en œuvre, dès 2018, en matière de programmation, pour renforcer la visibilité des artistes femmes.

Un suivi sera instauré, et un système de « malus » sur les subventions s’appliquera aux acteurs qui ne respecteraient pas leurs obligations.

Chacun doit prendre sa part dans ce combat, comme dans la lutte contre les discriminations liées à l’âge, au handicap, à l’orientation et à l’origine sexuelle, à la religion, à l’origine, au lieu de résidence …

Défendre la culture, c’est défendre la création, mais c’est aussi défendre des valeurs. C’est porter un certain modèle de société.

Je sais pouvoir compter sur vos convictions, sur votre engagement.

Je trouve des raisons d'espérer et d'y croire dans l'action remarquable qu'a entreprise depuis plusieurs années l'Académie du Festival d'Aix non seulement pour renouveler et diversifier les publics mais aussi pour promouvoir la force créatrice et le talent des femmes, notamment au travers de programmes de formation au leadership et de constitution de réseaux de solidarité qui, incontestablement, dont leur preuve.

Je voudrais ce matin vous dire un mot des chantiers ouverts en matière de politique musicale, autour de trois préoccupations :

  1. la création 
  2. la diffusion
  3. l’éducation

 

 

 

1 : En matière de soutien à la création, je veux rappeler mes engagements. Des engagements pour vos moyens d’abord. Je me suis battue pour obtenir le maintien du budget de mon ministère l’an dernier.

Je viens de me battre pour obtenir le dégel des crédits dédiés à la création en 2018. Je vous le confirme officiellement aujourd’hui, mon ministère va pouvoir honorer tous ses engagements.

J’ai entendu des interrogations sur le Centre national de la musique, il y a quelques jours encore.

Je l’ai dit à plusieurs reprises et je le réaffirme ici : c’est le ministère qui restera en pilotage exclusif des aides et des politiques publiques pour les musiques que vous représentez. Le CNM assurera la gestion du soutien économique pour les musiques actuelles et la musique enregistrée uniquement.

Ça ne veut pas dire que votre secteur n’a pas sa place dans ce futur établissement, qui assurera aussi des missions d’observation, de formation et de rayonnement international qui peuvent vous être bénéfiques. Le ministère aura sa place dans la gouvernance et sera là pour porter votre voix.

La meilleure marque de cet engagement, c’est la bonne nouvelle que je tenais à pouvoir vous annoncer en direct ce matin :

-       Un nouveau Centre national de création musicale va voir le jour – ce sera donc le huitième : nous avons décidé de labelliser le théâtre Athénor de Saint-Nazaire, qui fait preuve d’un engagement exemplaire en matière d’éducation artistique et culturelle et de lutte contre les disparités géographiques, avec ses actions « nomades » sur le territoire.

-       Je veux saluer sa fondatrice et directrice Brigitte LALLIER-MAISONNEUVE, qui porte ce projet depuis 1985 et qui devient ainsi la première femme à la tête d’un CNCM. C’est donc une double bonne nouvelle.

Un mot du soutien à la commande musicale, enfin : vous savez qu’aujourd’hui, cette aide est conditionnée au fait de jouer en France, nous allons faire évoluer le système pour lever ce verrou et accompagner tous les compositeurs, où que leurs œuvres soient programmées – en France, en Europe, et partout dans le monde. Car nous ne pouvons que nous réjouir de ce rayonnement.

Je rappelle par ailleurs que nous avons renforcé le soutien à la commande musicale cette année, pour accompagner quatre créations supplémentaires.

 Le soutien à la création passe ensuite par des engagements sur les conditions de vie, de travail et de rémunération des artistes. Et là encore, je veux rappeler que je n’ai pas baissé la garde une seule fois. Je me suis battue dans le cadre de la réforme de la CSG pour que le pouvoir d’achat des artistes-auteurs soit préservé.

J’ai défendu le régime social spécifique des artistes-auteurs, dans le cadre des réformes en cours, et il n’est pas question d’y revenir. J’ai engagé une concertation avec les représentants des différentes professions pour déterminer les conditions qui garantiraient leur protection sociale, leur pouvoir d’achat, et au-delà, sur leur statut au regard de notre droit d’auteur.

S’agissant des auteurs et des compositeurs, je sais que les organismes de gestion collective veillent à votre juste rémunération et je m’en félicite.

C’est un combat que je porte aussi au niveau européen.

J’ai pris acte du vote du Parlement européen la semaine dernière. Un nouveau débat sera ouvert sur la réforme du droit d’auteur, pour un examen au mois de septembre.

Je resterai entièrement mobilisée d’ici là, avec les créateurs et les éditeurs de presse à mes côtés, pour que le nouveau texte reprenne les avancées majeures sur lesquelles nous avions obtenu un accord en Conseil des ministres, et deux en particulier :

-         La responsabilisation accrue des plateformes dans la rémunération des créateurs dont elles diffusent leurs œuvres : disposition fondamentale pour le secteur musical puisqu’elle s’appliquera à des acteurs comme Youtube ;

-         Et la consécration du droit des créateurs à une rémunération juste et proportionnelle.

Le débat et le vote de la semaine dernière ont été perturbés par les contrevérités qu’ont agitées les opposants les plus virulents au texte.

Le combat continue. Nous avons déjà repris notre travail de conviction.

2: Deuxième pilier : le soutien à la diffusion, de l’échelle territoriale à l’échelle internationale.

 Sur le plan territorial, vous assurez un travail absolument remarquable et je veux vraiment vous en remercier.

Je pense à tous les projets musicaux qui irriguent le territoire : orchestres, opéras, centres de création musicales, ensembles, compagnies lyriques.  Je pense aussi aux festivals, en ce début d’été, qui sont si nombreux dans votre secteur et si structurants pour votre secteur. Ce maillage est le fruit d’un long chemin mené avec les collectivités territoriales dont je salue l’engagement constant, notamment dans le champ musical.

Sur le plan international, votre réseau joue un rôle décisif dans le rayonnement de la création française et je vous en remercie. Nous devons être à vos côtés, plus que jamais.

Aujourd’hui, le soutien apporté par le Bureau Export ne bénéficie pas suffisamment aux musiques que vous représentez.

Et par ailleurs, les aides sont éclatées entre plusieurs guichets – le Bureau Export, l’Institut Français, les services d’action internationale de mon ministère.

Nous allons donc organiser un travail avec vous, piloté par le ministère en concertation avec l’Institut Français et le Burex, pour clarifier les aides à l’export dont bénéficient votre secteur et surtout pour mieux vous accompagner.

 3 : Un mot de notre politique d’éducation dans le champ musical, enfin. Parce que le soutien de votre filière, c’est aussi la formation des publics et des talents de demain.

Nous sommes en train de déployer une politique sans précédent pour l’éducation musicale des enfants. Je sais que beaucoup d’entre vous se sont impliqués dès les premiers mois, je pense notamment à la « Rentrée en musique », et je veux vous en remercier.

J’ai annoncé il y a quelques semaines le doublement des subventions à plusieurs structures « tête-de-pont » dans le développement de la pratique instrumentale et orchestrale, pour décupler leur déploiement – Orchestre à l’école, Démos, les Jeunesses musicales de France notamment... Nous continuerons. C’est un chantier qui se mène sur la durée d’un quinquennat.

En parallèle, nous menons avec le ministère de l’Education nationale une politique inédite pour développer l’apprentissage du chant : nous visons la création d’une chorale par école à horizon 2019, contre une sur quatre aujourd’hui ; et une option « chorale » facultative de 2 heures proposées dans 7.000 collèges à la rentrée.

Un répertoire commun va être constitué pour ces chorales : Laurence EQUILBEY a accepté de nous accompagner dans ce travail et je veux l’en remercier.

Laurence est investie de longue date dans ce combat pour l’éducation musicale de tous, vous le savez. Nous allons l’accompagner dans le déploiement d’un nouveau projet en Ile-de-France et en Normandie pour la production et la diffusion l’art vocal, autour de son chœur « Accentus ». Ce projet assurera également des missions d’éducation artistique et de soutien à la pratique amateure.

Le ministère va donc le soutenir et j’ai aussi souhaité confier à Laurence EQUILBEY la mission d’accompagner la création de structures analogues sur tout le territoire. Elle s’appuiera sur les ensembles vocaux professionnels déjà repérés sur le territoire pour leur engagement dans la production artistique de formes innovantes et l’éducation artistique – à l’image du travail formidable fait ici en région PACA par Roland HAYRABEDIAN, que je salue.

Laurence me présentera ses préconisations à l’automne. Voilà, chers amis,

Les principaux messages et les nouveaux engagements dont je voulais aujourd’hui vous faire part. Vous connaissez mon amour de la musique. Vous connaissez, en particulier, mon goût pour celle que vous représentez.  Vous pouvez donc compter sur mon soutien plein et entier.

Merci à toi une nouvelle fois, cher Bernard, du fond du cœur : merci pour l’engagement des dix dernières années, au service de la musique, au service de notre pays, au service d’un certain modèle de société.

Et tous mes vœux de réussite et de joie à Pierre AUDI pour la conduite des prochaines saisons. Celle qui vient d’être annoncée augure du meilleur.

Merci à tous.