Le 24 février, Frédéric Mitterrand a présenté Gradiva (1939), tableau d’André Masson acquis par l’Etat pour le Musée national d’art moderne, avec le soutien du Fonds du patrimoine et de la Société des amis du Musée national d'art moderne.

Gradiva. Peint par André Masson en 1939, le tableau acquis par l’Etat et présenté par Frédéric Mitterrand le 24 février, illustre l’un des thèmes les plus féconds du surréalisme, traité également par Dali. Il trouve son origine dans un roman de l’écrivain allemand Wilhem Jensen (1903), analysé par Sigmund Freud dans un essai de 1906, traduit en français en 1931 par Marie Bonaparte.
Le roman de Jensen, Gradiva, relate la découverte, par l’archéologue Norbert Hanold, d’un bas-relief du musée national d'archéologie de Naples représentant une jeune femme marchant (en latin, « gradiva » signifie: celle qui marche, celle qui avance). La nuit suivante, Hanold rêve qu'il voyage dans le temps et rencontre la jeune fille dans les rues de Pompéi, le jour même de l’éruption du Vésuve, en 79 avant Jésus-Christ.
L'acquisition de cette œuvre majeure a été rendue possible grâce à une importante mobilisation du fonds du patrimoine et à la Société des Amis du Musée national d’art moderne.

Le dernier jour de Pompéi. La peinture transpose littéralement le passage le plus dramatique du récit de Jensen. Alors que le Vésuve, à l’arrière plan, apparaît au moment de son éruption, le peintre fige la métamorphose de Gradiva entre créature de chair et figure minérale, entre vie et mort. Dans la partie gauche de la composition, des coquelicots renvoient au passage du roman où Gradiva disparaît par la fissure d’un mur bordé par ces fleurs. Un essaim d’abeilles évoque, suivant les exégètes de l’œuvre, soit les insectes qui agacent l’archéologue Hanold, soit les abeilles qui accompagnent les fêtes bachiques dans leurs représentations sur les murs de la Villa des mystères de Pompéi
Si Gradiva s’est imposée aux surréalistes comme la figure par excellence de l’acte créateur, elle a également inspiré Roland Barthes, qui lui a consacré un chapitre de ses Fragments d’un discours amoureux (1977) ou Michel Leiris, qui a fondé, en 1986, une revue d’anthropologie qu’il a baptisé Gradhiva. En 2007, Alain Robbe-Grillet a réalisé une adaptation cinématographique libre du roman de Jensen : C’est Gradiva qui vous appelle.

André Masson (1896-1987). Peintre, dessinateur, sculpteur et illustrateur, André Masson fut l’un des tout premiers acteurs du groupe surréaliste réuni par Breton en 1924. Ses premières oeuvres datent de 1919, influencées d’abord par Cézanne puis par les cubistes.
Son tableau Les Quatre éléments (1924) au contenu fortement symboliste est remarqué par Breton qui l’achète lors de son exposition à la Galerie Simon, galerie de Daniel-Henry Kahnweiler, qui sera le marchand quasiment exclusif de Masson tout au long de sa vie.
Masson est l’un des premiers artistes à exécuter des dessins automatiques. En 1929, il rompt avec Breton avec lequel il se réconcilie en 1936… En mars 1941, Masson quitte la France occupée et se réfugie avec sa famille aux États-Unis, où il retrouve plusieurs surréalistes autour de Breton. Sa production américaine et sa démarche automatique sera déterminante sur l’œuvre d’Arshile Gorky et Jackson Pollock.
De retour en France en 1945, Masson s’installe à Aix-en-Provence et remplace l’automatisme par une peinture de paysage expressionniste et lyrique très colorée, qui dans les années 1950 tendra vers l’abstraction. À la demande d’André Malraux et de Jean-Louis Barrault, il exécute en 1965 le décor du plafond du théâtre de l’Odéon ; la même année, une rétrospective au musée national d’Art moderne à Paris consacre son oeuvre. Il meurt à Paris en 1987, à l’âge de 91 ans.

Le premier volume du Catalogue raisonné de l’œuvre peint d’André Masson (1919-1941) est paru aux éditions ArtAcatos en septembre 2010, recensant 580 huiles et sable sur toile. Le prochain volume (1941-1980) devrait présenter plus de 1 000 tableaux.
Le MNAM possède plus de 90 oeuvres d’André Masson.