Dans un hors-série à paraître le 12 septembre, le mensuel « Connaissance des arts » revient, à l’occasion de les 60 ans du ministère de la Culture, sur les faits marquants de son histoire. En avant-première, nous publions le témoignage de trois personnalités sur le rôle que le ministère a joué dans leur discipline ou dans leur parcours. Deuxième volet de notre série : Annette Gerlach, journaliste sur Arte, parle de l'Europe de la Culture (2/3).

Après un artiste - et quel artiste ! - puisqu'il s'agissait de Pierre Soulages, le ministère de la Culture a souhaité donner la parole à Annette Gerlach, journaliste allemande de la chaîne de télévision Arte, qui livre à Connaissance des Arts sa vision de la culture. Européenne, forcément européenne...

Deux semaines après l’incendie de Notre-Dame de Paris, j’animais au musée du Louvre la rencontre entre les ministres de la Culture et des Affaires européennes de l’Union européenne. Le but était de réfléchir à des initiatives collectives de préservation du patrimoine. Lorsque Franck Riester a raconté dans le détail cette « nuit du feu » telle qu’il l’a vécue, l’ensemble de l’assemblée était médusé. On aurait pu entendre une aiguille tomber. Voilà ce qu’est la culture : une force transcendante qui inscrit la condition humaine dans quelque chose qui la dépasse. « Ce qui fait de l’homme autre chose qu’un accident de la nature », disait André Malraux.

Durant cet événement, le désir de travailler collectivement autour du patrimoine est devenu palpable. Comme si soudain toutes ces personnes œuvrant pour la préservation et la valorisation du patrimoine dans leur pays s’éveillaient d’une sorte de sommeil de la Belle au bois dormant, et, prenant conscience qu’il existe des princesses dans tous les pays, rêvaient d’organiser un grand mariage.

Voilà ce qu’est la culture : une force transcendante qui inscrit la condition humaine dans quelque chose qui la dépasse

L’Europe de la culture est aujourd’hui une réalité, cela ne fait aucun doute. Partout sur le continent, nous avons depuis longtemps la possibilité d’écouter la même musique, de voir les mêmes films, de lire les mêmes livres. C’est autour de cette conscience d’une culture européenne qu’est d’ailleurs née Arte en 1992. En nous appuyant sur le noyau franco-allemand, nous ne cessons d’élargir cette dynamique à une logique européenne. En puisant dans les forces et les faiblesses de chaque caractère national, nous sommes finalement parvenus à construire une troisième voie, dans laquelle tout le monde est gagnant.

À mes yeux, ce travail culturel est une superbe métaphore des possibilités qu’offre l’Europe. La France restera toutefois un cas particulier, un pays où la culture sera toujours directement liée à son image : lorsque l’on pense « France », on pense « culture ». La création du ministère est venue cristalliser cette idée, en plaçant la culture au cœur de l’action de l’État pour en faire un pilier de la nation. C’est une chance unique, dont il faut avoir conscience.

60 ans d'action, 60 ans de projets, 60 ans de passion

Rétrospectif, singulier et prospectif : c’est sous ce triple prisme que Connaissance des Arts a choisi de porter, dans un numéro hors-série à paraître le 12 septembre, un regard à la fois informé et distancié sur les 60 ans ministère de la Culture. Un regard pluriel, donc, alternant faits marquants – des maisons de la culture au pass Culture, en passant par la loi sur le prix unique du livre, la création de la Fête de la musique ou la défense de l’exception culturelle –  et témoignages de personnalités emblématiques, comme Natalie Dessay, Renaud Capuçon, Blanca Li, Philippe Starck, Agnès b. ou Bérénice Béjo. Un entretien avec Franck Riester, actuel titulaire du portefeuille de la Rue de Valois, permet de faire le point sur les grands défis de demain.

"Le ministère de la Culture a 60 ans", hors-série n°884 de Connaissance des Arts, septembre 2019, 9 € www.connaissancedesarts.com